Damien Ernst: « J’offre ce qui me coûte le plus, du temps »
Damien Ernst, 43 ans, professeur à l’ULiège, spécialiste de l’énergie et de l’IA. Lauréat 2018 de la médaille Blondel, prestigieuse distinction internationale dans le domaine de l’ingénierie électrique.
Qu’est-ce qu’un beau geste ?
Pour moi, c’est aider » l’autre » au point de s’oublier soi-même ; souvent, et c’est malheureux, les gens attendent toujours quelque chose en retour d’une belle action qu’ils posent. Par conséquent, le beau geste est finalement assez rare.
Qu’avez-vous récemment fait pour vous-même ?
J’ai allégé mon agenda en sacrifiant de l’opérationnel et du day-to-day pour renouer avec mes fondamentaux, comme la recherche pure. Mais pour cela, j’ai dû apprendre à dire non et à refuser certaines obligations.
Et pour votre entourage, privé ou professionnel ?
Je crois avoir une grande capacité d’empathie et lorsque je vois certains de mes étudiants qui se retrouvent dans des situations injustes, je fais tout pour les aider.
Et pour la société ?
Je ne suis pas engagé dans des causes car je pense que le geste le plus utile que je puisse poser, c’est à travers mon métier que je le fais. La recherche, c’est quand même pour le bien de l’humanité qu’on la poursuit : c’est ma passion. La transition énergétique est véritablement l’une des thématiques clés pour la société… Dès lors, on me voit beaucoup dans les médias. Je parle aux politiques aussi, alors que sur le fond, je déteste la polémique. Mais quand j’entends que l’on raconte des conneries et que cela pourrait mener à de mauvaises décisions, je pète une case et je n’arrive pas à me taire.
Quel beau geste avez-vous posé pour des gens qui ne vous aiment pas ou que vous n’aimez pas ?
J’essaie toujours de me mettre à la place de l’autre même quand il veut me tacler. Sur Facebook par exemple, certains sont très violents à mon égard et pourtant, moi, je continue à liker leurs posts. Sinon, plus sérieusement, comme manager d’équipe, il peut m’arriver de devoir me séparer d’une personne ou au contraire d’essayer de la faire rester. Dans toutes ces situations, j’essaie de toujours faire les choses avec classe, en aidant aussi la personne qui s’en va.
Qu’avez-vous lu, vu ou entendu récemment qui vous réconcilie avec la nature humaine ?
Le contact avec la nature. Chaque jour, je me rends au travail à pied et je traverse un petit bois ; rien ne m’émeut plus que de voir la splendeur de la nature matin et soir. Je suis toujours très touché aussi de lire ou d’entendre des choses » dans un beau français » car, en écriture, je serais plutôt du style » ingénieur « .
Quel acte avez-vous posé dans votre vie et dont vous êtes le plus fier ?
J’avais un étudiant d’origine maghrébine qui risquait d’arrêter complètement son cursus. Il était en détresse et n’arrivait plus à s’en sortir. J’ai donc mis toute une structure en place autour de lui pour qu’il reprenne pied et réussisse son année. Ce qu’il a fait. Ce qui est beau, c’est que je lui ai tendu la main mais, surtout, qu’il la prise.
Quel acte a-t-on posé à votre égard et qui a changé votre vie ?
Lorsque j’avais 20 ans et que je me destinais à la physique, Mania Pavella, une professeure à l’unif, m’a conseillé de me tourner vers la recherche dans le domaine des réseaux électriques. Elle m’a offert un poste de recherche et cela a changé ma vie.
Qui sont les personnes qui vous inspirent ?
Mania Pavella, l’ancien recteur de l’ULG Willy Legros pour l’échange et les discussions que nous avons eues, et le journaliste Michel Henrion, qui m’a aidé à faire passer mon message dans les médias.
Quelle est la dernière chose que vous avez donnée ?
Je pense qu’on offre ce qu’on a envie de recevoir. Du coup, comme je ne suis pas du tout matérialiste, je n’offre jamais de cadeau : j’offre ce qui me coûte le plus, du temps.
Selon vous, le monde irait mieux si …
La rationalité prenait le pas sur l’émotionnel.
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