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Errances
C’est l’un des axes forts qui sous-tend la galerie Bruno Matthys: mettre en place des correspondances, faire dialoguer des artistes entre eux, avec cette certitude que les créateurs ont toujours davantage en commun que ce qu’ils imaginent. On ne peut qu’applaudir cette initiative de forcer le destin communicationnel à l’heure où tant de plasticiens se regardent en chiens de faïence, campent sur leur quant-à-soi. Sous le bel intitulé Errances, les visions de trois talents convergent sous la forme d’un duo – Ghyslaine et Sylvain Staëlens – et d’une pratique solitaire – Jérôme Delépine. Si l’ on en croit Bruno Matthys, l’idée de création comme «chemin vers la lumière» assure le fil rouge entre les premiers et le second.
Ghyslaine et Sylvain Staëlens ont fui Paris, ville dont les cadences infernales agencent de néfastes addictions permettant de tenir le coup, pour se réfugier dans un hameau isolé du Cantal. Là, ils se sont inventé «créateurs de figures tantôt zoomorphes, tantôt anthropomorphes». Les totems en question surgissent au bout d’assemblages aux contours archétypaux, ils évoquent tant la figure de la momie que celle du chaman. Toutes sortes de matériaux naturels font farine au moulin de leur esthétique intranquille: lichens, pierres, bois. La confrontation avec la clarté qui imprègne l’œuvre de Jérôme Delépine est, quant à elle, littérale. Quasi aveugle en raison d’une maladie congénitale, celui qui s’est formé à la peinture depuis ses 11 ans utilise son art comme marchepied vers la vision pure «plutôt que vers l’acuité». Le tout pour des toiles, mais également des dessins et des monotypes, figurant des cieux tourmentés par des clairs-obscurs. Ombre est lumière, c’est sûr.
Galerie Bruno Matthys, à Bruxelles, jusqu’au 1er octobre.
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