Pourquoi l’Antwerp galère offensivement
Malgré un effectif très alléchant sur le papier et une deuxième place en championnat, l’Antwerp continue de se chercher. Défensivement, l’équipe est bien en place. Devant, Brian Priske n’a toujours pas trouvé la meilleure formule, alors que les Play-Offs approchent. Au point d’hypothéquer les chances du Great Old dans la course au titre ?
Vous pouvez être de loin le meilleur buteur de votre équipe avec 18 buts en 26 matchs de championnat et malgré tout commencer une rencontre capitale sur le banc. Michael Frey en a fait la curieuse expérience lors du dernier match de l’Antwerp en championnat contre l’Union Saint-Gilloise. Un signe que malgré des résultats honnêtes, Brian Priske n’est toujours pas satisfait de son animation offensive. Pas sûr que la défaite 0-2 lui apporte beaucoup plus de certitudes. C’est le paradoxe d’un effectif qui compte dans ses rangs le deuxième meilleur buteur de la compétition (Frey), le premier artificier de l’exercice 2018/2019 (Samatta), accompagnés de soutiens aussi fins que Balikwisha, Benson, Fischer et Miyoshi mais qui peine à enflammer ses matchs.
Avec autant de qualité, difficile d’imaginer l’équipe avec l’attaque la moins prolifique du top 4. Pire, l’Antwerp n’est que la neuvième équipe du championnat en termes d’occasions créées (les expected goals). Sur base de ces chiffres, le matricule 1 ne devrait avoir scoré qu’à 35 reprises. Loin des 46 buts effectivement inscrits. Il y a deux manières de regarder ces chiffres : les joueurs de Brian Priske ne créent que très peu mais ils sont sacrément efficaces. Un homme en particulier symbolise cet écart : avec ses 18 buts, Michael Frey surperforme en comparaison avec les 13,5 expected goals dont il est crédité.
Une question de profils
S’il y a bien une chose qu’on ne peut pas lui enlever, c’est la présence qu’il amène dans le rectangle. Les ballons délivrés dans les seize mètres le font ruer dans les brancards comme la couleur rouge agitée par les toreros. Le gaillard sait quelles sont ses qualités et se cantonne à merveille à son rôle de finisseur. Un jeu simple, généralement en une touche de balle, qui fait mouche dans les rectangles embouteillés. La caution efficacité est plus que remplie mais la formule a les défauts de ses qualités.
Les ballons catapultés dans les seize mètres dont raffole Frey, ce n’est pas forcément le registre des joueurs qui l’entourent (principalement Balikwisha et Benson ces dernières semaines). Balikwisha est un droitier qui joue à gauche et Benson est un gaucher qui joue à droite. C’est donc tout naturellement qu’ils rentrent dans le jeu sur leur bon pied pour provoquer ou chercher un relais plutôt que de multiplier les centres. L’Antwerp émarge seulement à la dixième place des équipes qui centrent le plus. Sur ses 18 pions, Frey n’a reçu de ses deux principaux soutiens d’attaque qu’un assist chacun. Coïncidence ou non, les deux offrandes sont intervenues à quelques minutes d’intervalle, deux centres qui ont permis au Suisse de s’offrir un doublé lors de la victoire 3-0 contre Charleroi, un des matchs les plus convaincants de la saison anversoise.
Au grand regret de Priske, la performance est restée sans lendemain. Sur les cinq rencontres qui ont suivi, Frey n’a marqué qu’à une reprise. Et dans ces cas-là, ses carences ressortent d’autant plus, au point de ne plus faire l’unanimité au sein du vestiaire. Dans les travées du Bosuil, certaines voix s’élèvent, envisageant un jeu plus fluide sans lui pour faire écho aux incursions vers l’axe de Benson et Balikwisha, peu accompagnées d’une solution de relais.
C’est qu’on ne remplace pas facilement un attaquant comme Dieumerci Mbokani, qui combinait cette facilité à gagner ses duels avec une bonne entente avec ses comparses d’attaque. Mbokani, le nom est lâché. Le Congolais avait beau avoir 35 ans, il restait ce qu’il se faisait de mieux à son poste en Pro League. Il était la figure de proue d’un département offensif riche de talents bruts comme Lamkel Ze et Refaelov. Tous sont partis simultanément lors de la grande lessive anversoise du mercato. Des joueurs offensifs présents cette saison, seul Miyoshi était déjà au club la saison dernière. Brian Priske a logiquement demandé du temps à son arrivée. Après tout, l’AS Rome ne s’est pas faite en un jour. Mais plus de sept mois après son arrivée, les expérimentations continuent.
Le temps presse
Lors du match contre l’Union, c’est Samatta qui a ainsi été titularisé seul en pointe, sans succès. A son arrivée au mercato estival, l’ancien buteur de Genk était pressenti pour s’installer comme titulaire mais la période de grâce de Frey et le manque de rythme du Tanzanien après des saisons compliquées à Aston Villa et Fenerbahce en ont décidé autrement. Priske a bien tenté d’associer les deux joueurs (le duo a été aligné de concert à sept reprises) mais les tentatives n’ont pas forcément convaincu. C’est qu’à ce prix, il faut enlever un joueur créatif à une équipe déjà en manque d’inventivité. Au coeur du jeu, Radja Nainggolan, Birger Verstraete et Alhassan Yusuf sont très actifs mais ne créent que peu de décalages offensivement. Viktor Fischer s’est avéré une bonne pioche, capable d’amener du liant dans l’équipe par son jeu entre les lignes et sa bonne entente avec Frey (3 assists, la meilleure connexion avec l’attaquant suisse) mais l’ancien joueur de l’Ajax se remet de graves blessures et a rechuté en décembre dernier.
Autre allié potentiel pour Frey dans le jeu anversois, Aurélio Buta, l’arrière droit aux 17 assists sur les 3 dernières saisons, s’est lui aussi blessé. Les transferts sortants de l’Antwerp à ce poste, moins médiatisés que dans le secteur offensif, ont vu partir d’autres pourvoyeurs de centres comme Jordan Lukaku ou Simen Jukleröd. Plus que jamais, l’attaquant Suisse semble entouré de joueurs qui ne parlent pas le même football que lui. Le parallèle avec la situation de Bas Dost, meilleur buteur du Club de Bruges mais contesté pour des raisons similaires, est troublant. Comme quoi, dans un top 4 qu’on dit déjà constitué, ce sont les deux équipes qu’on annonçait avec le plus de certitudes dans la course au titre qui en ont le moins. Nul doute qu’à Bruxelles, on suit la situation de très près.
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