Vaccin contre le Covid: les groupes prioritaires définis trop tôt, selon Van Ranst
La Belgique s’est dotée d’une stratégie en matière de vaccination qui devrait être opérationnelle le 5 janvier prochain. Mais Marc Van Ranst tempère : comment déterminer qui exerce une profession essentielle ou qui est le plus à risque ? Les prochains mois ne seront pas de tout repos.
Lors de la phase 1B, les fonctions jugées essentielles pourront se faire vacciner. Mais cela concerne qui exactement? Le ministre flamand de la Santé, Wouter Beke (CD&V), souhaite par exemple que l’enseignement figure sur cette liste aux côtés de la police, des pompiers et de la protection civile. Le virologue Marc Van Ranst (KU Leuven), interrogé par De Morgen, prédit des tensions sur ce sujet et ne veut pour l’instant pas se mouiller. « Je sais que c’est un champ de mines. Mais à un moment donné, le gouvernement devra prendre une décision », indique-t-il.
Outre la précision des fonctions jugées essentielles, et donc prioritaires, la discussion fait aussi rage sur le plan lui-même. « J’ai du mal à croire qu’une infirmière en bonne santé dans le service de radiologie devrait avoir la priorité sur une personne qui n’a qu’un seul poumon. S’il attrape le Covid, c’est sa vie qui est en danger. Attention, je comprends les choix qui ont été faits. (…) La pire chose que vous puissiez faire est d’assigner quelqu’un à un groupe prioritaire et de l’en retirer« .
Aujourd’hui, la priorité est notamment donnée aux personnes placées dans des centres de soins, mais nous ne savons pas encore exactement quelle sera la réaction de ce groupe cible à la vaccination. A-t-on défini les groupes prioritaires trop tôt, alors qu’on en sait encore très peu sur la manière dont fonctionnent ces vaccins ? « Je n’aurais pas vraiment commencé une stratégie tant que nous n’aurions pas eu ces données », indique le virologue. « Ces vaccins doivent encore passer par les procédures d’approbation de l’Agence européenne des médicaments, l’EMA. Pour moi, c’est maintenant le premier obstacle de notre stratégie. Ces approbations ne vont pas de soi et nous ne savons pas si elles se feront dans les délais fixés pour notre stratégie. »
Il y a également des obstacles auxquels les pays qui ont passé commande, dont la Belgique, devront faire face. Faute de matières premières, Pfizer livrera par exemple la moitié des doses promises cette année. Ce n’est pas étonnant, vu que le marché mondial est en pleine effervescence. « Tout le monde doit avoir de grandes quantités des mêmes produits. En général, ce n’est pas un problème pour les médicaments, car il y a beaucoup d’autres produits sur le marché. Mais lorsqu’il s’agit d’un nouveau vaccin, vous pouvez le ressentir », explique-t-il.
Fort de son statut d’ancien commissaire chargé de la grippe, Van Ranst tempère l’enthousiasme autour du vaccin et de la stratégie annoncée la semaine dernière: « Chaque mesure simple que vous voulez prendre n’est pas aussi simple que cela. (…) Il est préférable de ne pas communiquer trop rapidement sur les groupes prioritaires. » Quant à ceux qui demandent aux politiciens et aux experts de se faire vacciner d’abord pour rassurer la population, il répond : « Si cela permet de montrer l’exemple, nous le ferons. »
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