Un embargo pétrolier limité à la mer toucherait déjà 89% du brut russe exporté vers l’UE
Même avec un embargo pétrolier « dilué », ne concernant que l’importation par tanker, l’UE diminuerait très fortement le flux de pétrole russe entrant sur son territoire, indiquait-on lundi en marge des discussions qui se poursuivent au niveau des 27.
En interdisant l’importation de pétrole brut russe acheminé par la mer et en tenant compte de la volonté politique allemande et polonaise de se défaire aussi du brut qui leur parvient via le pipeline Droujba d’ici la fin de l’année, l’embargo toucherait déjà « 89% du brut russe importé dans l’UE ».
Les 11% restants correspondent à la branche sud de cet oléoduc (branche qui alimente Hongrie, Slovaquie et Tchéquie), qui continuerait quant à elle à acheminer du pétrole (temporairement), indique un responsable de la Commission, en marge du sommet extraordinaire des dirigeants des 27 à Bruxelles.
Belgique et Pays-Bas, entre autres, se sont inquiétés lundi matin d’un déséquilibre de concurrence si certains pays continuent à importer du pétrole russe par oléoduc (meilleur marché), tandis que d’autres doivent faire l’effort de diversifier leur approvisionnement. Selon la dernière proposition sur la table, poussée par la Commission et par la présidence française du Conseil de l’UE, une limite serait introduite pour préserver des conditions de jeu équitables à l’intérieur du marché unique. Après une certaine période, les pays bénéficiant du pétrole acheminé par Droujba ne pourraient plus ré-exporter de brut ou de produits pétroliers raffinés. Ces pays ne pourraient donc pas exporter de diesel produit à partir de pétrole russe vers le reste de l’UE, par exemple. « Si on autorise une période de dérogation trop longue, cela perturberait le marché », confirme une source.
Une sorte de garantie de solidarité est aussi sur la table. « Si quelque chose arrivait au pipeline Droujba, vu que c’est en terrain de guerre (il traverse l’Ukraine), les autres États membres fourniraient du pétrole », indique-t-elle.
Avant le début du sommet, en fin d’après-midi, le Premier ministre slovaque s’est entretenu en bilatérale avec son homologue hongrois Viktor Orbán, critique le plus virulent des propositions d’embargo pétrolier faites par la Commission. Relayant cet entretien sur Twitter, Eduard Heger affirme avoir rappelé à son homologue que « l’unité reste cruciale », et que les revenus du pétrole « financent l’agression russe en Ukraine ». « Avec l’aide de RePowerEU, nous nous déferons de cette dépendance » aux énergies fossiles russes, ajoute le Slovaque, dont le pays est dans la même situation d’enclavement que la Hongrie.
La piste des financements supplémentaires apportés par le paquet RePowerEU (20 milliards de nouveaux fonds issus de la vente de quotas d’émission de gaz à effet de serre), spécifiquement pour accélérer la transition énergétique et adapter l’infrastructure à une diversification de l’approvisionnement, reste cependant entourée de nombreux points d’interrogation dans le cas de la Hongrie. Ces fonds passeraient par un chapitre supplémentaire à ajouter à chaque plan national « de reprise et de résilience ». Mais le plan de la Hongrie, rattaché à une enveloppe de plusieurs milliards européens pour la relance post-Covid, n’a toujours pas été validé par la Commission, faute de garantie sur le respect de l’État de droit.
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