Le lézard et l’algorithme : comment l’Union est devenue un ténor
Huitième de finaliste de l’Europa League et candidate au titre, l’Union concocte son succès entre Saint-Gilles et Londres. Secrets d’une fable en jaune et bleu.
La bravade est devenue célèbre. Tout juste auréolé d’un troisième titre de champion de rang, Bart Verhaeghe envoie le bouchon de champagne en pleine face du rival saint-gillois, valeureux outsider et belle histoire de la saison : « On ne s’est pas battu contre l’Union, mais contre Brighton. » Contestée par les décideurs du Parc Duden, la formule est certes un raccourci (le propriétaire de Brighton est également celui de l’Union, via une autre société), mais incite à franchir la Manche pour remonter aux racines du succès unioniste. Sans faire escale à Brighton, ville balnéaire dont les occupants du ciel ont valu au club local le surnom de Seagulls (mouettes, en VF), mais en grimpant immédiatement jusqu’à Londres. À deux pas du fameux Camden Market, prisé par les touristes désireux de se remplir les yeux et l’estomac, les rives sinueuses du canal du Régent couvent un imposant bâtiment qui héberge les bureaux de Starlizard.
Fondée par Tony Bloom, le propriétaire de Brighton et de l’Union surnommé Lizard (« le lézard ») lors de son passé dans le poker, la société propose non seulement un accompagnement de pointe pour les parieurs compulsifs, mais développe également des algorithmes qui l’aident à maîtriser les caprices du football. Ceux qui tentent de se faire une place dans les locaux doivent par exemple, en guise d’entretien d’embauche, évaluer sur dix chacun des joueurs d’un club espagnol ou développer une théorie sur les causes majeures qui influencent le résultat d’un match. Les plus précis entrent ensuite dans un temple du football mathématisé, un lieu où Paul Barber, CEO de Brighton, explique à l’Independant qu’on trouve « une façon particulière d’interroger les datas. » Impossible d’en savoir plus, tant les secrets gardés par Starlizard valent aujourd’hui des millions. Il se dit simplement que le système des expected goals (évaluation de la qualité de chaque occasion de but) désormais démocratisé dans le milieu du ballon rond était déjà utilisé avec assiduité par l’entreprise avant même d’être cité pour la première fois dans les médias spécialisés. Et qu’aujourd’hui encore, Starlizard conserverait une petite décennie d’avance dans le domaine de la statistique avancée.
L’Union et Brighton
Dans les bureaux saint-gillois, la connexion avec Brighton est à la fois marquée et distante. L’Union reçoit les listes de joueurs proposées par les algorithmes anglais, mais y fait ses choix librement. C’est ainsi que pour succéder à Luka Elsner, les Jaune et Bleu étaient allés chercher Thomas Christiansen grâce au football qu’il prônait à Chypre et qui l’avait placé dans la short-list statistique. Être issu d’un petit championnat n’était pas un problème, comme l’ont prouvé les recrutements de Deniz Undav ou Christian Burgess. Une fois couplée à l’importante connaissance du milieu belge via des joueurs ou des coaches issus du sérail national, la mayonnaise concoctée par le président Alex Muzio et le garant du projet sportif Chris O’Loughlin a fait décoller les résultats, rendant sa recette aussi prisée que celle du Coca-Cola. Les ingrédients sont pourtant connus : des joueurs revanchards, des chiffres et un lézard. Comme souvent, c’est surtout l’assaisonnement qui fait la différence.
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