Spécial Namur, ville culturelle: tous les projets qui ont émergé ces 10 dernières années
Beaucoup d’initiatives se sont concrétisées au cours de la dernière décennie. Elles ont eu pour principal effet de reconfigurer la vie culturelle namuroise. Inventaire non exhaustif.
En novembre dernier, Namur a été désignée par l’Unesco « ville créative » en matière d’arts numériques. Une distinction qu’elle doit en partie au Kikk Festival, l’une des grandes réussites culturelles namuroises. Pour la dixième édition, ce mois-là, les organisateurs se sont de nouveau emparés de quartiers entiers de la cité et y ont laissé s’exprimer une programmation célébrant à la fois l’innovation technologique et les arts numériques. Le tout à destination d’un public international. Au tout début de l’aventure, « on s’est posé beaucoup de questions sur le fait de rester à Namur ou de déménager vers une autre ville où nous attendait peut-être un public plus large, se rappelle Gaëtan Libertiaux, directeur artistique du festival. Nous n’étions pas soutenus par la Ville comme nous le sommes aujourd’hui. On a finalement décidé de rester et c’était clairement la bonne option. Chaque année, des gens venus du monde entier pour assister au Kikk se retrouvent à Namur comme dans un village et cela crée une ambiance festival à l’échelle de la ville qu’on n’aurait pas eue ailleurs. »
Les Abattoirs de Bomel font également partie des succès culturels namurois. Depuis l’ouverture, en 2014, dans un quartier à cheval sur Saint-Servais et Namur, la structure réalise un patient travail de médiation culturelle. « Ici, l’art a pleinement sa place bien sûr, mais quand il parvient à être « prétexte à », c’est encore mieux. Notamment quand il permet aux publics que nous recevons d’exprimer des choses », résume Jean-François Flamey, l’attaché à la communication des Abattoirs. Le lieu accueille un public venu spécialement pour des expositions ou des spectacles mais il est aussi ouvert plus largement. Des hommes et des femmes y ont rendez-vous toute l’année pour participer à des formations dans des salles agencées. Des élèves de l’école professionnelle voisine s’y faufilent également très régulièrement. « Même s’ils ne sont pas venus pour cela, à un moment donné, s’ils jettent un oeil sur l’exposition en cours ou s’ils engagent la conversation dans le bar avec un artiste en résidence, nous avons rempli notre mission », sourit Jean-François Flamey.
Attendu depuis plusieurs années, le Delta a ouvert ses portes à l’automne 2019. L’infrastructure est une réussite. Trois salles de jauges différentes (80, 150 et 600 places), des espaces d’exposition, un foyer ouvert vers l’extérieur, un rooftop avec vue panoramique sur Namur et même des studios pour des artistes en résidence: le lieu ne manque pas d’atouts. Se déploiera- t-il à la mesure de la qualité de l’infrastructure? C’est trop tôt pour le dire. Quelques mois après son ouverture, le Delta, comme l’ensemble des autres lieux culturels, a dû fermer pour cause de pandémie et n’a recommencé à fonctionner à peu près normalement que tout récemment. De quoi briser un élan. Mais les équipes provinciales de la Maison de la culture sont déterminées à relancer la machine dans les prochains mois et à faire de l’espace le lieu de vie qu’il est sur papier. « On verra comment les gens se l’approprient, espère Bernadette Bonnier, la directrice. Pour nous, c’est encore une interrogation. Mais nous sommes confiants. »
L’inauguration, il y a quelques mois, de la Namur concert hall marque aussi un joli aboutissement pour le projet du Grand manège. La salle de 800 places offre, selon les spécialistes, une acoustique exceptionnelle, qui devrait attirer à Namur des ensembles prestigieux de musique classique.
Les différents ou pas assez soutenus
Le hub créatif Trakk est un autre projet convaincant. Gravitent autour des projets entrepreneuriaux auxquels il est censé donner corps. L’outil est tourné de façon générale vers les industries culturelles et créatives. Au sein de celui-ci, un Fablab, dont la gestion a été confiée à l’asbl Kikk, est destiné plus particulièrement aux projets artistiques. Les commentaires sont très positifs. Namur se serait doté là de l’outil qui lui manquait pour convertir en opportunités économiques la créativité et l’innovation de son territoire. « La professionnalisation de la culture est un vrai enjeu, plaide Gaëtan Libertiaux. Des initiatives comme le Trakk y participent incontestablement en suscitant des rencontres. »
Certains projets ont grandi au cours des dix dernières années sans la reconnaissance qu’ils méritent. Comme le théâtre Jardin passion, souvent pointé comme l’angle mort d’une certaine politique culturelle. Celle de la Fédération Wallonie-Bruxelles qui décidait, en 2017, de ne pas réévaluer son contrat-programme. « On a en tout et pour tout 75 000 euros, regrette Sébastien Hébrant, le cofondateur. C’est une somme ridicule alors qu’on assure 120 représentations par an, qu’on crée un ou deux spectacles, qu’on en accueille une vingtaine d’autres. » Le bourgmestre, Maxime Prévot, partage le constat: « Je suis un des premiers partisans du théâtre Jardin passion. Ce à quoi ils ont droit aujourd’hui est insuffisant. »
« Au-delà de ce qui a été fait au cours des dernières années, je pense qu’il faut désormais, de façon générale, avancer dans la création de tiers-lieux, affirme Gaëtan Libertiaux. J’entends par là des lieux d’accueil tous publics avec des propositions artistiques, culturelles et liées au divertissement. On doit aller beaucoup plus loin que ce qui existe aujourd’hui. » C’est notamment l’objectif de Chambres avec vue, dont la 7e édition se clôture ce week-end des 19 et 20 mars partout dans Namur. Principe: expositions de peinture, sculpture, gravure, photo, vidéo, illustration, street art, installations … dans l’appartement ou la maison de particuliers, dans des jardins, des commerces, des églises, des hôtels. Avec impulsion pour le travail d’artistes namurois, de tous âges, tous styles et toutes disciplines.
Bref, ça bouge. Au point que, culturellement, la ville devient « the place to be », affirmait en décembre dernier à Omalius, le magazine de l’UNamur, Virginie Demilier, la directrice générale du Théâtre de Namur et des Abattoirs de Bomel.
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