Dépollution : c’est encore trop souvent le contribuable qui paie à la place du pollueur (rapport)
L’application du principe du pollueur-payeur varie d’un secteur et d’un État membre à l’autre, sans couvrir tous les cas de figure, ce qui contraint alors les pouvoirs publics – et donc le contribuable – à supporter les frais de dépollution, a dénoncé la Cour des comptes européenne dans un rapport publié lundi.
Ainsi, lorsque les entreprises ne disposent pas d’une garantie financière suffisante (comme une police d’assurance couvrant la responsabilité environnementale), le risque existe de voir les coûts d’assainissement de l’environnement terminer à la charge des contribuables, soulignent les auditeurs.
À ce jour, seuls sept États membres (la Tchéquie, l’Irlande, l’Espagne, l’Italie, la Pologne, le Portugal et la Slovaquie) exigent une garantie financière pour tout ou partie des responsabilités environnementales. Mais à l’échelle européenne, ce type de garantie n’est pas obligatoire. Autrement dit, les contribuables sont contraints d’intervenir et de payer les coûts d’assainissement lorsqu’une entreprise à l’origine de dommages environnementaux est déclarée insolvable.
Même si le principe du pollueur-payeur est généralement bien ancré dans la politique environnementale de l’UE, certains autres cas posent aussi problème.
Ainsi, malgré la directive sur les émissions industrielles encadrant les installations les plus polluantes, la plupart des États membres ne tiennent toujours pas les industriels pour responsables des dommages environnementaux qu’ils causent si leurs émissions restent sous les limites autorisées.
La directive n’exige pas non plus des industriels qu’ils prennent en charge les coûts liés à l’impact de la pollution résiduelle, qui se chiffrent en centaines de milliards d’euros, souligne la Cour des comptes. Dans le même ordre d’idées, la législation de l’UE sur les déchets intègre le principe du pollueur-payeur, notamment sous la forme de la « responsabilité élargie des producteurs ». Mais les auditeurs font observer que des investissements publics considérables sont souvent nécessaires pour combler le déficit de financement.
Les pollueurs ne supportent pas non plus l’intégralité des coûts de la pollution de l’eau. Dans l’UE, les ménages sont généralement ceux qui paient le plus, alors qu’ils ne consomment que 10 % de l’eau. En outre, le principe du pollueur-payeur reste difficile à appliquer à la pollution provenant de sources diffuses, et plus particulièrement de l’agriculture.
Par ailleurs, bien souvent, les sites ont été contaminés il y a si longtemps que le pollueur n’existe plus, ne peut pas être identifié ou ne peut pas être tenu pour responsable. Cette pollution « orpheline » est l’une des raisons pour lesquelles l’UE a dû financer des projets de dépollution qui auraient dû être à la charge des pollueurs. Pire encore, des fonds publics européens ont été utilisés en violation du principe du pollueur-payeur, notamment lorsque les autorités des États membres n’ont pas mis en oeuvre la législation environnementale et contraint le pollueur à payer la note.
« Dans l’UE, près de 3 millions de sites sont potentiellement contaminés, principalement par l’activité industrielle ainsi que par le traitement et l’élimination des déchets », selon la Cour des comptes européenne. « Six masses d’eau de surface sur dix, comme des lacs et des rivières, ne sont pas en bon état chimique et écologique. La pollution atmosphérique, risque sanitaire majeur en Europe, est également nocive pour la végétation et les écosystèmes. »
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