Comment retrouver le sourire
Avec le talent d’observation qui le caractérise, David Le Breton rend hommage à cette pratique si simple et à la fois si essentielle, dans Sourire.
Il nous a tant manqué au temps du Covid, le sourire. « On ne sourit pas avec les yeux ou les plissements du front mais avec la totalité de son visage. Et si l’on devine parfois le sourire à travers la voix, le masque l’absorbait tout entier », rappelle David Le Breton. Avec le talent d’observation qui le caractérise, le professeur de sociologie de l’université de Strasbourg rend hommage à cette pratique si simple et à la fois si essentielle, dans Sourire (1). Une démarche d’autant plus utile que « dans nos sociétés marquées par l’ultralibéralisme et la fragmentation du lien social, le sourire est souvent une antivaleur, écrit l’auteur, là où il s’agit le plus souvent d’afficher une détermination, une agressivité, un visage farouche ou blasé de plus en plus de mise aujourd’hui ».
Alors, certes, le sourire peut être une obligation sociale, pour le commerçant qui se veut avenant. Il peut accompagner le repos de l’assassin ou masquer le désarroi du menteur. Un fantôme de sourire peut même aider à annoncer une mauvaise nouvelle. Mais il est avant tout « une culmination du lien social, un abandon à l’autre, une confiance mutuelle sans ambiguïté apparente ». « Le sourire invite à l’échange, il arrive même qu’il relaie la parole et vaille à lui seul comme langage quand les mots sont impuissants à dire les choses ou quand une langue commune manque entre les individus », précise David Le Breton.
Don aux autres mais aussi don à soi, comme l’exprime ce « sourire aux anges, énigmatique, peut-être sans destinataire, qui traduit une forme de délivrance, d’abandon heureux à ce qui vient, encore inconnu ». Que faut-il de plus pour retrouver le chemin du sourire?
(1) Sourire. Une anthropologie de l’énigmatique, par David Le Breton, Métailié, 224 p.
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