Anne-Sophie Bailly

Se concerter, pour ne pas déconcerter (édito)

Anne-Sophie Bailly Rédactrice en chef

La taxe kilométrique bruxelloise fait beaucoup de bruit mais la mobilité est loin d’être le seul domaine pour lequel les entités doivent impérativement et rapidement trouver un modus vivendi (stratégie de déconfinement, stratégie de vaccination, plan de relance). A défaut de concertation sur tous ces points, on fera face à un pays et des citoyens déconcertés. L’édito d’Anne-Sophie Bailly, rédactrice en chef du Vif/L’Express.

L’intention est louable. Offrir un air plus pur, réduire la congestion du trafic, taxer l’usage plutôt que la possession d’un véhicule à Bruxelles. La levée de boucliers était attendue. Double taxation pour les navetteurs, absence d’alternative efficace à la voiture, risque de délocalisation des entreprises. La proposition de taxation kilométrique dite « intelligente » du gouvernement bruxellois et baptisée SmartMove agite la Belgique depuis plus d’une semaine et provoque le courroux des deux autres Régions du pays, s’estimant mises devant un fait accompli. Accusation dont se défend le gouvernement de Rudi Vervoort (PS), rappelant qu’il s’agit d’un point central de l’accord de majorité et que si SmartMove constitue bien un plan concret de révision de la fiscalité automobile bruxelloise, il doit aussi servir de base de négociations avec les autres entités fédérées. Bref, ce projet de péage urbain version 2020 doit faire l’objet d’une concertation. Le mot est lâché.

La mobilitu0026#xE9; est loin d’u0026#xEA;tre le seul domaine pour lequel les entitu0026#xE9;s doivent impu0026#xE9;rativement et rapidement trouver un modus vivendi.

Il va falloir maintenant se mettre autour de la table et réfléchir ensemble à la manière de sortir de cet immobilisme permanent qui surgit dès qu’on aborde la question de la mobilité du pays. Pour trouver des solutions. Et que tous les indépendants wallons ou flamands qui entrent dans la capitale puissent continuer à exercer leur métier sans se voir fiscalement pénalisés. Que les Bruxellois puissent respirer un air moins chargé de particules fines. Que l’infirmier qui habite la périphérie mais entame sa garde quand Bruxelles s’éveille ne voie pas son pouvoir d’achat amputé d’une double taxation. Que la petite ceinture ne soit plus synonyme d’embouteillages perpétuels. Que le financement de transports en commun efficaces, rapides, ponctuels soit pris en compte dans l’équation. Comme celui de la mobilité douce. Que la question du leasing soit tranchée.

Quand ces questions seront abordées sans tabou par les trois Régions, on verra ce qui, de SmartMove ou de la concertation, constitue le coeur du problème. Car la mobilité est loin d’être le seul domaine pour lequel les différentes entités doivent impérativement et rapidement trouver un modus vivendi.

On pense ici évidemment à la stratégie de déconfinement. Qu’on attend plus concertée que l’annonce du pseudo-confinement en octobre dernier et sa disparité des mesures prises au compte-gouttes, Région par Région. Qu’on attend aussi moins incongrue que les récentes déclarations politiques faisant croire à un possible miracle de Noël et exigeant la tenue d’un comité de concertation… déjà programmé.

On pense à la stratégie de vaccination. Avec un Etat fédéral responsable de l’achat des doses et du matériel et des entités fédérées en charge de la vaccination. Entités qui devront avancer de concert pour ne pas voir une partie de la population seulement, ou plus rapidement, retrouver ses libertés.

On pense au plan de relance et aux aides européennes. Elles seront réparties sur la base d’une clé à déterminer et négociée, n’en déplaise à ceux qui voient déjà trois milliards d’euros entrer dans leurs caisses.

A défaut de concertation sur tous ces points, on fera face à un pays et des citoyens déconcertés.

Ce n’est pas le moment.

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