Un supercarburant pour fusées découvert… De quoi permettre de raccourcir la durée du voyage vers Mars ou la Lune ?
En 1935, se basant sur l’équation de Schrödinger, fondamentale en mécanique quantique, le physicien hongrois Eugène Wigner (qui fut honoré d’un Nobel de physique en 1963) et son collègue américain Hillard Bell Huntington découvrent l’existence d’hydrogène métallique sous des conditions très particulières. Du moins théoriquement.
Selon leurs calculs, soumis à très basse température et à très haute pression, le gaz de dihydrogène (H2) doit se transformer en un cristal métallique conducteur. Depuis l’annonce de cette prédiction théorique, des physiciens du monde entier n’eurent de cesse de tenter de la démontrer par l’expérimentation.
Jusqu’à alors, les résultats obtenus ont tous été vivement remis en question, car non reproductibles par d’autres scientifiques. Mais il y a peu, des physiciens français seraient parvenus à observer de l’hydrogène métallique. Paul Loubeyre et Florent Occelli, du Commissariat à l’énergie atomique et aux énergies alternatives (CEA), et Paul Dumas, chercheur émérite du CNRS, ont partagé leur incroyable découverte dans la revue Nature. Rien n’aurait été possible sans le développement d’une expertise qui a conduit à atteindre une pression supérieure à quatre millions d’atmosphères ! A titre de comparaison, la pression au bord de mer est de une atmosphère, elle est de deux atmosphères à dix mètres de profondeur et de trois millions et demi d’atmosphères au centre de la Terre. Dans le laboratoire français, un minuscule échantillon d’hydrogène gazeux a été comprimé entre deux pointes de diamant. A mesure que la pression augmentait, les scientifiques ont observé des changements : le gaz isolant est passé à l’état solide à celui de semi-conducteur pour finalement devenir métallique et conducteur sous une pression démentielle de 4,2 millions d’atmosphères.
Mais à quoi cette première historique va-t-elle pouvoir servir ? Outre les avancées primordiales dans nos connaissances scientifiques qui en découleront, elle ouvre la porte à un potentiel de stockage énergétique hors norme. A condition du moins que les futures recherches révèlent que l’hydrogène rendu métallique est bien supraconducteur une fois revenu à température et à pression ambiantes. » Cela constituerait un progrès considérable pour le stockage de l’hydrogène, qui est un enjeu énergétique primordial. Si cette perspective apparaît encore aujourd’hui difficilement accessible pour l’hydrogène dans sa forme pure, une voie prometteuse est de le synthétiser sous forme d’alliage avec d’autres métaux. Les premiers résultats sur la synthèse de superhydrures, comme FeH5 ou LaH10, sont très encourageants « , explique le trio de chercheurs.
Du fait de sa densité, l’hydrogène métallique serait un carburant près de dix fois plus efficace que le meilleur connu actuellement. De quoi, par exemple, raccourcir drastiquement la durée d’un voyage vers Mars ou la Lune, ou limiter à un seul étage les fusées mettant les satellites en orbite.
Par Laetitia Theunis.
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