Reconstruction de scènes cachées. Le procédé utilise les ombres portées et les décode au moyen d'algorithmes. © DR

Voir à travers les murs, bientôt une réalité ?

Rosanne Mathot Journaliste

Regarder à travers les murs. Voir ce qui nous est invisible et ce, en moins d’une minute (48 secondes) : c’est ce que promettent les chercheurs de l’université de Boston qui sont en train de transformer nos smartphones en espèce de périscopes futuristes. Grâce à un algorithme qui décode les formes des ombres portées, la photo prise par n’importe quel téléphone intelligent sera capable de montrer ce que l’oeil humain est incapable de voir.

Vous êtes policier et vous soupçonnez la présence d’un enfant captif dans le coffre d’une voiture ? Clic-clac, vous prenez la voiture en photo et… miracle : le cliché de votre smartphone montrera ou non la présence d’une forme humaine là où vous la suspectiez. Comment est-ce possible ? Tout simplement grâce aux ondes hyperfréquences (imperceptibles à l’oeil nu) capables de traverser tous les matériaux (bois, béton, marbre, acier…). Bien sûr, le cliché obtenu n’est pas optimal, pas parfaitement clair… mais il suffira largement à l’algorithme pour détecter la présence de la personne retenue contre son gré dans l’auto, sans avoir besoin d’ouvrir le coffre.

A l’origine de cette technologie  » passe-muraille « , l’ingénieur Vivek Goyal, qui entend rendre les villes plus sûres : en se basant sur ce que les ombres ont à montrer, son invention pourrait, par exemple, permettre à une smart car (une voiture autonome, qui se conduit toute seule) de repérer un cycliste s’apprêtant à débouler devant l’auto, alors même que des bus, des arbres ou des immeubles le masquent à la vue.

D’ailleurs, comment fonctionne-t-elle, cette vue ? L’oeil d’un humain possède trois types de récepteurs de couleur, ou cônes, sensibles aux fréquences correspondant au rouge, au bleu et au vert, soit un spectre de longueurs d’onde s’étendant de 380 à 740 nanomètres. Autant dire que la vision des rayons X, des infrarouges ou des ultraviolets n’est pas prévue dans son arsenal génétique de base. Pour voir à travers les murs, comme l’iconique superhéros Superman qui voit, lui, à travers les objets, il faudrait que l’oeil puisse capter la bande de fréquence des térahertz (THz), qui se situe entre les fréquences radioélectriques des micro-ondes et celles, optiques, de l’infrarouge. Cette bande particulière s’étend entre 100 GHz (gigahertz) et 30 THz : on parle de rayons T, avec T comme terahertz.

En attendant d’être pourvu d’un oeil bionique, la technologie mise en avant par Vivek Goyal est très prometteuse, notamment pour les pompiers, qui pourraient mieux s’organiser devant un immeuble en flammes en détectant des présences humaines à l’intérieur. Mais, comme chaque médaille, celle-ci aussi a son revers : quid si cette technologie prometteuse tombait entre de mauvaises mains ? Elle serait une aubaine pour les cambrioleurs qui sauraient d’emblée si la maison qu’ils s’apprêtent à dévaliser vaut le coup et si elle est occupée.

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