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Les coulisses du flop de Mouscron: les limites d’une galaxie

Pierre Danvoye Pierre Danvoye est journaliste pour Sport/Foot Magazine.

Un directeur parti, un adjoint viré, un propriétaire absent, une équipe à la dérive. Comment et avec qui Mouscron peut-il redresser la tête?

En début de semaine passée, Mouscron a battu les amateurs de Wellen au cinquième tour de la Coupe de Belgique. Première victoire de sa saison dans un match à enjeu. Ça, c’est la bonne nouvelle. Ce match sans aucun attrait s’est malheureusement joué dans un stade où on aurait pu compter les spectateurs. L’Excel déplaçait peu de monde en D1A, c’est évidemment encore pire depuis l’ouverture du championnat de D1B. On nous avait vendu un nouveau projet, un retour aux racines concrétisé par le come-back de deux icônes du club, Mbo Mpenza comme directeur du football et Émile dans un rôle d’adjoint d’ Enzo Scifo. Mais il en faudra plus pour séduire à nouveau le peuple mouscronnois. Il faudra des résultats, d’abord, et le départ est catastrophique.

Un citoyen du centre-ville nous explique: « Je ne vais pas en faire des tonnes sur la période Jean-Pierre Detremmerie, parce que tout n’était pas toujours très clean, mais à l’époque, il y avait une vraie identification entre les gens et l’Excel. Le club parlait à tout le monde, même à ceux qui n’étaient pas du tout branchés foot. Le jour des matches à domicile, c’était le premier sujet de conversation. Forcément, ça amenait des Mouscronnois au stade. Dans certains cas des personnes qui étaient simplement curieuses au départ puis se prenaient au jeu. Aujourd’hui, il n’y a plus rien de tout ça. Il y a le centre de la ville, qui n’est déjà plus très dynamique, et plus loin, à l’écart, le Canonnier et son équipe qu’on ne connaît plus. »

La bourgmestre elle-même aurait essayé de changer les choses. Déjà, à partir du moment où les infrastructures (le stade et le Futurosport) sont publiques, les autorités ont intérêt à ce que l’Excel se porte bien. Et donc, la saison dernière, par exemple, quand la bourgmestre allait voir un match, elle payait son entrée de sa poche au lieu de profiter du système. Mais ces tentatives de rapprochement semblent être à sens unique. Ainsi, quand les organisateurs de la braderie ont demandé à l’Excel de collaborer en envoyant quelques joueurs, il n’y a pas eu de suite. Pas envie, pas le temps, etc. « Dans le temps, on voyait le logo du club partout », continue notre citoyen. « Sur les sachets de pain, des calendriers, des posters. Aujourd’hui, l’Excel est complètement absent du quotidien mouscronnois. »

Mouscron, Boavista, Bordeaux

Mais ce n’est même pas ça, le pire… L’équipe de Scifo n’aurait pas pu faire un début de parcours plus dramatique. Toutefois, quand on analyse le noyau, on se dit que ce Mouscron doit sauver sa peau en D1B. Certainement pas jouer le titre – la direction et le staff signalent d’ailleurs aujourd’hui que cet objectif ne sera visé que la saison prochaine – mais faire un parcours tranquille. Déjà parce qu’il y a des tonnes d’expérience avec des gars comme Parfait Mandanda, Christophe Lepoint, Dimitri Mohamed, Teddy Chevalier, Clément Tainmont, Christophe Diandy. Des joueurs qui n’ont plus les jambes de leurs vingt ans, mais ce n’est pas nécessairement ce qui compte le plus dans cette série. Il faut de la jugeote pour la négocier, et donc, Mouscron n’en manque pas.

Mais ce début de championnat foireux, ce n’est même pas ça, le pire… Non, le pire, ce sont les multiples bouleversements extra-sportifs et une question: le propriétaire, Gérard López, l’homme invisible, en a-t-il vraiment quelque chose à faire du plus petit de ses trois clubs professionnels? Son équipe au Portugal, Boavista, se débrouille bien, elle est carrément dans la roue des trois grands traditionnels. Par contre, ça se passe beaucoup moins bien à Bordeaux, qui est à l’arrache pour ne pas tenir la lanterne rouge en Ligue 1. Et on comprend que pour un même propriétaire, déjà le grand absent à Mouscron tout au long de la saison dernière quand il était aussi proprio de Lille, sauver la peau des Girondins en D1 française est plus essentiel que consacrer du temps à la survie des Hurlus en D2 belge. C’est surtout là-bas qu’il a investi et a intérêt à ne pas se planter, pas ici.

La justice française s’intéresse à López

En ironisant, on pourrait dire que Gérard López a des chats à fouetter dans plus d’une région en France. Parce qu’il est en guerre ouverte, par médias interposés, avec l’homme qui a pris sa place à Lille, Olivier Létang. Ce poids lourd du foot français, après ses passages au PSG et à Rennes notamment, lance des attaques frontales contre López, l’accusant d’avoir amené le LOSC au bord de la banqueroute. On se souvient que c’est la situation financière dramatique du club qui avait obligé López à partir en fin d’année dernière. « Le LOSC était dans une situation de naufrage économique », a lancé Létang dans la presse française. La justice est d’ailleurs sur le coup. « Notre commissaire aux comptes a fait des révélations au Procureur de la République », explique aussi le nouveau propriétaire lillois. Létang accuse par ailleurs López d’avoir planqué entre soixante et septante millions sur le transfert de Victor Osimhen à Naples. En clair, après avoir été accusé d’avoir torpillé l’écurie de Formule 1 Lotus (son ancien pilote Romain Grosjean raconterait que López lui doit toujours cinq millions d’euros), López aurait sur la conscience la presque-mort du LOSC. Et aussi la chute en D1B de l’Excel via les prêts massifs de jeunes Lillois qui n’ont pas apporté grand-chose la saison dernière.

Et le Mouscron actuel dans tout ça? À nouveau, on comprend que ce club ne peut pas avoir la priorité de l’homme d’affaires. La démission récente du T2 José Jeunechamps, pour incompatibilité d’humeur avec Enzo Scifo, ne doit pas l’avoir contrarié. Pas sûr d’ailleurs, vu la fréquence de ses passages au club, qu’il sache à quoi ressemble Jeunechamps. Par contre, comme pour confirmer que ses intérêts prioritaires étaient plus que jamais ailleurs, il a débauché Paul Allaerts, qui devient son conseiller personnel. La fin d’un long bail de directeur général pour l’ancien arbitre. Pour le remplacer, c’est le directeur financier du club, Benjamin Sellier, qui a été choisi. La direction économise ainsi un salaire. « Et Paul Allaerts continuera à avoir des rapports avec le club (il va travailler pour López à la fois sur Mouscron, Boavista et Bordeaux, ndlr), sans que son salaire soit pris en charge par l’Excel », explique le président Patrick Declerck. Tout ça, ce n’est quand même pas le signe que le proprio a décidé de prendre son équipe belge au sérieux et de tout faire pour la sortir de l’ornière.

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