Premier coach à offrir un trophée à Leipzig, major de sa promo devant Nagelsmann: qui est Domenico Tedesco, le nouveau sélectionneur des Diables rouges ?
Le nouveau sélectionneur des Diables rouges est désormais connu depuis ce mercredi matin. Et comme nous vous l’avions suggéré le 16 décembre dernier, quelques jours après l’annonce de Roberto Martinez de ne pas prolonger son mandat, la task force en charge de désigner le nouveau guide de l’équipe belge allait peut-être se tourner vers un profil plus méconnu du grand public. Petite présentation de Domenico Tedesco.
Retrouvez un portrait tactique complet de Domenico Tedesco dans le prochain numéro mensuel de Sport/Foot Magazine qui paraîtra ce 15 février
Sur base des critères donnés dans l’offre d’emploi publiée par l’URBSFA, et sachant que malgré le profil idyllique recherché les finances de la Fédération étaient loin d’être extensibles, nous avions proposé, le 16 décembre dernier, six noms moins cités dans la presse pour remplacer Roberto Martinez. Si Ralph Hasenhüttl, Marcelo Gallardo, Steven Gerrard, Giovanni van Bronckhorst ou Mauricio Pochettino n’ont pas été nommés par la task force, c’est finalement le jeune Domenico Tedesco qui est devenu l’heureux élu. Voici le portrait que nous avions dressé de cet Allemand né en Italie.
Son parcours
Né en Calabre, il a pratiquement vécu en Allemagne toute sa vie puisque ses parents ont émigré dans le district de Stuttgart quand il n’avait que deux ans. Sur le terrain, il n’a jamais évolué plus haut que le niveau amateur et n’y a joué que brièvement. Domenico Tedesco a décroché un baccalauréat de génie industriel et de gestion de l’innovation. Il a ensuite passé ses diplômes d’entraîneur au sein de la Hennes-Weisweiler-Akademie où il a terminé major de sa promotion devant un certain Julian Nagelsmann. “Il était déjà entraîneur d’Hoffenheim et il a eu moins de temps que moi pour apprendre les examens”, expliquera-t-il pour Sky Sports.
Tedesco a commencé par les équipes d’âge, d’abord celles de Stuttgart avant de prendre en charge les U19 d’Hoffenheim. En mars 2017, l’Erzgebirge Aue s’attache les services de ce technicien novice alors qu’il occupe une peu enviée lanterne rouge en Bundesliga 2. La mission qui semblait impossible sera relevée avec brio par l’homme de seulement 31 ans. Aue prend 20 points sur 33 possibles, termine 14e place et évite de descendre à l’étage inférieur. Schalke 04 essaie de surfer sur ce succès et l’engage dans la foulée. Il devient le deuxième plus jeune entraîneur à officier en Bundesliga derrière Nagelsmann.
Malgré que les Knappen soient réputés pour être une usine à gaz, Tedesco, qui va marquer les esprits en remontant un écart de 4 buts à 25 minutes de la fin dans le derby de Ruhr contre le Borussia Dortmund, va les mener à une inattendue deuxième place avec un bilan de 18 victoires, 7 défaites et 9 partages. Dans la foulée, il prolonge son contrat de quatre ans. Mais la patience n’est pas la vertue de nombreux dirigeants et une défaite humiliante 7-0 contre Manchester City en Ligue des champions en mars 2019 aura raison de lui.
Il quitte alors l’Allemagne pour rallier la Russie au mois d’octobre. Sa mission: ramener le Spartak Mouscou au sommet. Il ne termine que septième la première année, mais reste malgré tout en place. Lors de l’exercice suivant, le Spartak se mêle à la course au titre, même s’il ne décroche par les lauriers nationaux. Tedesco sera cependant nommé par deux fois « entraîneur du mois. » A la fin de la saison 2020-2021, il quitte la formation moscovite, à la surprise générale, pour raisons familiales.
Le 9 décembre 2021, il remplace Jesse Marsch à la tête du RB Leipzig. Le club mal embarqué en Bundesliga se redresse et surtout remporte le tout premier titre de son histoire avec le gain de la Pokal (la Coupe). Cette saison, le conte de fés ne s’est pas prolongé et il a été renvoyé dès le début du mois de septembre après une défaite en Ligue des Champions face au Shakhtar Donetsk, qui s’associait à un départ raté en championnat. Il affichait pourtant une moyenne de 55% de rencontres gagnées depuis sa prise de pouvoir.
Pourquoi a-t-il été le bon candidat ?
Jeune, ambitieux, adepte des données, Domenico Tedesco est certainement l’un de ces prodiges d’une nouvelle vague d’entraîneurs qui n’a pas dû d’abord montrer ses qualités balle au pied avant de convaincre de ses qualités tactiques et de meneur d’hommes. S’il a été biberonné au gegenpressing de l’école allemande, le nouveau guide des Diables rouges n’a pas oublié ses racines transalpines puisque certains de ses modèles sont Fabio Capello ou Marcelo Lippi, même si ses idées sont plus modernes.
Il peut être considéré comme un serial winner vu les résultats récoltés avec Schalke 04 et le Spartak Moscou, deux clubs historiques en perte de vitesse ces dernières années. A Leipzig, il a offert le premier trophée tant attendu par le taureau ailé. Tout ça alors qu’il n’a que 37 printemps. Polyglotte, il peut communiquer plus ou moins couramment en six langues (dont l’Allemand et le Français), ce qui sera un atout indéniable dans une Belgique si tatillonne à ce sujet. « Au RB Leipzig, il a rendu aux professionnels de Leipzig ce que Jesse Marsch leur avait enlevé », relevait le magazine de référence allemand ‘Kicker’. Ce dernier soulignait aussi les structures plus claires apportées sur le terrain.
Tedesco est aussi un coach qui appuie sur les forces de ses joueurs et qui n’a pas une vision idéale qui ne correspondrait pas aux qualités de son effectif. “Mon idée du football est qu’il faut s’adapter au type de joueurs que l’on a et aux forces que l’on a dans l’équipe”, expliquait-il sur Sky l’année dernière. A Schalke 04, il avait par exemple mis en place une équipe qui évoluait en contre car les qualités du noyau étaient principalement physique. “Nous sommes arrivés seconds cette année-là grâce à cette tactique. Pendant de nombreux matchs, nous avons défendu de manière très compacte. Offensivement, nous avons beaucoup joué en contre-attaques et marqué beaucoup sur phases arrêtées.” Au Spartak, il changera son fusil d’épaule étant donné les profils plus habiles techniquement de son groupe. « Nous disposions de l’équipe la plus jeune de Russie avec des joueurs très habiles balle au pied et très forts techniquement. Nous avions 70 % de possession de balle à chaque match. C’est mon devoir d’entraîneur de m’adapter aux capacités de mon équipe”, détaillait-il pour Sky Sports.
« C’est une personne formidable, avec lui tout le monde se sent important », expliquait à son sujet l’international suédois Emil Forsberg. Domenico Tedesco est aussi réputé pour être un volcan sur la touche. Il dirige constamment ses joueurs, gesticule, encourage et se frite parfois avec les arbitres qu’il n’hésite pas à apostropher.
Tedesco est un vrai tacticien, capable de faire évoluer son schéma tout en conservant généralement la base avec une défense à trois. Il n’a pas peur de faire des choix forts comme quand il a écarté le champion du monde Benedikt Höwedes à Schalke 04 ou fait reculer un milieu défensif comme Benjamin Stambouli dans sa ligne arrière. S’il est habitué à travailler à avec les jeunes, il n’hésite pas à faire confiance à des anciens capables d’apporter un plus technique et dans la gestion des matches. “Quand vous arrivez dans un nouveau club, vous devez connaître l’équipe. Vous devez parler beaucoup aux joueurs expérimentés. Le but est de trouver ce qui ne collait pas dans le passé », avait-il expliqué après son intronisation au RB Leipzig. On peut donc en déduire qu’il essaiera de conserver une certaine continuité mais en dépoussiérant quelques meubles. De quoi sans doute satisfaire les conservateurs comme les révolutionnaires.
L’un des points d’interrogation concernera sa capacité à s’adapter à un rôle de sélectionneur qui est bien différent de celui d’un entraîneur de club. Si certaines sélections aiment nommer des techniciens expérimentés ou des grands noms du football local, d’autres ont lancé des coaches inexpérimentés. Si la France est devenue championne du monde en 2018 et l’Italie championne d’Europe en 2021 grâce à des entraîneurs expérimentés, Didier Deschamps et Roberto Mancini, ayant fait leurs preuves comme joueurs et comme techniciens sur le banc de grands clubs, d’autres sélections ont remporté des titres avec d’autres profils. Lionel Scaloni n’avait que 40 ans lorsqu’il a pris en main l’Argentine et à l’exception de la gestion des U20 albiceleste, il n’avait jamais été qu’adjoint. Un moment cité pour succéder à Martinez avant qu’il ne démente l’information, Joachim Low n’avait jamais gagné comme entraîneur qu’un championnat d’Autriche (Tirol Innsbruck) et… une Coupe d’Allemagne (avec Stuttgart), comme Tedesco, avant de porter l’Allemagne sur le toît du monde. S’il a remporté la C1 avec le Bayern avant de lui succéder, Hansi Flick ne présentait pas non plus un CV de footballeur très impressionnant. Pas plus d’ailleurs qu’un José Mourinho, qui aurait sans doute fait fantasmer de nombreux supporters diaboliques, alors que sa carrière crampons aux pieds est quasiment inexistante, tout comme celle d’Hervé Renard. Les deux hommes se sont pourtant forgés une belle réputation sur les bancs grâce au coup de pouce de dirigeants qui ont perçu leurs qualités et n’ont pas pris en considération l’avis de personnes qui les considéraient comme des inconnus. Bref, comme on peut le voir, le profil parfait n’hésite probablement pas et rien ne dit que Domenico Tedesco ne sera pas l’homme de la situation comme rien ne dit ne dit le contraire.
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