Tout quitter pour un tour du monde en voilier: « Le monde est un terrain de jeu extraordinaire ! »
C’est l’histoire d’un couple de trentenaires partis voguer autour du monde sur un voilier de onze mètres. Ils ont tout quitté pour toucher l’essentiel : le sel de la vie.
Jérôme et Caroline ont pris le large le 22 août 2019 pour un tour du monde d’est en ouest par l’Equateur. Il y a sept ans, ils ont quitté job, familles, amis et confort pour acheter un premier bateau et s’installer à Nieuport. Quelques traversées et un mariage en cours de mer, ils sont devenus complètement accros à ce mode de vie, ni d’ici, ni d’ailleurs. « Nous ne sommes pas des aventuriers mais on vit une aventure exceptionnelle ! Voyager autour du monde, c’est avant tout découvrir d’autres modes de vie, d’autres cultures, d’autres paysages. Ça permet de voir les choses sous un autre angle que celui sous lequel nous avons été élevés et comprendre comment d’autres civilisations fonctionnent. La remise en question est perpétuelle. Le monde est un terrain de jeu extraordinaire ! »
Ils n’ont plus ni voiture, ni TV, vivent sans eau chaude – en économisant l’eau froide – avec un sac de sport de vêtements chacun. Ils n’ont plus de domicile fixe, mais une adresse de référence et paient leurs taxes en Belgique. Cette transition s’est faite en douceur, pas à pas et ensemble. « Nous avons accepté de faire de grandes concessions au confort. Oser l’aventure, c’est réussir à se libérer de cette emprise de consommation excessive dont nous sommes tous victimes. » Sortir des rails est incontestablement, selon eux, la partie la plus compliquée du voyage.
Budget de 70 000 euros
La notion du temps disparaît, ne reste que l’ici et maintenant. Isolés dans leur bulle flottante, totalement coupés du monde des hommes, seuls face à eux-mêmes, dans le plaisir ou retranchés contre les limites de l’océan, tantôt rude, exigeant, violent – tantôt agréable, relaxant et enivrant. Recentrés et connectés à mère Nature : « Cet univers m’émerveille par la beauté et la force qu’il dégage. L’océan fait ressortir tout ce que nous avons au fond des tripes, sans tricher. Il nous révèle tel que nous sommes et développe la symbiose entre le corps et l’esprit. Voir une quarantaine de dauphins nager la nuit autour de l’étrave dans les reflets fluo du plancton illuminé par la lune, voir un requin baleine sonder à quelques mètres ou un baleineau aux côtés de sa mère, c’est bouleversant ! »
Le couple s’est fixé un budget total de 70 000 euros : 50 000 pour le bateau et environ 20 000 de matériel et frais divers pour le voyage. Et tenir avec 800 euros par mois pendant deux ans : environ 450 euros pour le bateau (assurance, gaz, carburant, réparations) et le reste en nourriture. Cerise sur le gâteau/ bateau, ils sont ambassadeurs de deux marques. Les Laboratoires de Biarritz leur fournissent des produits bio, respectueux des océans. Le programme météo belge Squid leur offre l’abonnement mondial. « Aucun extra n’est permis, nous restons par exemple presque toujours à l’ancre. » Le vrai problème, ce sont les dépenses imprévisibles, casse ou autre. « En partant des Canaries l’année dernière, nous avons heurté un objet qui a provoqué une voie d’eau. Nous n’étions qu’à 400 kilomètres des côtes, nous avons fait demi-tour et effectué des travaux pendant un mois. Ce genre de blague fait évidemment un gros trou dans le budget ! »
Se préparer ensemble
Leur maison est un voilier de course de 1994, de 11,40 mètres de long pour 3,70 mètres de large, pas vraiment conçu pour la croisière, plutôt pour la vitesse. A bord : un dessalinisateur pour avoir de l’eau potable en continu, dix voiles pour toujours avoir le gréement qui convient à la météo, panneau solaire et générateur pour produire de l’énergie. Pour la sécurité, une pharmacie très complète, un téléphone satellite, un assortiment de balises en tous genres pour la localisation en cas de problèmes, le radeau de survie, plusieurs PC pour la météo et la cartographie mondiales.
« Nous sommes également suivis par le CCMM Toulouse, un centre médical disponible 24heures sur 24. En cas de problème de santé au large, nous pouvons avoir une consultation par téléphone satellite et cibler quels médicaments prendre. Ils connaissent exactement le contenu de notre pharmacie, chaque médicament est numéroté pour en faciliter la prise en cas d’urgence. »
Trois points essentiels : la préparation technique du bateau, la formation navale de l’équipage et, bien que souvent négligé, l’apprentissage de la cohabitation dans un espace très restreint. « Plus qu’à terre, il faut savoir mettre beaucoup d’eau dans son vin et privilégier à fond la communication au sein du couple, un travail qui demande une attention au quotidien. Le secret de la réussite quand on projette une aventure de ce genre à deux ou en famille est de s’y préparer ensemble, de choisir le bateau et de se former ensemble. Et de rêver main dans la main. »
3 sur 100
Sur 100 bateaux candidats au tour du monde qui partent d’Europe, 90 arriveront aux Canaries et 70, aux Antilles. Moins de 10 rejoindront la Polynésie Française et 3 termineront un tour du monde.
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