Quart-de-finaliste africain: la quatrième fois, la bonne ?

Samedi après-midi, le Maroc sera le quatrième pays africain à disputer un quart de finale de Coupe du monde. L’histoire des nations africaines en Coupe du monde de football est une suite de rendez-vous manqués et de prolongations maudites.

« Je pense que le Cameroun sera champion du monde au Qatar dans une finale 100% africaine contre le Maroc », déclarait le président de la Fédé du Cameroun, Samuel Eto’o, en prélude au tournoi. L’ancien joueur du Barça avait des attentes trop élevées pour son pays, mais il avait vu juste concernant le beau parcours marocain. C’est déjà en soi une très belle performance qu’ont livré les Lions de l’Atlas, surtout en regard de l’historique des nations africaines en Coupe du monde. Jusqu’en 1990 – on en était déjà à la quatorzième édition du Mondial à l’époque – le continent ne représentait pratiquement rien sur la scène internationale. Ce n’est qu’en 1978 qu’un pays africain, la Tunisie, a obtenu une première victoire en Coupe du monde. Avant cela, seuls trois pays s’étaient qualifiés pour la phase finale : l’Égypte en 1934, le Maroc en 1970 et le Zaïre en 1974.

La victoire de la Tunisie contre le Mexique a été suivie, quatre ans plus tard, par le formidable succès de l’Algérie contre l’Allemagne de l’Ouest. « Nous dédierons le septième but à nos femmes, le huitième à nos chiens », avaient osé les journaux allemands. Ça en dit long sur la perception du football africain de l’époque. Quoi qu’il en soit, le continent s’est placé sur la carte du football mondial et les choses se sont améliorées au fil des éditions. En 1986, le Maroc est devenu le premier pays africain à se qualifier pour les huitièmes de finale, où il a finalement perdu 0-1 contre la RFA.

Les Lions Indomptables de 1990

La première véritable sensation d’un pays africain remonte à 1990, en Italie. Le Cameroun, qualifié pour la deuxième fois pour la phase finale du Mondial, surprend tout le monde en remportant son groupe devant la Roumanie, les champions du monde argentins et l’Union soviétique. En huitièmes de finale, Roger Milla et ses coéquipiers affrontent la Colombie de Carlos Valderrama. Après nonante minutes, le marquoir affiche toujours 0-0 et il faut attendre les prolongations pour que le match se décante. Milla inscrit deux buts en trois minutes et la réduction du score de la Colombie restera anecdotique. Les Lions Indomptables écrivent une page d’histoire.

Le Cameroun avait fait douter l’Angleterre à Naples mais a vu son parcours s’arrêter en 1/4 de finale. (Photo by Mark Leech/Offside via Getty Images)

Mais pour atteindre le dernier carré, ils doivent se farcir l’un des favoris à la victoire finale : l’Angleterre de David Platt, qui vient d’éliminer les Diables rouges en huitièmes et entend bien poursuivre sur sa lancée contre les Camerounais. Platt, encore lui, ouvre le score dès la 25e, mais un Cameroun très combatif revient dans le coup puis prend l’avantage en seconde période. Jusqu’à la 83e minute et un penalty pour l’Angleterre. Gary Lineker égalise et emmène les 22 acteurs en prolongations. Un rab durant lequel l’actuel présentateur de Match of the Day brisera les rêves camerounais en transformant un deuxième penalty. L’Afrique doit encore attendre pour voir l’un des siens en demi-finale.

Aliou Cissé donne l’exemple en 2002

Ce n’était pas une surprise de voir peu de pays africains dépasser la phase de groupe. En effet, jusqu’en 1990, seuls deux de leurs représentants étaient autorisés à participer. En 1994, ce nombre est passé trois, puis à partir de 1998, à cinq. Ça a permis à de nombreuses nations de faire leurs débuts sur la scène mondiale. On pense au Nigeria qui a atteint les huitièmes de finale en 1994, où il a échoué en prolongations face à une Italie réduite à dix.

En 2002, c’est le Sénégal qui a fait ses premiers pas en Coupe du monde. Cette équipe, qui comptait dans ses rangs l’actuel sélectionneur national Aliou Cissé, était d’ailleurs la source d’inspiration de la sélection actuelle qui s’est récemment inclinée contre l’Angleterre en huitièmes de finale. Avec Khalilou Fadiga, Henri Camara ou encore la révélation Papa Bouba Diop, les Lions de la Téranga ont donné des couleurs au tournoi en Corée du Sud et au Japon. Et ce dès la première journée contre la France, championnes d’Europe et du monde en titre, battue 0-1.

La Turquie avait mis fin au parcours du Sénégal en 2002, à Osaka. (Photo by Gunnar Berning/Bongarts/Getty Images)

Après deux matches nuls contre l’Uruguay et le Danemark, le Sénégal a hérité de la Suède au tour suivant. Le moment choisi par Henri Camara, meilleur buteur de l’histoire du Sénégal jusqu’à cette Coupe du monde, pour s’illustrer avec deux buts, synonymes de premier quart de finale pour les siens. En jetant un œil à tous ces quarts de finale africains, le Sénégal avait peut-être la plus belle carte à joueur, sur papier, en affrontant la Turquie. Mais une fois de plus, les prolongations ont fatales aux Africains : Ilhan Mansiz a inscrit le seul but du match à la 94e.

Le hands de Suárez en 2010

Après une Coupe du monde 2006 en Allemagne en demi-teinte (quatre des cinq pays africains ont dû plier bagages dès la phase de groupe et seul le Ghana, débutant à ce niveau, a atteint les huitièmes où il a été éliminé par le Brésil), le continent a accueilli le plus grand tournoi au monde en 2010 et les attentes étaient naturellement élevées en Afrique du Sud.

Mais cette fois encore, seul le Ghana a survécu à la phase de groupe. Les Black Stars se sont qualifiés pour le tour suivant dans le sillage de l’Allemagne. En huitièmes, c’est le surprenant vainqueur de la poule C, les États-Unis, qui les attendait. Alors que le score était de 1-1 au terme des nonante premières minutes, Asamoah Gyan a enfilé sa cape de super héros à la 93e minute en inscrivant le but qualificatif pour un quart de finale historique.

La fameuse main de Luis Suarez qui a brisé tant de coeurs au Ghana. (Photo by Michael Steele/Getty Images)

L’histoire de ce match contre l’Uruguay reste ancrée dans les mémoires. Une fois encore, le match a dû être prolongé de trente minutes. Des prolongations au cours desquelles le Ghana a été tout près de décrocher cette première demi-finale. Tout près est sans doute un euphémisme. En effet, le but de la victoire a été détourné sur la ligne par Luis Suárez… de la main. L’attaquant qui évoluait alors à l’Ajax a été exclu et le Ghana a obtenu la possibilité de s’assurer une place dans le dernier carré. Il suffisait à Gyan d’envoyer son penalty au fond des filets. Mais le destin en a décidé autrement. Le tir de Gyan a échoué sur la barre transversale, le match s’est décidé aux tirs au but et c’est l’Uruguay qui en est sortie vainqueur.

Douze ans plus tard, à l’occasion de sa sixième participation à la Coupe du monde – le Cameroun est la seule nation africaine à faire mieux avec huit participations – le Maroc peut reléguer ce passé rempli de prolongations maudites aux oubliettes. C’est en tout cas ce qu’espère tout un continent.

Certificats verts – Le mécanisme destiné à mettre fin à la bulle des certificats verts approuvé en plénière

Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici

Contenu partenaire