
Simon Mignolet, le jour où Bruges a changé de dimension
À l’aube d’un Topper toujours déséquilibré ces dernières années, retour sur le transfert retentissant et les chiffres hors-normes de Big Si, l’homme qui a permis à Bruges de dépasser les frontières de ses ambitions.
L’important, pour installer une dynastie, c’est de bien choisir ses rois. Voilà sans doute le raisonnement mené par Bart Verhaeghe et Vincent Mannaert, contrariés dans leur nouvelle hégémonie nationale par le Genk de Philippe Clement au printemps 2019. S’ils décident d’attirer l’ancien Diable rouge dans la Venise du Nord pour succéder à Ivan Leko, les dirigeants du Club retiennent également un grief adressé de longue date par le Croate et son staff. Pour amenuiser les chances de mauvaise surprise dans la grande domination bleue et noire, l’idéal est de pouvoir compter sur un gardien qui gagne des points.
Si Bruges préparait patiemment Ethan Horvath pour devenir le véritable successeur de Mathew Ryan, après l’intérim réussi – et d’ailleurs couronné par un titre – de Ludovic Butelle, le stress presque maladif de l’Américain contrarie les plans brugeois. Monstrueux à l’entraînement, au point d’être le gardien que tous les joueurs veulent avoir pour protéger leurs filets dans les jeux réduits, Horvath perd souvent ses moyens en match, et donc des points pour son équipe. La rotation commence, et enclenche un carrousel infernal qui donne des sueurs froides dans la course au titre. Guillaume Hubert, Kenneth Vermeer et même le vétéran russe Vladimir Gabulov se succèdent entre les perches des Blauw en Zwart. L’été suivant, Bruges croit résoudre le problème en optant pour le prometteur Karlo Letica (préféré par les décideurs brugeois à Andriy Lunin, aujourd’hui deuxième gardien du Real). Le Croate multiplie les bourdes, cède finalement sa place à un Horvath plus serein mais toujours pas infaillible, et l’incertitude coûte à Bruges des points précieux, peut-être décisifs dans l’interminable sprint mené de front avec Genk.
Le mois d’août 2019 doit donc voir un nouvel homme s’installer à la garde des perches du stade Jan Breydel. C’est là que Bruges frappe un grand coup. Symboliquement, sans doute encore plus fort que le transfert en 2015 d’Hans Vanaken, alors convoité par toutes les grosses écuries du pays. Encore assis sur le banc des Reds quelques jours plus tôt lors du Community Shield disputé face à Manchester City, Simon Mignolet signe un contrat de cinq saisons avec les Blauw en Zwart. Le coup médiatique est retentissant, la plus-value sportive gigantesque. En trois saisons passées en Venise du Nord, Big Si est sacré champion de Belgique à trois reprises, et facture à l’heure actuelle 63 clean-sheets en 156 apparitions. Avec Mignolet, Bruges devient invincible.
Surtout, le dernier rempart permet de franchir un palier sur la scène européenne. Le Club tient tête au PSG, au Real Madrid ou à l’Atlético, souvent grâce aux miracles réalisés par son gardien. Cette année, après avoir été le grand artisan du titre grâce à des play-offs sensationnels (4,37 prevented goals, soit un peu plus de quatre buts « arrêtés » selon les post shot expected goals qui évaluent la qualité des frappes adverses), la doublure de Thibaut Courtois chez les Diables a haussé le niveau sur la scène continentale. De quoi écrire au tableau une histoire bien différente de celle qui se déroule sur le terrain.
En quatre sorties européennes, Bruges s’est créé 4,17 expected goals et en a concédés 6,74. Pourtant, le Club a marqué à sept reprises et n’a pas encore vu ses filets trembler. En grande partie grâce aux 5,11 prevented goals enregistrés par les statistiques avancées d’un Simon Mignolet d’exception. Dans ce registre, le Belge est tout simplement le meilleur gardien des quatre premières journées de Ligue des Champions, avec une avance considérable sur la concurrence. Une valeur sûre qui permet à ses couleurs de changer de dimension.
Alors que se profile à l’horizon un Topper qu’il n’a perdu qu’une fois en onze confrontations depuis son retour en Belgique, Simon Mignolet est sur la voie d’un Soulier d’or qui lui semble promis. Dans l’histoire du mercato brugeois, le 4 août 2019 restera un moment-charnière. Le jour où le Club a montré à tout le reste du pays que ses ambitions dépassaient largement les frontières. Trois ans plus tard, l’ambition continentale est enfin accomplie. Dans les tribunes du Jan Breydel, on n’entend plus jamais le nom de Mathew Ryan.
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