Bientôt de nouvelles aurores boréales dans le ciel belge? Tout savoir sur ces phénomènes lumineux en 5 questions
Ce week-end, des aurores boréales ont embrasé les cieux européens et nord-américains. Un phénomène exceptionnel à de si basses latitudes, causé par des éruptions solaires particulièrement intenses.
Des traînées lumineuses vertes, rosées voire violettes. Le ciel belge a pris des allures scandinaves dans la nuit de vendredi à samedi, avec des aurores boréales d’une rare intensité. Comment expliquer ce phénomène? En quoi est-il si exceptionnel? Ce spectacle nocturne peut-il se répéter dans les mois à venir? Le Vif fait le point en cinq questions.
1. Comment se produisent les aurores boréales?
Les aurores polaires (boréales si observables dans l’hémisphère nord, australes dans l’hémisphère sud) apparaissent suite à la collision entre des particules très énergétiques provenant du Soleil et les molécules de gaz de l’atmosphère. «Le Soleil éjecte en permanence de la matière ionisée (protons, électrons) qu’on appelle le vent solaire», explique Yaël Nazé, astrophysicienne au FNRS et à l’ULiège. Lorsque ce vent solaire se dirige vers la Terre, il va se heurter au champ magnétique terrestre, qui sert de «bouclier» protégeant la planète. En suivant le champ magnétique, les particules ionisées accélèrent et viennent buter contre les molécules de notre atmosphère. Cette collision excite la matière atmosphérique, qui retourne à son état de départ en relâchant de l’énergie sous forme de lumière. «La couleur de la lumière va dépendre du composé atmosphérique qui est impacté : plutôt verdâtre ou rougeâtre pour l’oxygène, et violette pour l’azote», précise Yaël Nazé.
2. Pourquoi est-ce si rare d’observer des aurores boréales en Belgique?
Habituellement, la matière ionisée en provenance du Soleil, lorsqu’elle atteint la Terre, va plutôt se rediriger vers les pôles, car c’est là que le «bouclier magnétique» est le plus faible. D’où la fréquence plus importante des aurores boréales en Scandinavie ou en Islande. Pour que ces phénomènes soient observables à de latitudes plus basses, il faut que le vent solaire soit particulièrement dense et rapide, capable d’entraîner des perturbations géomagnétiques importantes. Dans le cas présent, la tempête géomagnétique a été catégorisée au niveau 5, soit le plus haut niveau d’intensité, entraînant des aurores boréales visibles jusqu’aux îles Canaries (sud de l’Espagne) ou en Floride. «Ce spectacle est le résultat d’un concours de circonstances exceptionnel», résume Yaël Nazé, qui précise que le dernier phénomène de ce type, surnommé la «tempête solaire d’Halloween» remonte à fin octobre 2003, soit il y a plus de vingt ans.
«La couleur de la lumière va dépendre du composé atmosphérique qui est impacté : plutôt verdâtre ou rougeâtre pour l’oxygène, et violette pour l’azote»
Yaël Nazé
Astrophysicienne au FNRS – ULiège
3. Ces tempêtes géomagnétiques peuvent-elles causer des dégâts?
«Une énorme bulle de matière ionisée qui débarque à toute vitesse sur le champ magnétique terrestre, cela n’est évidemment pas sans conséquences, indique Yaël Nazé. Cela peut entraîner des courants induits sur les lignes électriques, et en cas de forte intensité, endommager les installations technologiques et de communication.» Les satellites internet Starlink ont notamment été perturbés, a indiqué la firme SpaceX d’Elon Musk lundi. Lors de la «tempête d’Halloween», des coupures de courant étaient également survenues en Suède et des transformateurs avaient été endommagés en Afrique du Sud. «Les dégâts les plus importants ont été recensés en 1859, lors de l’événement de Carrington», indique Yaël Nazé. Une série d’éruptions solaires avaient alors fortement perturbé les télécommunications par télégraphe et entraîné des aurores polaires visibles jusque dans certaines régions tropicales.
4. De nouvelles aurores boréales peuvent-elles encore se produire prochainement en Belgique?
Le pic du cycle solaire (d’une durée de onze ans) n’étant pas encore terminé, il n’est pas exclu d’en observer dans les mois à venir, à l’été ou à l’automne. Mais elles sont très difficiles à anticiper avec précision. «Ce sont des phénomènes plutôt instables et chaotiques, dépendant des conditions du vent solaire et de l’état de l’environnement géomagnétique terrestre, indique Benoît Hubert, chercheur qualifié du FNRS en astrophysique à l’ULiège. On peut reconnaître les conditions propices à la formation d’aurores polaires à basse altitude, mais pas les prédire avec exactitude.» Des satellites plus performants permettent aujourd’hui de détecter les éruptions solaires une fois qu’elles se dirigent vers la Terre, et d’en mesurer les propriétés. «A partir de ce moment-là, on bénéficie de deux ou trois jours (NDLR : en fonction de la vitesse du vent solaire) pour évaluer ce qu’il va se passer dans notre ciel. Mais de là à les prévoir des mois à l’avance, il y a un pas», confirme Yaël Nazé.
5. Quelles sont les conditions idéales pour observer les aurores boréales?
Pour avoir la chance de les distinguer, il faut un ciel clair, sans trop de nuages. L’horizon nord doit également être bien dégagé. Enfin, une faible pollution lumineuse aide à l’observation. «Si vous êtes en ville, entouré de lampadaires et avec de grands buildings à l’horizon nord, ce n’est pas l’idéal, résume Yaël Nazé. A la campagne, il y a bien plus de chances de profiter de ce spectacle lumineux. Mais entre un village en Ardenne ou en Campine, les conditions d’observation ne présenteront pas de grandes différences.»
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