Le fiasco de l’Espagne à la Coupe du monde: le problème est qu’il n’y a pas de plan B
Le Maroc a réalisé la seule véritable surprise de ces 1/8e de finale du Mondial. Les Lions de l’Atlas ont renvoyé l’Espagne au pays au terme d’une incroyable séance de tirs au but. Qu’est-ce qui a mal tourné chez les champions du monde 2010 et comment peuvent-ils se remettre de ce nouvel échec ? Michael Van Vaerenbergh, expert de la Liga chez Eleven, revient sur la crise qui frappe la Roja.
Ce mardi, l’un des principaux favoris a été éliminé plus rapidement que prévu du tournoi. L’Espagne peut commencer à panser ses plaies après un match compliqué mais surtout marqué par une séance de tirs au but catastrophique contre le Maroc. Les tireurs de la Roja ont tous manqué leurs tentatives. Un coup de tonnerre pour les ouailles de Luis Enrique mais aussi pour la presse. « J’ai lu Marca ce matin et ils étaient vraiment très critiques », raconte Michael Van Vaerenbergh. « J’avais le sentiment que Luis Enrique l’était beaucoup moins. Il a défendu ses joueurs et le beau jeu proposé par son équipe, mais la presse espagnole a aussi dressé ce constat. Avec ce football, on ne gagne plus de matches au plus haut niveau. Si vous ne pouvez marquer que toutes les 1 350 passes, cela veut tout dire. C’est toujours pareil : on frappe trop rarement au but, le jeu manque de profondeur et n’apporte que peu de menace. »
Van Vaerenbergh voit également un autre gros problème avec cette Espagne dirigée par Enrique. « Il n’a pas de plan B avec ce groupe. Il ne peut que produire du tiki taka, en faisant constamment circuler la balle et en contrôlant le jeu. Mais pour vraiment en prendre le contrôle, il faut aussi marquer en premier. Et si vous ne vous ménagez pas assez d’occasions, vous devez être capable de changer votre plan de jeu. Mais cette équipe manque d’alternative. À cet égard, la qualité de la liste des 26 était assez faible », pense Van Vaerenbergh.
Suivre l’exemple de la France
« De plus », note l’expert du football espagnol, « avec cette équipe, l’Espagne n’a pas non plus les moyens d’être menaçante avec, par exemple, un attaquant de profondeur comme Alvaro Morata. C’est un bon attaquant, un vrai numéro 9 qui est bon de la tête, mais ces ballons ne viennent pas. Cette équipe n’est pas faite pour ce jeu. Jordi Alba est un excellent latéral gauche, mais pas un de ceux qui vont toujours aller chercher la ligne de fond et qui ne cessent de centrer. A droite, Enrique a commis la plus grosse erreur en alignant Marcos Llorente. Ce n’est certainement pas un arrière droit et certainement pas celui qui va tenter de trouver la tête de Morata. Pour le reste, vous avez des ailiers qui ne collent pas à leur ligne mais qui ont toujours la liberté de permuter et de bouger sur la largeur. Offensivement, vous n’avez donc pas la qualité humaine, l’ADN et la philosophie pour réussir à briller dans des matches à élimination directe ».
Luis Enrique avait déjà annoncé, avant même le coup d’envoi du tournoi, qu’il ne changerait pas de philosophie et de style de jeu. Il estime qu’en évoluant différemment, l’Espagne ne serait plus « spéciale ». Pour avoir un autre style, il faut donc changer de sélectionneur. Van Vaerenbergh s’en rend également compte. « Les couteaux avaient été aiguisés bien avant le tournoi du côté de la presse. L’entraîneur n’était déjà pas populaire parce qu’il ne donnait pas de conférence de presse mais qu’il était ensuite présent sur Twitch pour discuter avec les fans. Ce fiasco va lui coûter sa place, je pense. »
« L’Espagne doit évoluer vers un football plus moderne », poursuit Van Vaerenbergh. « Des pays comme la France ou l’Allemagne sont déjà passés du football de combinaison de 2010 à un jeu plus moderne en 2022. L’Espagne est restée sur ses principes qui ont fait sa gloire voici plus de 10 ans. Je suis un grand fan du pays de football qu’est l’Espagne et de tout le romantisme qui l’entoure. Mais il devrait peut-être y avoir plus de muscles et de vice dans l’équipe. Il suffit de regarder Casemiro avec le Brésil ou Adrien Rabiot avec la France. Il doit y avoir plus de caractère et de dépassement de soi dans les rangs espagnols. A partir de ce moment, ils pourraient de nouveau commencer à rêver de titre. Espérons-le », conclut Michael Van Vaerenbergh.
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