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Roland Duchâtelet, quatre ans après l’Opération Mains Propres: «Le match-fixing est moins grave qu’avant»

Bart Aerts

L’Opération « Mains propres » a-t-elle vraiment changé quelque chose dans le monde ? Nous avons interrogé quelques personnalités à ce sujet. Aujourd’hui : Roland Duchâtelet, ex-président du STVV et du Standard et ex-propriétaire de plusieurs clubs de football étrangers.

«La corruption est présente sous différentes formes en Belgique. Je pense que le match-fixing est moins grave qu’avant, grâce à l’Opération Mains Propres mais aussi, selon moi, grâce au fait que beaucoup plus de clubs belges sont en mains étrangères. Le football belge n’est plus un petit club privé réunissant quelques dirigeants.

« Selon moi, on continue à acheter des dirigeants de clubs pour qu’ils engagent des joueurs. » Roland Duchâtelet

J’avais été frappé par le fait qu’à Charlton, en Premier League et dans le football anglais en général, il y avait nettement moins de matches arrangés. C’est aussi le cas en Primera División. Une question se pose donc: y a-t-il une relation entre l’actionnariat des clubs et l’achat de matches? Le paysage est devenu beaucoup plus international en Jupiler Pro League. Je ne peux pas imaginer que les Japonais du STVV aillent discuter avec des Arabes pour arranger un match. C’est une évolution. Ça peut être un sujet de thèse intéressant pour un étudiant en sciences du sport (il rit).

Il y a un autre type de corruption, qui consiste à acheter des dirigeants de club pour qu’ils engagent des joueurs. Ça se passe aussi en Angleterre et ça reste très présent dans notre football, selon moi.

Il y a encore la fraude fiscale. On essaie de contourner la fiscalité normale en payant autrement une partie du salaire d’un entraîneur ou d’un footballeur. On peut y parvenir en mettant en place certaines constructions ou en payant carrément en noir, comme ça a été apparemment le cas de certains entraîneurs. Je ne pense pas que cette sorte de fraude existe encore dans le football belge, contrairement au secteur de l’horeca, où beaucoup d’affaires continuent à travailler à moitié au noir, alors que la caisse blanche est obligatoire depuis 2016. Mais donc, cette pratique a disparu du football professionnel.

Les gens ont réalisé qu’ils pouvaient être condamnés et que certains l’étaient, de fait. Ça a eu un sérieux impact sur leur comportement.

Par exemple, depuis l’Opération Mains Propres, on remarque des progrès au niveau des managers. Une série d’entre eux se sont clairement distancés des pratiques frauduleuses. Ils ont du succès auprès des parents raisonnables et bien élevés de jeunes talents qui réfléchissent à long terme. Cette évolution va dans le bon sens.

D’autre part, aucun jugement n’est encore tombé dans l’affaire du Standard pendant la saison 2013-2014 (Roland Duchâtelet a des preuves qu’il y a eu match-fixing pendant les play-offs, ce qui a privé le Standard du titre, ndlr). Je déplore que ça n’avance pas. La Fédération pointe le tribunal du doigt. Elle n’a donc pas examiné l’affaire, décidant tout simplement que c’était à la justice d’intervenir.

Est-ce que je veux obtenir gain de cause? L’essentiel est qu’on enquête sur ce qu’il s’est passé et qu’on condamne sévèrement les coupables. Si l’affaire n’est pas étudiée avec conséquence et qu’on laisse les choses suivre leur cours, on aura investi énormément d’argent dans la justice sans rien obtenir. C’est bien mal employer l’argent du contribuable. La justice doit poursuivre son travail, car beaucoup de gens ayant commis des actes délictueux sont toujours en liberté, sans la moindre sanction.

Prenez l’affaire Ye. Le procès a été très long, quelques personnes ont été condamnées, mais ça n’a pas eu un impact suffisant et les gens ont repris leurs petites affaires comme si de rien n’était. Le problème n’a pas vraiment disparu.

En résumé, le chemin est encore long.»

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