Nicolas De Decker
Pour Mathieu Michel (commentaire)
Le titre qui précède et les lignes qui suivent pourraient heurter la sensibilité de nos lecteurs les plus fragiles.
Aux lecteurs les plus fragiles, il est conseillé de tourner sans tarder cette page où il ne sera pas écrit trop de mal de Mathieu Michel: il sera écrit que Mathieu Michel marque un basculement paradigmatique dans la philosophie occidentale, et il sera même démontré que Mathieu Michel est un cataclysme ontologique.
C’est dire si tourner la page procède, pour les êtres sensibles, de l’impératif catégorique.
L’existence précède l’essence, posait en effet Sartre. « L’homme, tel que le conçoit l’existentialisme, s’il n’est pas définissable, c’est qu’il n’est d’abord rien. Il ne sera qu’ensuite et il sera tel qu’il se sera fait », ajoutait le strabique germanopratin, que l’essence précédant l’existence de Mathieu Michel vient brutalement renverser.
Car Mathieu Michel n’est pas comme il existe, Mathieu Michel n’existe que parce qu’il est. Mathieu est fils de Louis. Il est né tel et, comme tel il existe dans la vie politique. Comme son frère avant lui, comme d’autres après lui, il a été fait tel par son père.
Il est, Mathieu Michel, et il en profite car il n’est pas responsable de qui il est, pas plus qu’il n’est responsable de sa burlesque désignation par un président qui ne l’est pas moins.
Mais il en est coupable, forcément coupable, car Mathieu Michel, Dreyfus du riche, a été, il est, il sera jugé en son essence et non par son existence.
Tout, dans ce qu’il fait et dans ce que notre société en fait, désormais le ramène à ce qu’il est plutôt qu’à ce qu’il fait.
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Dès après 1999, personne ne se rappelait le nom du prédécesseur de Louis Michel au ministère des Affaires étrangères, parce que Louis avait existé. On ne l’avait pas oublié pour ce que Louis était, mais pour ce qu’il avait fait.
Aussi bien, depuis octobre 2020, personne ne se rappelle le nom des prédécesseurs de Mathieu Michel à la compétence de l’Agenda numérique et à la tutelle de la Régie des bâtiments, parce que Mathieu y aura été. On ne les a pas déjà oubliés pour ce que Mathieu a fait, mais pour qui il est.
Aussi bien, personne n’avait jamais réduit la compétence numérique d’un ministre, sa connaissance des enjeux digitaux, sa prescience des impacts révolutionnaires de ces bouleversements technologiques, à son activité sur Twitter. Mais pour Mathieu Michel, à l’exception de tous les autres, parce qu’il est et pas pour ce qu’il a fait, on l’a fait.
Aussi bien, personne n’avait jamais réduit la compétence et la courtoisie linguistiques d’un ministre à ce qu’il pouvait bredouiller dans la langue des autres, au bout de trois heures de discussions, et à une vidéo coupée à la hache et sous-titrée en lettres grasses. Mais pour Mathieu Michel, à l’exception de tous les autres, surtout de ces Flamands qui peuvent aussi mal bredouiller dans la langue des nôtres mais dont personne ne dit jamais rien, parce qu’il est et pas pour ce qu’il a dit, on l’a dit.
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L’essence de Mathieu Michel a fait de ces objets des sujets.
Aussi bien l’existence de son père lui rapporte déjà gros, aussi bien son essence à lui lui coûte déjà beaucoup.
Pour chacun l’existence précède l’essence.
Aussi bien, pour Mathieu Michel, c’est l’essence qui précède l’existence.
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