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RDC – Maroc : « Si on se qualifie c’est la fête nationale pour tout le peuple congolais »

Ce mardi soir à 21h30, la rencontre entre la RDC et le Maroc animera une nouvelle fois la capitale bruxelloise. Bis repetita mais à Casablanca pour connaître le dénouement final de cet affrontement pour les qualifications de la Coupe du monde 2022. Nous avons suivi la première rencontre auprès de fervents supporters des Léopards qui rêvent d’une nouvelle participation 48 ans plus tard. Récit d’un match vécu au quartier Matonge à Bruxelles.

Vendredi 15h. Un match de football retient l’attention dans différents quartiers de la capitale belge. Dans moins d’une heure, la première des deux confrontations entre la République Démocratique du Congo et le Maroc pour les qualifications de la Coupe du monde 2022 débutera de l’autre côté du globe à Kinshasa. Une confrontation que certains ont déjà renommé le Bruxellico, appellation ressemblante à celle de Clasico, car ces deux nations sont bien représentées à Bruxelles. A Matonge, quartier fréquenté par les Congolais, le bleu est de mise pour soutenir les Léopards.

Dès mon arrivée en bus à l’arrêt Porte de Namur, je rencontre Zola, habillé aux couleurs des Léopards, qui se rend dans un bar pour voir le match avec ses amis. Il m’invite à le joindre pour voir le match avec lui. Une fois arrivés au bar, de nombreux supporters sont déjà là pour supporter l’équipe nationale de la RDC. Pour Zola et les personnes présentes, ce match a un enjeu très important car ils n’ont plus participé à une Coupe du monde depuis 48 ans. Leur dernière participation remonte à la Coupe du monde 1974 en Allemagne de l’Ouest. A l’époque, le pays se nommait encore Zaïre. « C’est un match très important pour tout le pays » me dit Zola. « Si on se qualifie c’est la fête nationale pour tout le peuple congolais. Ce serait historique pour nous. »

Le calme avant la joie

Alors que nous prenons place avec Zola, le gérant du restaurant, transformé en bar festif pour l’occasion, se démène pour amener de nouvelles chaises. Il ne s’attendait pas à ce qu’il y ait autant de monde. Le match s’apprête à commencer mais avant, c’est le traditionnel passage des hymnes nationaux. Debout Congolais est repris en coeur par l’ensemble des personnes présentes dans le bar et se conclut par une salve d’applaudissements.

La rencontre débute bien pour les joueurs congolais qui ne sont pas inquiétés par l’adversaire du jour. Autour de moi, les personnes discutent en lingala, une langue principalement parlée en RDC mais aussi dans d’autres pays africains. Difficile de comprendre mais les émotions sont perceptibles. Rires et applaudissements viennent soulager les nombreuses personnes stressées par l’enjeu de la rencontre.

La première occasion dangereuse est venue des pieds des Congolais, un centre en retrait a failli inquiéter la défense marocaine mais personne n’était là pour reprendre la balle. Deux minutes plus tard, l’attaquant Yoane Wissa ouvre son pied à l’entrée du grand rectangle. La balle est déviée et finit au fond. La RDC ouvre le score pour le plus grand bonheur des personnes le bar. Téléphones en main pour filmer, ils fêtent ce but de la plus belle des manières en sautant de joie et en se serrant dans les bras.

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Chansons improvisées

Après le but marqué, la pression est redescendue et les supporters vêtus du bleu des Léopards ont un sourire non-dissimulé sur leur visage. Le bar s’est transformé en salle de fête où les acclamations et les chants improvisés ont pris place. « Dès qu’il y a de l’ambiance, on improvise une chanson pour faire la fête tous ensemble » me dit Zola. La première mi-temps n’est pas très riche en occasion et se termine sans nouveau but. Pendant les 15 minutes d’entracte qui suivent, quelques personnes vont prendre l’air mais d’autres restent assises à leur place avant que le match ne reprenne. Je rencontre George, suédois d’origine congolaise, qui est de passage en Belgique. De ce qu’il sait, la situation est électrique à Kinshasa. Nombreux sont ceux qui vivent au rythme du football et souhaitent voir leur nation se qualifier pour la deuxième fois de son histoire. Selon lui, le Maroc est favori mais il veut y croire. « Regarde ce que la Macédoine du Nord a fait contre l’Italie hier, ce n’est pas toujours le favori qui l’emporte. »

Dès le début de la seconde période, le stress est de nouveau perceptible sur place. A la 48e minute, Yoane Wissa est proche de rassurer tout le monde en inscrivant un deuxième but mais sa frappe enroulée passe de peu à côté. L’attaquant de Brentford voit sa cote de popularité augmenter sur place. Mais la vraie star, ce n’est pas lui. Visiblement fort apprécié, le latéral droit Dieumerci Mukoko Amale est acclamé à chaque touche de balle. Dans le bar, on crie régulièrement son surnom : « Soso ! Soso ! Soso ! » Une marque d’attention familière qui m’intrigue.

Alors que le match était bien maîtrisé par les joueurs Congolais, l’arbitre siffle un pénalty pour le Maroc à la suite d’une faute de main commise par un joueur des Léopards dans le grand rectangle. La faute de main est bien visible mais, du côté des supporters, tout le monde n’est pas d’accord. Une fois que le pénalty est sifflé, une personne à côté de moi se retourne en me faisant des grands yeux pour me rappeler ce qu’elle m’avait dit à la mi-temps. Elle craignait de voir des décisions arbitrales défavorables à son pays.

Deuxième fête dans le bar

Tous les regards sont rivés vers l’écran dans une atmosphère marquée par le silence. Le joueur marocain, Ryan Mmaee s’avance pour tirer le pénalty et voit son tir passer au-dessus du cadre. La foule se lève en criant de joie. On aurait dit qu’un nouveau but venait d’être marqué. Pendant les minutes qui suivent, les chants reprennent au rythme d’un sifflet à l’arrière de la salle.

Les Congolais ne passent pas loin d’alourdir le score lorsque Dieumerci Mbokani, l’ancien Anderlechtois, reprend un centre en un temps et l’envoie à côté du but. Rien ne semble perturber la fête jusqu’à ce que l’inattendu se produise. Sur une contre-attaque, le Maroc envoie un long-ballon remisé de la tête vers Tarik Tissoudali, l’attaquant gantois, qui égalise en propulsant la balle au fond des filets. L’arrêt de Bounou, le gardien marocain, à la 80e minute sur une tête puissante de Ben Malango, amplifie le désespoir sur place.

Les supporters de la RDC espèrent retrouver la Coupe du monde 48 ans après la dernière participation d'un pays qui s'appelait encore Zaïre.
Les supporters de la RDC espèrent retrouver la Coupe du monde 48 ans après la dernière participation d’un pays qui s’appelait encore Zaïre.© iStock

La fin de match se termine moins bien. Depuis notre siège, on ressent bien l’enjeu de la rencontre au stade des Martyrs de Kinshasa. Aucun des joueurs ne veut faire d’erreur au risque de donner un avantage considérable au Maroc avant le match retour. En fin de rencontre, une légère faute de Muzinga Ngonda le voit écoper d’un second carton jaune, synonyme d’exclusion. Il reste alors moins de 5 minutes dans le temps réglementaire et les Congolais ne sont plus qu’à 10 sur le terrain. Le stress de mes voisins devenait presque communicatif. Un nouveau but aurait certainement plombé l’ambiance mais ce ne fût pas le cas. Le match se termine sur le score nul de 1-1. Il faudra attendre le match de mardi à Casablanca pour savoir lequel de ces deux pays sera qualifié.

La fête malgré tout

Une fois le match terminé, les supporters se lèvent un à un pour quitter le bar. J’aperçois de nombreux visages dépités qui en disent long. La RDC est passé à côté d’une belle occasion de prendre l’avantage sur leur opposant. Mais le sourire revient rapidement lors des discussions d’après match. Zola me dit avant de partir qu’il veut y croire jusqu’au bout. « On est un peu déçu mais ce n’est pas fini. Il y a encore le match retour qui nous attend. Que le meilleur gagne. »

Alors que la rencontre est terminée, de nombreuses personnes se regroupent en face du bar. Beaucoup de jeunes en font partie. Et soudain, au rythme des sifflets et des instruments à percussion, la fête reprend. Le match nul n’a pas pour autant gâché la journée au quartier Matonge qui s’anime très rapidement. Un cortège improvisé démarre alors vers d’autres rues du quartier où de nombreuses personnes retrouvent le sourire, qu’ils souhaitent conserver après le match de mardi.

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