Wouter Vandenhaute est de longue date convaincu des atouts d’Olivier Renard en tant que directeur sportif. © BELGAIMAGE

Olivier Renard à Anderlecht: l’homme est la dernière chance de Vandenhaute

Guillaume Gautier
Guillaume Gautier Journaliste

Olivier Renard est le nouveau directeur sportif d’Anderlecht. Un profil apprécié par Wouter Vandenhaute, président contesté qui marque plus que jamais les Mauves de son empreinte.

L’histoire ne dit pas (encore) si l’affaire s’est conclue chez Couvert Couvert, le restaurant gastronomique louvaniste détenu par Wouter Vandenhaute. Ce serait presque logique, tant Olivier Renard a la réputation d’aimer signer des deals ou étendre son réseau autour d’une bonne table. Si le départ de Jesper Fredberg, contesté de plus en plus vivement au sein de la maison mauve depuis le dernier mercato, n’est pas une grande surprise, son remplacement (presque) poste pour poste par l’ancien directeur sportif du Standard était bien moins attendu. La destinée sportive d’Anderlecht est désormais entre les mains d’Olivier Renard, qui retrouvera dans les bureaux de Neerpede un certain Christophe Lonnoy, son précieux bras droit lors de sa période rouche. Comme un signe supplémentaire de la prise de pouvoir du président Vandenhaute, pourtant labellisé «non exécutif» depuis le chaos qui avait suivi le départ de Vincent Kompany à l’été 2022.

A l’époque, alors que de nombreux profils sont avancés par le directeur sportif Peter Verbeke, c’est déjà Wouter Vandenhaute qui décide de confier la succession de l’ancien capitaine des Diables à Felice Mazzù, presque champion de Belgique avec l’Union Saint-Gilloise. C’est encore lui qui choisira, quelques mois plus tard et dans la foulée du licenciement du coach hainuyer, d’écarter Verbeke des plus hautes décisions sportives pour les mettre entre les mains de Jesper Fredberg, nouveau CEO Sports des Bruxellois. En parallèle, il transforme également ses coups de cœur en transferts: dans l’ombre, le président est à la manœuvre des arrivées, à douze mois, d’intervalle de Jan Vertonghen et de Thorgan Hazard. Deux coups médiatiques, mais aussi deux absences dont les suiveurs ont pointé du doigt le poids important dans la course au titre perdue au printemps dernier. Sans doute revigoré par la lecture de ces analyses, Vandenhaute a encore mis la main à la pâte pour renforcer Anderlecht l’été dernier en pilotant les dossiers des anciens Diables Rouges Thomas Foket et Leander Dendoncker.

De sa position privilégiée, il n’a pu que déplorer l’absence de relation de confiance entre son CEO Sports, obsédé par ses renforts danois, et sa cellule de recrutement, au sein de laquelle il compte pourtant au moins un homme dont il est certain des qualités. Si Christophe Lonnoy a intégré la structure mauve en 2021, un peu plus de deux ans après avoir quitté le giron des clubs de l’élite après la fin de son aventure à Sclessin, c’est en grande partie grâce au le président Vandenhaute. Entre le terme de son bail liégeois et le début de ses fonctions bruxelloises, le recruteur a d’ailleurs fait parler son œil de scout pour le compte de l’agence Let’s Play, au sein de laquelle il occupait le rôle de prospecteur. Une agence dont le patron était Wouter Vandenhaute lui-même, jusqu’à ce que ses nouvelles attributions à Anderlecht l’obligent à céder ses parts pour rester dans les clous de la commission des licences.

Les décideurs mauves sont convaincus par les qualités humaines et sportives du dernier homme qui a permis au Standard de tutoyer le titre.

Un retour inattendu

Trois ans après Lonnoy, c’est donc au tour d’Olivier Renard de rejoindre Wouter Vandenhaute. Lors de sa conférence de presse de présentation, le nouveau directeur sportif des Mauves admet d’ailleurs connaître son président depuis une décennie. Dans son parcours professionnel, marqué par un séjour prolongé de l’autre côté de l’Atlantique, l’opportunité offerte par Anderlecht est immanquable. Si la qualité de son travail a souvent été vantée par les suiveurs à Montréal, où il n’avait que trop rarement les coudées franches pour le recrutement, la MLS (Major League Soccer) peut avoir des airs de cimetière pour ceux qui s’y aventurent. Demandez par exemple à Hernan Losada, coach argentin parti avec les honneurs du Beerschot à la fin de l’année 2020 pour rejoindre DC United et désormais confiné à l’anonymat de la deuxième division à la tête de l’instable équipe de Deinze. D’ailleurs, c’est également dans l’antichambre de l’élite belge que certains imaginaient revoir Olivier Renard, à la suite de contacts prolongés et approfondis avec le RWDM depuis la mise à l’écart de Gauthier Ganaye du côté du stade Edmond Machtens.

Sans même parler des accusations portées à son encontre par l’ancien président du Standard Bruno Venanzi et l’ex-agent de joueurs Dejan Veljkovic dans le cadre de l’opération «mains propres», en référence au scandale de commissions occultes et de matchs truqués qui a frappé le football belge à la fin de l’année 2018. On reproche alors à Renard d’avoir perçu 80.000 euros de commissions illégales, ce que l’intéressé a toujours nié. Toujours est-il qu’à Anderlecht, où on affirme dès que possible sa volonté de travailler avec des profils «propres», on semble faire confiance au discours de l’ancien décideur sportif du Standard.

Quand l’opportunité d’Anderlecht s’est présentée, Renard s’est donc empressé d’y donner des suites positives. Du côté des décideurs mauves, on est visiblement convaincu par les qualités humaines et sportives du dernier homme qui a permis au Standard de tutoyer le titre.

«Je n’ai pas besoin de beaucoup de personnes autour de moi, mais bien de gens de confiance.»

Le départ de Jesper Fredberg, contesté de plus en plus vivement au sein de la maison mauve, n’est pas une grande surprise. © BELGAIMAGE

La méthode Renard

Le contraste avec Jesper Fredberg risque en tout cas d’être saisissant. On disait du premier qu’il avait découvert l’existence d’Islam Slimani quand son nom avait débarqué sur son bureau au bout du mois de janvier 2023, juste après l’échec du transfert de Tolu Arokodare. Renard, lui, connaît le marché comme sa poche. «Normalement, quand un intermédiaire m’appelle, je connais le joueur dont il me parle parce que je passe mes journées sur Wyscout (NDLR: un logiciel qui regroupe des vidéos des matchs du monde entier)», expliquait l’intéressé à Sport/Foot Magazine à l’heure de livrer sa recette d’un transfert réussi. Tout en reconnaissant qu’aucun œil n’est omniscient, et qu’un bon réseau peut parfois vous tuyauter sur de belles découvertes, comme quand un agent l’avait mis sur la piste de Sofiane Hanni, talent offensif perdu en deuxième division turque. Des heures de visionnages et d’appels plus tard, l’Algérien est attiré à Malines (où Renard a passé deux ans et demi à la tête du recrutement), puis explose au point d’être désigné meilleur joueur de la saison et de signer à Anderlecht.

La méthode Olivier Renard se passe en bonne partie sur le terrain. En 2018, quand tous s’interrogent sur les ingrédients qui lui ont permis de transformer un Standard moribond en candidat au titre à la suite d’une série de bonnes pioches, il se livre sur sa méthode: «Je dis souvent que je suis mon premier scout, car je suis un directeur sportif qui bouge tout le temps. Je n’ai pas besoin de beaucoup de personnes autour de moi, mais bien de gens de confiance comme Christophe Lonnoy, avec qui on évalue tout à deux. Normalement, j’essaie de regarder au moins deux fois par mois un match, pas toujours complet, de tous les joueurs qui figurent dans une base de données comptant, en fonction des périodes, entre 100 et 200 noms.»

Bridé dans ses prises de décision au Standard par l’arrivée messianique en bords de Meuse d’un Michel Preud’homme auréolé de tous les pouvoirs, Olivier Renard avait initialement pris la direction d’Anvers au terme d’une saison à ne plus se sentir écouté. Le temps de faire jouer ses réseaux internationaux pour faciliter la venue du défenseur néerlandais Wesley Hoedt, et son œil de recruteur pour attirer les jeunes milieux de terrain Martin Hongla ou Koji Miyoshi. Il était alors le bras droit idéal pour Lucien D’Onofrio, toujours homme de contacts mais de moins en moins homme de terrain. L’aventure dans la Métropole est toutefois bien plus courte que prévu, parce que l’appel de la MLS débarque sans prévenir. Tout juste nommé responsable du pole sportif des clubs de Bologne et de Montréal (tous deux possédés par l’homme d’affaires québécois Giuseppe «Joey» Saputo), l’ancien patron sportif de l’AS Roma Walter Sabatini dégaine son portable et y cherche Olivier Renard. L’appel est convaincant, le projet alléchant, et Renard est tout aussi convaincu que ce jour où son ami Sabatini lui avait parlé d’un milieu de terrain roumain nommé Razvan Marin, qui deviendrait bientôt le maître à jouer du Standard.

Dans le milieu, on dit d’Olivier Renard qu’il sait tisser des liens, tenir un vestiaire et repérer un joueur. Ses détracteurs le décrivent plutôt comme un soliste parfois désorganisé, qui aime scruter les stades inattendus à la recherche de talents mais manquerait de structure. L’ancien gardien de but de Charleroi et du Standard conserve pourtant soigneusement ses conversations et multiplie les captures d’écran dans la galerie de son téléphone pour pouvoir prouver ce qu’il raconte, une obsession pour qu’on ne puisse pas déformer ses propos. Ses atouts ont, en tout cas, convaincu de longue date Wouter Vandenhaute. Au point d’en faire le nouveau directeur sportif d’un Anderlecht qui porte, plus que jamais, la griffe de son président «non exécutif».

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