Le S'Cool Bus : une sorte de long cuistax dans lequel huit enfants peuvent pédaler de concert. © DR

S’Cool Bus : aller à l’école en pédalant gaiement

Le Vif

Un chauffeur et huit sièges pour des écoliers. Le S’Cool Bus est un vélocipède collectif doté d’une assistance électrique. Embarqués devant leur maison, les enfants pédalent de concert pour rejoindre leur classe. De quoi réduire l’usage de la voiture, assainir l’air autour de l’école… et éduquer les petits à activer les gambettes.

Ça se passe en Normandie. Un coup de sonnette retentit à la porte d’une maison. Sourire aux lèvres, un gilet jaune sort promptement, cartable sur le dos. La pluie n’assombrit pas sa bonne humeur. Le casque vissé sur la tête, il se précipite pour prendre place à bord du S’Cool Bus, un cyclobus de ramassage scolaire muni d’un toit amovible transparent. Ses affaires sont rangées dans le coffre du véhicule. Destination l’école primaire ou l’un des centres sportifs locaux, le tout à la force des mollets. Le dispositif mêle la mobilité et la sécurité routière, la pratique du sport, la protection de l’environnement et le bien-vivre ensemble. Un éveil aux sens et à la conscience dont profitent aujourd’hui gracieusement plus de 400 enfants en Normandie.

 » Ça fait travailler les jambes « , lance Thomas, 10 ans, les pommettes revigorées et le sourire communicatif. Sur le S’Cool Bus, sorte de cuistax long de 4,15 mètres muni de cinq vitesses et d’une marche arrière, huit enfants peuvent pédaler de concert. Le trajet excède rarement cinq kilomètres et 40 minutes. Comme chaque pédalier est indépendant, les bambins moulinent chacun à leur rythme. A noter qu’une assistance électrique d’une autonomie de 30 kilomètres les aide dans les montées. Tout a été prévu pour rendre l’exercice aisé.

Alors que les petits découvrent avec joie l’utilité de leurs gambettes, leurs parents voient une épine de moins meurtrir leurs pieds d’hommes pressés et de femmes débordées. Leurs enfants rentrent chaque soir dans les pénates familiales, la tête pleine de nouveaux savoirs, sans qu’ils aient eu à se soucier de leur transport. Mieux encore, avec l’instauration du S’Cool Bus, l’expérience révèle que les enfants gagnent rapidement en autonomie et apprennent facilement à se préparer seuls le matin. Un sacré gain de temps.

Dans le S'Cool Bus, régulièrement, une chanson relative au code de la route, au développement durable et à l'esprit d'équipe donne le rythme du pédalier.
Dans le S’Cool Bus, régulièrement, une chanson relative au code de la route, au développement durable et à l’esprit d’équipe donne le rythme du pédalier.© dr

Sur la route

Les pieds sur les pédales, les langues se délient.  » On parle davantage avec les autres enfants en S’Cool Bus que lorsqu’on se rend à l’école à pied « , souligne Maëlys, 10 ans. A tout moment, une chanson relative au code de la route, au développement durable ou à la cohésion et à l’esprit d’équipe vient donner le rythme du pédalier. Chaque trajet se veut ludique. On rit et on chante en pédalant. Pour ce faire, les chauffeurs, engagés en CDI de vingt heures et renommés  » coolducteurs « , ont tous été formés durant deux semaines à la sécurité et à l’animation d’enfants.

Parmi eux, Cyrielle Piquiot.  » Les enfants sont contents de prendre le S’Cool Bus, s’enthousiasme-t-elle. On constate qu’ils sont généralement plus motivés à l’idée d’aller à l’école. La preuve ? Ils se lèvent bien plus facilement et se préparent à l’heure. Pour les parents, ce n’est que du bonus.  » Pour les enseignants également. Après le pédalage collectif du matin, les écoliers seraient davantage réceptifs aux leçons.

Depuis le début de l’expérience normande, en 2016, aucun incident de la route n’est à déplorer. La cohabitation avec les automobilistes est bonne, ces derniers usant de courtoisie avec le vélobus scolaire.  » Quand les voitures nous laissent passer, on leur fait des petits pouces pour leur dire merci « , sourit Eve, 6 ans. A noter que la largeur de 1,2 mètres du S’Cool Bus lui permet également d’emprunter les pistes cyclables.

La lutte contre le changement climatique est au coeur du projet, en incitant les parents à renoncer à leur manie de conduire en voiture leur enfant à l’école pourtant si proche. Durant l’année scolaire 2017-2018, les 1 056 tournées de ramassage scolaire organisées en S’Cool Bus à Louviers ont enregistré 4 584 kilomètres au compteur des pédaliers. Elles ont ainsi empêché le rejet de 7,8 tonnes de CO2 dans l’atmosphère.

Dans le S'Cool Bus, régulièrement, une chanson relative au code de la route, au développement durable et à l'esprit d'équipe donne le rythme du pédalier.
Dans le S’Cool Bus, régulièrement, une chanson relative au code de la route, au développement durable et à l’esprit d’équipe donne le rythme du pédalier.© dr

Transport gratuit

Ce nouveau mode de transport scolaire a été imaginé en 2014 par Nicolas Catarino et Vincent Guezou, deux étudiants français, au retour d’un voyage aux Pays-Bas. Après deux années d’expérimentation avec la complicité de deux écoles primaires de Louviers, le S’Cool Bus a étendu son activité. Au début 2019, pas moins de sept lignes normandes supplémentaires ont été ouvertes : trois à Val-de-Reuil, une à Pont-de-l’Arche, aux Damps, au Vaudreuil et au Manoir-sur-Seine. Le succès est tel qu' » on tourne toutes les quatre semaines pour permettre à un maximum d’enfants de bénéficier du S’Cool Bus « , relève Cyrielle Piquiot.

Pour les enfants normands et leurs parents, le S’Cool Bus est gratuit. Son coût – 225 000 euros annuels – est intégralement supporté par la collectivité.  » La somme est importante, mais c’est un investissement à long terme qui nous rend optimistes sur la vision pour la transition énergétique et la santé des générations futures « , explique Bernard Leroy, maire du Vaudreuil et président de l’Agglo Seine Eure. Lauréate d’un appel à projets concernant la mobilité douce lancé par l’Etat français, cette dernière finance la mise sur pied du S’Cool Bus sur son territoire.

La Belgique n’est pas insensible à la success story normande. Début 2019, Pascal Smet (SP.A), le ministre bruxellois sortant de la Mobilité, interrogé au parlement bruxellois sur les initiatives de mobilité douce pour les enfants, révélait que  » la commune de Berchem-Sainte-Agathe analyse actuellement la possibilité de mettre en place un système de S’Cool Bus « . Si ce projet devait réellement éclore, il pourrait être mis sur pied pour la rentrée scolaire de septembre 2020.

La ville de Wavre se montre également intéressée. En mars dernier s’est tenu le hackathon de Citizens of Wallonia. Des développeurs ont uni leurs forces pour faire naître des projets d’innovation numérique. Le grand gagnant de l’édition 2019 est Octobus. Ce projet de start-up de ramassage scolaire via un vélo collectif à assistance électrique a été proposé par le service informatique de la Ville de Wavre. Une application pour smartphone permettra de gérer le suivi des inscriptions des passagers. Nouveauté par rapport au S’Cool Bus : un système de gamification incitera les parents et, surtout, les enfants à utiliser davantage le système. Voilà qui devrait favoriser la mobilité douce en milieu urbain. Du moins si la start-up voit le jour.

Par Laetitia Theunis.

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