Swann Borsellino
L’Union, les Rangers: quand les clubs historiques renaissent de leurs cendres
Découvrez la chronique de notre consultant, Swann Borsellino.
Un but n’aura peut-être jamais aussi bien résumé une saison. Je m’en souviens comme si c’était hier. Il était 20h45 ce 23 janvier. Nuno Da Costa venait de se prendre le bec avec Jorge Simão pour une histoire de penalty. J’avais faim et donc mécaniquement englouti un sandwich mou poulet curry entre deux antennes du box-to-box d’ Eleven. Une émission qui m’a permis une immersion accélérée dans le monde du foot national belge. Une émission où chaque but ou petit événement est vécu comme ce moment où le DJ passe une chanson que vous aimez vraiment bien. Ce jour-là, c’est DJ Mazzù qui nous a régalé. Son Union se déplaçait à Deinze et la dernière fois que j’avais vu sept joueurs positionnés sur la ligne médiane lors d’un coup d’envoi, c’était le Pescara 2011-2012 de Zdenek Zeman qui jouait. La suite a assez fait le tour de la Belgique et même d’une partie du monde pour que je vous la conte en détails. Dante Vanzeir plante, en six secondes, le but le plus rapide du football professionnel de notre pays et, 89 minutes plus tard, les visiteurs s’imposent 2-4. Trop rapides, un peu trop forts, beaucoup trop seuls. Ce moment exceptionnel d’une saison vécue sans supporter illustre à lui seul l’exercice 2020-2021 des Jaune et Bleu: aussi admirable qu’amer. Pour la première fois depuis 1973, le matricule 10 va à nouveau mener son jeu dans l’élite. Un événement qui ne sera pas célébré comme il se doit.
Quand on était là dans la galère, il n’y a rien de pire que de ne pas pouvoir être là quand le soleil brille à nouveau.
C’est peut-être la chose qui manque le plus à Paris et sa région. Souvent, et à juste titre, considérée comme l’un des centres névralgiques du football mondial, l’Île-de-France (plus de douze millions d’habitants recensés en 2020) ne compte qu’un club en Ligue 1: le Paris Saint-Germain. Pendant ce temps, ses cousins franciliens galèrent. Auteur d’un départ canon en Ligue 2, le Paris FC ne devrait pas rejoindre l’élite la saison prochaine, tandis que l’autre club mythique de l’agglomération parisienne, le Red Star, tente péniblement de s’extraire du National 1 ( la troisième division française, ndlr). Malgré cette apparente lose, ils sont nombreux, à Paris et en banlieue, à faire le choix de se séparer du PSG pour vivre un amour plus léger, plus fusionnel, avec un club qui leur ressemble plus. Plus familial, plus local, plus en accord avec la conception qu’ils ont du foot. Un club national plus qu’international, en fait. C’est sous ce prisme-là qu’au fur et à mesure de leurs victoires cette saison, j’ai appris à me réjouir de l’éventuelle remontée de l’Union Saint-Gilloise. Déjà parce qu’il y a quelque chose de satisfaisant dans le fait de revoir un club historique renaître de ses cendres. Ensuite parce qu’à une époque de grand questionnement autour de la passion pour le football, l’accession à l’élite de cette typologie de club apparaît comme un pansement essentiel sur la plaie béante que nous connaissons tous. Vous me prenez certainement pour un grand naïf. Ce n’est pas le cas, en tout cas pas là-dessus. Tony Bloom, propriétaire de Brighton et donc de l’Union, n’est pas forcément l’illustration du terme « populaire », et en termes de masse salariale, les Unionistes peuvent boxer avec quelques clubs de l’élite. Mais le stade Joseph Marien, sa tribune debout, méritent l’élite. Mais peut-être autrement.
Il n’y a pas grand-chose de plus difficile dans le foot qu’être supporter d’un club historique qui périclite. Surtout si le hasard de la vie vous a fait naître dans la mauvaise génération. Avec un peu de malchance, votre grand-père a connu des années dingues, votre mère quelques titres et vous, vous avez hérité de l’amour de votre club comme de votre prénom: vous n’avez pas vraiment choisi, mais c’est parti pour une vie. Alors à ceux qui portent l’Union dans leur coeur depuis des décennies, mais aussi à ceux qui se sont mis à l’aimer plus récemment, je témoigne toute ma sympathie. Quand on était là dans la galère, il n’y a rien de pire que de ne pas pouvoir être là quand le soleil brille à nouveau. Encore plus quand l’éventuelle montée peut se jouer contre un rival historique, le RDWM. D’ailleurs, en parlant de revenir de loin, les supporters des Glasgow Rangers ont fêté leurs retrouvailles avec le titre dans les rues de leur ville. Sobrement, mais quand même avec quelques fumigènes. J’ai lu que côté USG, on allait opter pour la sagesse, dans l’espoir de pouvoir célébrer ça dignement au plus vite. Soyez sûrs, en tous cas, que je boirai une chope à votre santé.
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