Guillaume Gautier
Le stade Roi Baudouin est devenu l’ennemi des Diables
Pour se rapprocher de leur public, les Diables vont se lancer dans un «Tour de Belgique», quittant ainsi, à l’occasion, la froideur du stade national.
Il y a cette piste d’athlétisme, insurmontable obstacle entre la pelouse et les gradins. Elle provoque un éloignement difficile à combler, et empêche tant la chaleur des chants de réchauffer les cœurs des joueurs que les exploits techniques d’enflammer les tribunes. Il faudrait presque acheter des jumelles pour savourer parfaitement les coups de rein de Jérémy Doku ou les coups d’œil de Kevin De Bruyne. Le problème est que tout le budget est déjà passé dans l’achat d’un billet souvent acquis à prix d’or pour être dans l’enceinte, mais même pas aux premières loges.
Le stade Roi Baudouin n’est pas le meilleur allié des Diables Rouges et de leurs fans. Tout le monde du football en est conscient, mais les pistes d’une nouvelle enceinte nationale n’ont jamais abouti, même quand la génération dorée avait placé la Belgique dans les hautes sphères de la hiérarchie mondiale. Là, les places au Heysel s’arrachaient. Même hors de prix. Même contre Saint-Marin ou le Kazakhstan. Quand les stars sont devenues plus rares ou plus capricieuses, les gradins ont en revanche semblé bien trop grands. Contre l’Estonie et l’Azerbaïdjan, adversaires de la campagne de qualifications pour l’Euro 2024, les chiffres de fréquentation ont fait faire la moue à la Fédération, qui espérait une affluence bien plus étoffée pour regarnir ses comptes.
Le constat des dirigeants est aujourd’hui sans appel: depuis l’Euro, précisément la rencontre face à l’Ukraine conclue par un 0-0 sans gloire pour atteindre le tour suivant, l’écart entre les Diables et leur public est devenu un fossé. Pour le combler, il faut probablement se rapprocher. Indéniablement, le stade Roi Baudouin n’est pas fait pour ça.
Fermée et donc bruyante quand tout le public joue avec l’acoustique, la Cegeka Arena de Genk accueillera le premier match de l’ère Rudi Garcia. C’est la première escale d’une campagne nommée «Tour de Belgique» par la Fédération pour atteindre les objectifs sportifs et dans un but de «reconquête des cœurs des supporters de football belges», précise même la RBFA dans un communiqué. Le tout soutenu par des déclarations de Romelu Lukaku, voix forte du vestiaire et meilleur buteur de l’histoire du pays, à grands coups de «comme nos supporters, nous sommes issus de tous les coins de la Belgique», «nous sommes ravis d’aller à leur rencontre», ou encore «ils nous donneront indéniablement ce boost supplémentaire pour réaliser de bonnes performances».
Si les bons résultats de l’année 2023 avaient relancé une certaine forme d’euphorie et mis au placard les cauchemars de 2022, l’Euro a rappelé que l’écart entre le vestiaire des Diables et les gradins du stade Roi Baudouin est devenu aussi grand sur le plan symbolique que sur le plan purement métrique. On les dit plus éloignés de leurs supporters, trop vissés à leur portable ou cachés des cris par leurs écouteurs.
Pour que les Diables puissent casser à nouveau cette image d’enfants gâtés, il faut des victoires mais surtout de la proximité. En sortant de Bruxelles, le rapprochement ne sera pas seulement kilométrique sur les routes, mais surtout palpable depuis les premiers rangs des gradins.
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