Voici onze gouvernements fédéraux envisageables, dont quatre ont une faible chance
La piste d’un gouvernement majoritaire sans le PS (ou sans la N-VA) est évoquée, alors que le trio MR-CD&V-Open VLD est en piste. Est-ce réaliste ? Voici toutes les formules envisageables, dont certaines sont surprenantes.
Le trio Bouchez – Coens – Lachaert est à la manoeuvre. Les présidents des partis du gouvernement minoritaire actuel (MR, Open VLD, CD&V) tentent une nouvelle fois de former un gouvernement fédéral majoritaire de peine exercice. Ils balisent de nouveaux chemins ou réessaient des pistes déjà empruntées après que leurs homologues socialistes, Paul Magnette et Conner Rousseau, aient conclu que la tripartie classique (socialistes, libéraux, sociaux-chrétiens), appuyée par de l’extérieur par la N-VA ou les écologistes, étaient la seule formule possible.
L’impasse politique pourra-t-elle être surmontée ? Voici onze pistes qui restent susceptibles d’être empruntées, certains surprenantes. Même si la plupart sont très complexes, voire pratiquement impossibles, et que des élections anticipées restent hautement probables, de l’avis de plusieurs politologues.
Les formules majoritaires (avec une majorité dans les deux groupes linguistiques)
La grande union (N-VA, libéraux, socialistes, sociaux-chrétiens, écologistes, DéFi) – 120 sièges sur 150
Impossible. C’est, somme toute, la formule qui a prévalu pour soutenir les pouvoirs spéciaux accordés au gouvernement Wilmès pour gérer la crise sanitaire. Ces dix partis composaient le fameux ‘super kern’ qui se réunissait tous les samedis. Mais la « grande union nationale » mourra avec la fin des pouvoirs spéciaux : DéFi a déjà exprimé son refus de toute coalition avec la N-VA et Ecolo n’est pas loin de cette intransigeance absolue. Pour ne pas parler de l’impossibilité chronique d’un dialogue PS/N-VA qui conditionne bien des solutions majoritaires possibles.
La Bourguignonne (N-VA, socialistes et libéraux) – 80 sièges sur 150
Très improbable. C’est la principale formule conditionnée depuis mai 2019 au dialogue entre les deux formations qui dominent les deux principales Communautés du pays, le PS et la N-VA. Le principal problème ? Pour gouverner avec le PS, ce qu’elle n’exclut pas, la N-VA exige des avancées institutionnelles vers le confédéralisme. Pour gouverner avec la N-VA, ce qu’il n’exclut plus tout à fait, le PS exige des avancées très importantes sur le plan social (augmentation du budget des soins de santé, des bas salaires… ) sans réforme de l’Etat. D’où l’impasse.
La coalition miroir (N-VA, CD&V, Open VLD, PS, MR, Ecolo) – 96 sièges sur 150
Impossible. C’est la piste préconisée un moment par le ministre-président flamand, Jan Jambon (N-VA) : il s’agit d’associer les coalitions au pouvoir en Flandre et en Wallonie. L’idée, aux relents confédéralistes, a fait rugie du côté francophone car elle nie la Région bruxelloise. En outre, elle se heurte à l’incompatibilité entre N-VA et PS-Ecolo.
Les formules majoritaires minoritaires (avec une majorité fédérale, mais pas dans chaque groupe linguistique)
La Suédoise élargie au PS (N-VA, PS, MR, Open VLD, CD&V) – 83 sièges sur 150
Impossible. Les partis du gouvernement minoritaire actuel ne seraient pas contre la possibilité d’élargir leur assise aux deux principales formations du pays. Cela permettrait de mener une politique de centre-droit qui leur convient et ne romprait pas avec les acquis de la Suédoise. Mais le PS, comme l’a rappelé encore le ministre-président wallon Elio Di Rupo, n’est pas prêt à jouer « la roue de secours d’un gouvernement des droites’.
La Vivaldi (Socialistes, libéraux, écologistes, sociaux-chrétiens – CD&V avec ou sans CDH) – 93 sièges sur 150
Très compliquée. Voilà le rêve réaliste cultivé par plusieurs francophones depuis les élections, une fois démontrée l’incapacité d’un dialogue entre PS et N-VA : une sorte de « grande union » portant un projet positif pour la Belgique, sans les nationalistes flamands. Mais le CD&V et l’Open VLD ne sont pas (encore ?) prêts à sauter dans une coalition ne comprenant pas les deux premiers partis flamands (N-VA et Vlaams Belang), a fortiori pour mettre en place un ambitieux plan de relance. Le mR n’est pas chaud non plus.
La coalition 77 de gauche (Socialistes, libéraux, écologistes, CDH et DéFi) – 77 sièges sur 150
Très improbable. Voilà la piste défendue depuis le début par DéFi, notamment : si le CD&V s’obstine à refuser d’entrer dans un gouvernement sans la N-VA, pourquoi ne pas allier les bonnes volontés et mettre en place cette coalition dite « 77 » ? Imbuvable pour les libéraux? Fragile et ne disposant que d’une ultra-minorité en Flandre. Mais ce ne serait pas totalement exclu.
La coalition 77 de droite (N-VA, SP.A, CD&V, Open VLD, CDH et MR) – 77 sièges sur 150
Moins improbable. En guise de réplique à la coalition 77 prônée par DéFi, certains élus, plutôt à droite, ont imaginé cette autre formule qui serait très majoritaire en Flandre et très minoritaire en Belgique francophone, un peu à l’image de la Suédoise. Improbable, elle laisserait le PS dans l’opposition et non le SP.A, mais ce pourrait être une autre formule sur laquelle travaille le trio Bouchez – Coens – Lachaert. Au MR, certains affirment que ce serait la piste numéro un tant les relations entre les présidents Bouchez et Magnette seraient difficiles. S’ajoute cette double conviction: jamais le PS ne fera d’accord avec la N-VA, tant la pression en interne est importante, et les partis flamands (CD&V et Open VLD) y restent très attachés.
Les minoritaires
La Suédoise (N-VA, MR, Open VLD, CD&V) – 63 sièges sur 150
Impossible. On reprend les mêmes et n recommence après la législature passée. Les libéraux et sociaux-chrétiens y étaient prêts, malgré a crise provoquée par la N-VA, mais cette formule ne dispose pas de majorité fédérale. Et à vrai dire, on ne voit pas très bien qui pourrait la soutenir de l’extérieur.
La Suédoise élargie (N-VA, MR, Open VLD, CD&V, CDH)- 68 sièges sur 150
Impossible. Le CDH n’a plus d’exclusive avec la N-VA, mais monter dans une telle coalition consisterait à faire un choix à droite toute. Avec ses cinq députés, il apporterait un peu plus d’assise du côté francophone, mais la formule reste bancale et serait en manque d’appui extérieur.
La tripartite classique (Socialistes, libéraux, sociaux-chrétiens) – 72 sièges sur 150
Dernier recours. C’est la formule désormais préconisée par les présidents socialistes, Paul Magnette et Conner Rousseau, après leur tour de consultations informelles. Minoritaire, elle aurait l’avantage de composer un coeur de majorité susceptible de faire appel à un soutien extérieur de la N-VA ou aux écologistes. Mais le MR n’en veut pas, du moins pour l’instant, au même titre que le CD&V et l’Open VLD. Parce que cela met potentiellement le Vlaams Belang au centre du jeu, pour faire et défaire les majorités à la Chambre. Ce pourrait toiutefois être un dernier recours, si rien d’autre ne fonctionne.
La réplique francophone (Socialistes, écologistes, sociaux-chrétiens, DéFi) – 69 sièges sur 150
Impossible. La plus improbable de toutes, ce serait une façon pour les francophones de rendre la monnaie de leur pièce à la N-VA et au MR après une législature de suédoise : ultra-minoritaire en Flandre et impossible pour le CD&V. Soyons de bon compte, personne n’en a jamais parlé sérieusement.
Lire aussi: Les étapes-clés de la crise politique
Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici