Selon la formule choisie, le nombre «Pi» permet de calculer la circonférence ou l’aire d’un cercle et d’une sphère. © GETTY IMAGES

Série (6/7) | L’infini mystère du nombre Pi

Christophe Leroy
Christophe Leroy Journaliste au Vif

Egalement appelé «constante d’Archimède», le nombre Pi (ou π) ne se loge pas que dans les cahiers de maths. En 4.000 ans, son infinité s’est immiscée dans d’indispensables calculs.

Aux quatre coins de la planète, il fait l’objet d’étranges tentatives de record du monde: parvenir à identifier le plus grand nombre possible de ses décimales, grâce à des puissances de calcul toujours plus performantes. Le 14 mars dernier, la société Solidigm, spécialisée dans le stockage de données, annonçait avoir identifié 105.000 milliards de décimales du nombre Pi, symbolisé par la lettre grecque du même nom, π. Le précédent record (100.000 milliards), attribué à une employée de Google Cloud, datait de 2022. Le calcul de Solidigm prit 75 jours et nécessita près d’un pétaoctet (soit 1.024 téraoctets). «Des processeurs plus rapides contribueront à accélérer les calculs, mais le facteur limitant est la quantité de stockage», expliquait la société.

Hormis pour le prestige ou l’image de marque, un calcul aussi poussé ne sert à rien. Même la Nasa arrête ses calculs aux quinze premières décimales de Pi, à savoir 3,141592653589793. En mathématiques, ce nombre qualifié d’irrationnel, en raison de son infinité de chiffres après la virgule, est considéré comme une constante, puisque sa valeur ne change jamais. Selon la formule choisie, il permet de calculer la circonférence ou l’aire d’un cercle et d’une sphère. En physique, la fréquence angulaire d’une onde. Il survient même dans les probabilités. En 1733, le naturaliste français Georges-Louis Leclerc propose l’expérience de l’aiguille de Buffon, du nom de son titre de comte: il suggère qu’en faisant tomber un très grand nombre de fois des aiguilles sur un parquet, dont la largeur des lattes est supérieure à la longueur des aiguilles, il est possible d’aboutir à une approximation de la valeur de Pi.

L’histoire de ce nombre fascinant est en réalité plus ancienne que l’époque de la Grecque antique qui lui donna cette appellation. Vers 1900 avant J-C, les Mésopotamiens sont les premiers à tenter d’estimer le rapport entre la circonférence d’un cercle et son diamètre (3+1/8 = 3,125), comme l’attestent des tablettes en écriture cunéiforme. Environ 400 ans plus tard, les Egyptiens obtiennent une autre valeur, 3,1605, à savoir le carré de 16/9. Vers 700 avant J-C, des mathématiciens indiens fournissent quant à eux des estimations comprises entre 3,11 et 3,20. Mais c’est bel et bien Archimède qui, vers 250 avant J-C, développe la méthode la plus rigoureuse pour définir Pi. Elle lui permet d’aboutir à une approximation comprise entre 3,1408 et 3,1429. Par la suite, le nombre continue à traverser les âges et les continents, pour lui conférer une plus grande précision. Au XVIe siècle, le mathématicien allemand Ludolph Van Ceulen passe de longues années à définir le plus grand nombre de décimales de Pi. Avec succès, puisqu’il parvient à en identifier 35 avec exactitude. A sa mort, en 1610, Pi fut d’ailleurs rebaptisé «nombre de Ludolph», une appellation qui rivalisa pour la première fois avec la «constante d’Archimède», demeurant toutefois bien plus célèbre.

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