A l’ère de Trump, la diversité reléguée au second plan chez Meta
Mark Zuckerberg continue son virage politique: le patron de Meta a mis fin aux programmes conçus pour favoriser la diversité du personnel, une nouvelle décision qui aligne le géant des réseaux sociaux avec Donald Trump.
« Le paysage juridique et politique autour des efforts de diversité, d’équité et d’inclusion aux États-Unis est en train de changer », explique une note interne rapportée par Axios vendredi et confirmée par Meta à l’AFP.
La maison mère de Facebook, Instagram et WhatsApp revient ainsi en arrière sur une approche adoptée depuis des années pour créer un environnement plus inclusif et plus équitable.
« Nous sommes au service de tous », assure la note, précisant que le groupe californien continuera à chercher des candidats d’origines diverses tout en supprimant les objectifs de représentation spécifiques pour les femmes et les minorités ethniques.
D’autres grandes entreprises américaines telles que McDonald’s, Ford, Amazon et les supermarchés Walmart sont déjà revenues sur leurs politiques de « diversité, égalité et inclusion » (DEI), après un arrêt de la Cour suprême en 2023 qui a mis fin à la discrimination positive dans les universités, un des acquis de la lutte pour les droits civiques des années 1960.
« Le terme ‘DEI’ est devenu controversé, notamment parce qu’il est compris par certains comme (…) le traitement préférentiel de certains groupes par rapport à d’autres », souligne Janelle Gale, vice-présidente des ressources humaines de Meta, dans sa note.
« Société émasculée »
Le virage des entreprises s’inscrit dans un contexte d’offensive « anti-woke » menée par les républicains.
En Californie, Elon Musk et sa plateforme X (anciennement Twitter) ont libéré les voix conservatrices, voire machos, qui avaient traditionnellement peu de portée dans l’Etat démocrate et progressiste.
« Je pense qu’une grande partie de notre société est devenue (…) castrée en quelque sorte, ou émasculée« , a déclaré Mark Zuckerberg à Joe Rogan, l’animateur d’un podcast conservateur et très populaire. Il a expliqué être arrivé à cette conclusion à force de pratiquer les arts martiaux mixtes avec d’autres hommes, qui voient « le vrai Mark » en compétition, et non pas seulement le dirigeant policé et formé à parler aux médias.
Pendant l’interview fleuve diffusée vendredi, il a de nouveau accusé le gouvernement Biden de « censure » et a regretté d’avoir « accordé trop de crédit » aux médias dans le passé, une rhétorique qui rappelle fortement celle d’Elon Musk.
Cette semaine Mark Zuckerberg a mis fin au fact-checking de Meta aux Etats-Unis, un programme de vérification des faits par des organisations indépendantes dans le monde, né en réponse au flot de désinformation sur ses plateformes, qui inquiétait les autorités démocratiques. A la place, son entreprise va mettre en place un système de « notes de la communauté », pour les utilisateurs souhaitant ajouter du contexte à certains posts, comme sur X.
Et, toujours comme sur X, les règles de modération des contenus sur Facebook et Instagram ont été assouplies: davantage d’insultes et d’appels à l’exclusion des femmes et des personnes LGBT+ des institutions sont désormais autorisés.
« Optimiste »
Mark Zuckerberg, multiplie les avances à l’égard de Donald Trump depuis cet été, et surtout depuis son élection, comme plusieurs de ses voisins et concurrents.
Il a dîné avec lui en novembre, fait un don d’un million de dollars pour sa cérémonie d’inauguration le 20 janvier et nommé plusieurs de ses alliés à des postes clefs. Il était de nouveau vendredi à Mar-a-Lago, la résidence actuelle du président élu en Floride, d’après la presse américaine. « Je pense que le président Trump veut simplement que l’Amérique gagne, et cela me rend optimiste », a-t-il dit à Joe Rogan.
Peu après l’annonce sur la diversité chez Meta, Roy Austin, vice-président chargé des droits civiques au sein de l’entreprise, a annoncé sa démission.
« La possibilité de contribuer à la création d’un monde plus juste et plus équitable, même de façon modeste, a été pour moi une force motrice », a indiqué celui qui a été procureur général adjoint au sein de l’administration Obama, dans un message sur Linkedin vendredi.
Le revirement sur le fact-checking, qualifié de « honte » par Joe Biden vendredi, a provoqué une vague d’inquiétude dans de nombreux pays, jusqu’à l’ONU et le Conseil de l’Europe.
Si Meta généralisait au monde entier sa décision, cela aurait des conséquences dramatiques, a averti l’International Fact-Checking Network (IFCN) qui regroupe plus de 130 organisations, dont l’AFP.
L’AFP participe dans plus de 26 langues au programme de fact-checking de Meta, qui rémunère plus de 80 médias à travers le monde pour utiliser leurs « fact-checks » sur Facebook, WhatsApp et Instagram.