Le Club NXT à travers la Belgique: «Les Pirates de Preud’homme» vont vers les jeunes
Transformer négligemment un désavantage en un immense avantage, c’est un art cruijffien. Le Club Bruges le fait avec ses Club NXT Cities à Merksem, Pamel et Berchem Sainte-Agathe. En un mot: si les jeunes ne viennent pas à Bruges, Bruges doit aller vers les jeunes. On l’a constaté de nos propres yeux lors de notre trip à Anvers, Bruxelles et dans le Pajottenland.
PAR STIJN VANDERHAEGHE
Club NXT, l’académie brugeoise, devient tout doucement une entité complètement autonome au sein du Club. Quiconque circule sur les routes flamandes rencontrera la garde bleu clair des plus jeunes – sept à onze ans – du CEO GuilianPreud’homme (trente ans). Aujourd’hui, ils serpentent sans relâche, ballon au pied, depuis Pamel dans le Brabant flamand rural à travers les contreforts nord-ouest de la région de Bruxelles-Capitale jusqu’au quartier anversois de Merksem. Les tentacules du champion national en titre s’étendent plus loin que jamais. En route vers le monde du football de demain, elles titillent savamment la concurrence avec un projet urbain tout à fait unique au regard des normes belges. «On a construit ces Cities sur l’audace et l’esprit de décision», dit-on. Après tout, l’avenir appartient à ceux qui entreprennent et qui osent. Et, pour rendre à César ce qui est à César, à cet égard, les Ouestflandriens n’ont de leçons à recevoir de personne ou presque.
Lorsqu’on s’entraîne à Bruges avec vingt garçons, chacun touche peut-être 500 fois le ballon. Mais si l’on s’entraîne à Anvers, par exemple, avec huit gamins, ils le toucheront 1.500 fois.» THOMAS PREMEREUR
Jusqu’à il y a cinq ans, les équipes de jeunes blauw en zwart étaient principalement composées de gamins de Flandre occidentale. Malgré toute la bonne volonté et le travail acharné, le credo désormais largement accepté du Club bluvngoan (aller de l’avant) sonnait un peu comme bluvnstoan (faire du surplace). Ça a sauté aux yeux de l’ancien coordinateur du recrutement, PeterVerbeke, qui est né et a grandi à Merkem, une petite entité du Westhoek. L’actuel directeur général du RSC Anderlecht, éternel rival, a confié à son bras droit de l’époque, ThomasPremereur (39 ans), la tâche impérative de changer cela rapidement. «Tu dois mettre en place quelque chose à Anvers et à Bruxelles pour qu’on puisse désormais recruter de très jeunes joueurs au niveau national», a-t-il exigé. Et plutôt hier qu’aujourd’hui, vous savez comment ça se passe dans ces milieux. Aujourd’hui, Premereur est donc coordinateur des Cities et superviseur social au sein du Club de son cœur.
Désavantage pour le recrutement
PascalDeMaesschalck, à l’époque responsable de la formation des jeunes au Club Bruges et aujourd’hui directeur du développement des jeunes à l’AS Monaco, lui a apporté de l’aide. «Un jour, il m’a parlé du magnifique projet des SC City Pirates à Anvers», se souvient Premereur. «Peu de temps après, je suis allé voir ça et le déclic a été immédiat. C’est donc à Merksem que se trouvent les germes des actuelles Club NXT Cities, où les joueurs des catégories U8 à U12 peuvent s’entraîner près de chez eux deux ou trois fois par semaine pendant l’année scolaire, plutôt qu’à côté du stade Jan Breydel comme leurs pairs de Flandre occidentale et orientale. Pendant la période de préparation, en juillet et août, tout se passe cependant à Bruges, afin que tout le monde – personnel et joueurs – ait l’occasion de faire connaissance avant le début de la saison. À partir des U13, nos garçons qui n’habitent pas dans les environs immédiats vont en internat à Bruges, où notre taux de réussite est d’ailleurs de 96%.»
Le CEO du Club NXT acquiesce de la tête. «Ça répond à l’objectif initial de Peter Verbeke: ancrer le Club Bruges dans l’intérieur du pays et rivaliser avec les équipes d’élite qui y sont basées», explique Preud’homme. «Tournez ou retournez ça comme vous le souhaitez, mais en raison de notre situation géographique, on a tout simplement un sérieux désavantage en matière de recrutement par rapport à ces clubs. Et plus les joueurs sont jeunes, plus il faut éviter de leur faire passer des heures en voiture quatre fois par semaine – pour trois entraînements et un match – pour aller et revenir de Bruges. La plupart des parents ne peuvent pas ou ne veulent pas non plus, ce qui est tout à fait naturel. On ne peut pas exiger ça de ces enfants, qui ont aussi des devoirs scolaires et peut-être d’autres hobbies. C’est impensable. Notre devise est: tout au plus une demi-heure en voiture, aller simple.»
Au tout début, Thomas Premereur se rendait lui-même à Merksem tous les jeudis soirs pour entraîner deux joueurs U8, qui s’entraînaient par ailleurs avec les Pirates. «Ce qui est formidable dans cette histoire, c’est que ces deux garçons jouent encore aujourd’hui au Club Bruges, avec les U14», dit-il avec une certaine fierté dans les yeux. Aujourd’hui, neuf joueurs au total s’entraînent là-bas. «Le projet fonctionne donc, c’est clair», constate Preud’homme. «À propos, je tiens à souligner une fois de plus que ces Cities ne sont pas des clubs partenaires ou quoi que ce soit de ce genre. On considère les terrains de Merksem, Pamel et Berchem Sainte-Agathe comme les terrains 13, 14 et 15 du stade Jan Breydel, où on a nos propres formateurs qui proposent les mêmes exercices que leurs collègues de Bruges. À partir des U10, les garçons des Cities se regroupent ici le mercredi pour s’entraîner ensemble. Ils sont amenés, puis ramenés chez eux en car.»
J’avais peur que des clans se forment le dimanche, lorsque les joueurs venus d’horizons différents se mélangent, mais il n’en est rien.» JONATHAN VAN BELLINGEN
De Diegem à Pamel en passant par Berchem Sainte-Agathe
«Dans la région de Bruxelles, on voulait lancer quelque chose de similaire et pour cela, j’ai frappé à la porte de Diegem Sport à l’époque, avec qui le Club avait déjà conclu un accord sportif», reprend Premereur. «Au départ, ça a également bien marché. Fin novembre, un joueur de la première génération a même pu goûter à un match amical avec l’équipe A (JessiDaSilva, quatorze ans, est entré en seconde période contre le VV Westkapelle, ndlr). Pourtant, la saison dernière, on a décidé d’y arrêter notre projet. Pourquoi? Parce qu’on passait à côté de notre objectif, à savoir atteindre le centre de Bruxelles avec Bruges. Le trafic intense sur le Ring a eu raison de nos efforts. Pour ceux qui vivent au cœur de Bruxelles, se rendre à Diegem trois fois par semaine en pleine heure de pointe n’est pas évident. En guise de boutade, on pourrait dire que c’était encore plus rapide de se rendre à Bruges.» Les Bruxellois préfèrent se diriger vers le Pajottenland. Au besoin, en empruntant longuement la morne chaussée de Ninove jusqu’à Pamel, une commune de Roosdaal, qui compte à peine 6.500 habitants. «Il y a quelques années, après un match de football en salle, j’ai rencontré par hasard BartEvens, qui s’est avéré être le cofondateur de l’académie de football Move2Improve», poursuit Premereur. «En termes de vision du football, on a immédiatement été sur la même longueur d’onde. De plus, leurs magnifiques infrastructures dans le centre de Pamel convenaient parfaitement aussi. Depuis la saison 2019/20, c’est là qu’est située notre troisième section Club NXT Cities et, avec actuellement 32 joueurs, c’est aussi la plus importante.» Aucun autre site n’est prévu pour l’instant. Le KRC Genk et le Standard de Liège, pour ne citer qu’eux, peuvent donc dormir sur leurs deux oreilles pour encore un moment..
Pendant ce temps, les Brugeois ont continué à avoir des visées sur Bruxelles. En effet, celui qui veut passer à l’étape suivante doit avoir une longueur d’avance sur la concurrence – pour ne pas citer Anderlecht, ce que les deux hommes évitent sciemment – ou au moins essayer de perturber celle-ci. «L’année dernière, à Bruxelles, j’ai frappé à la porte de plusieurs équipes, mais qui veut ouvrir au Club Bruges?» Premereur pose en souriant une question rhétorique. Mais la persévérance a fini par l’emporter. Un club qui a dû attendre désespérément un titre national pendant treize ans sait cela mieux que personne. En fin de compte, le club de football du FC Synergy Bruxelles, à Berchem Sainte-Agathe, s’est montré très intéressé par une collaboration avec les Blauw en Zwart.
Depuis septembre, sept joueurs du Club NXT y trouvent refuge juste à côté du siège de Volvo Car Belux pour leurs entraînements du lundi et du jeudi avec l’entraîneur KirstenBraet. Le mercredi, les sept magnifiques se retrouvent à Pamel où JonathanVanBellingen (31 ans) est aux commandes. Après avoir passé trois ans chez les jeunes de La Gantoise – la «Bataille des Flandres» fait vraiment rage à tous les niveaux – il est passé au Club NXT cette saison. «J’ai toujours admiré la façon dont le Club Bruges s’occupe de ses jeunes joueurs», déclare Van Bellingen. «Après quelques conversations avec différentes parties du club, il m’est apparu clairement que leur mission et leur vision étaient également les miennes. Seulement… J’habite à Denderhoutem en Flandre orientale, à quelque 80 kilomètres du stade Jan Breydel. La distance n’a jamais été un problème pour moi, mais c’est quand même un gros avantage de pouvoir travailler pour le meilleur club du pays, à 7,5 km à peine de ma porte. Au départ, j’avais un peu peur que, lorsque tous les joueurs sont mélangés le dimanche pour jouer les matches, il y ait des clans: les garçons de Pamel, ceux de Bruges, de Bruxelles, etc. Il n’en est rien. Dès le début, cette intégration de tous les différents groupes s’est étonnamment bien passée. Ça m’a vraiment surpris de manière positive. Le contact avec tous les autres entraîneurs se déroule également sans problème. On communique quotidiennement via WhatsApp et, après chaque match, on s’assied ensemble pendant un moment. Les Cities ne sont donc pas des mondes séparés de l’entité principale du Club NXT. C’est plutôt le contraire, en fait. C’est une machine bien huilée.»
La vision semble tourner principalement autour du travail individuel. «Les enfants doivent s’améliorer individuellement, pas l’équipe U8 ou U10 an en soi», précise Premereur. «Jusqu’à la catégorie U12, ces garçons doivent recevoir une formation aussi large que possible. Supposons que nous perdons contre Beveren un dimanche, mais que tous les joueurs ont occupé toutes les positions au moins une fois pendant le match, du gardien à l’attaquant. Ça signifie qu’ils sont bien formés. La victoire viendra plus tard. C’est simple: si vous vous entraînez avec vingt garçons à Bruges, chacun touchera le ballon 500 fois. Mais si vous vous entraînez à Anvers, par exemple, avec huit gars, ils le toucheront 1.500 fois. Ça correspond parfaitement à notre vision d’un maximum de situations de trois contre deux à l’entraînement. On attache également une grande importance à ce qu’un enfant fait en dehors du terrain. On ne se contente pas d’apprendre à un garçon de huit ans à jouer au football, on veut aussi le préparer à la société par le biais de coaches scolaires – l’école est plus importante pour nous que le football -, de coaches mentaux, de psychologues, de nutritionnistes, de travailleurs sociaux, etc. On ne veut rien laisser au hasard. Traduit librement, ça ressemble à «nosweat, noglory» la devise du Club. L’équivalent anglais de bluvngoan. «On inculque ces normes et ces valeurs dès le départ», ajoute Preud’homme. «En dehors de l’aspect sportif, la famille passe avant tout, on se soucie les uns des autres, les intérêts de l’équipe priment sur les intérêts personnels, la discipline, le respect, l’autonomie, la ponctualité aussi. Ça ne doit pas rester des paroles en l’air.»
Cohésion sociale
Le long de la ligne de touche du terrain en gazon artificiel de Pamel, vers la fin de la séance d’entraînement d’une heure et demie, quelques parents bravent encore le froid glacial. «La perspective de s’entraîner avec un petit groupe dans un club de haut niveau relativement proche de notre domicile à Opwijk a rapidement levé le moindre doute», déclare EstherPoelman (42 ans). Elle est la mère de PimWaegenaer (U9), qui a joué à l’Eendracht Alost jusqu’à la saison dernière. «L’intensité des entraînements est clairement plus élevée ici, mais l’adaptation s’est faite en douceur. En partie grâce à l’arrivée de certains des coéquipiers de Pim.» Les «Alostois» OrazioBaldassarre de Lebbeke et JaimyVanderkluysen de Lembeek, qui s’entraîne à Berchem Sainte-Agathe les lundis et jeudis, sont également passés d’un club à l’autre. «Le complexe Synergy est proche de la sortie d’autoroute, est facilement accessible et dispose d’un grand parking», ajoute ShannaMichiels (38 ans), la maman de Jaimy, à Berchem Sainte-Agathe. La seule chose qui me manque ici, c’est une cantine où les parents peuvent travailler un peu pendant les entraînements. Ce qu’il y a à Pamel, où Jaimy s’entraîne le mercredi, par exemple.»
À cause de notre situation géographique, nous sommes confrontés à un sérieux handicap en matière de recrutement.» GUILIAN PREUD’HOMME
Ce que confirment pleinement MathieuNeirinck (37 ans) et AlexandraVerbrugge (36 ans) de Wemmel, les parents de Florian (U9) qui, jusqu’à la saison dernière, jouait encore au niveau provincial avec la Juve Mollem à Asse: «Pour beaucoup de parents, ça s’assimile en effet à un kiss and ride ici, mais ça n’enlève rien au reste de la formation. Dès le premier jour, il était clair que l’on rejoignait un institut de football doté d’une méthode d’entraînement et d’une vision très claires en termes de formation, tant sur le plan physique que mental. Au cours des derniers mois, notre fils a déjà fait de grands progrès à cet égard. En outre, il est également agréable de constater que le favoritisme n’a pas sa place. Les jours de match, tous les joueurs sont divisés en trois groupes et ont souvent un entraîneur différent de «leur» entraîneur spécifique des Cities, mais ils ont tous la même attitude professionnelle. Tous les enfants sont traités de la même manière.» JoolzVanderhaeghe (U9) a également joué au niveau provincial la saison dernière avec l’équipe fusionnée de Dilbeek, Boka United. «Son intégration s’est faite en douceur, car la saison dernière, il s’était déjà entraîné une fois par semaine, le lundi soir, avec le Club NXT à Pamel pendant six mois, et il était parfois appelé pour un match ou un tournoi», explique sa mère, KatrienVermeersch (44 ans), d’Itterbeek. «De cette façon, l’enfant a bien assez de temps pour se demander s’il est prêt pour un tel changement, ce qui, à bien des égards, est le cas en fin de compte. Le Club NXT n’a exercé aucune pression. Après une présentation tout aussi complète et bien informée du fonctionnement du projet Cities, nous, parents, avons eu le temps de peser le pour et le contre. En fin de compte, on a laissé Joolz décider par lui-même et il était tout à fait prêt à se lancer dans l’aventure.»
Grande famille
BennyDeSutter (37 ans) et LindsayMatthys (35 ans), les parents de Maxim (U8), originaire d’Hekelgem, sont des supporters purs et durs du Club Bruges. «Mais sans un projet Cities à proximité, notre fils n’aurait jamais, au grand jamais, joué pour son équipe favorite à cet âge», affirment-ils. «Avec l’école et notre travail, il est tout simplement impossible de se rendre en voiture en Flandre occidentale trois fois par semaine. Il serait donc resté au FCV Dender EH. Heureusement, il a maintenant le meilleur des deux mondes ici à Pamel. Le fait que les garçons des Cities sont toujours entraînés par le même entraîneur pourrait être un inconvénient. Comprenez-moi bien: tous les entraîneurs du Club NXT sont aussi bons et motivés les uns que les autres, donc au niveau footballistique, ça ne fait aucune différence, mais pour les garçons de cet âge, il pourrait être utile d’apprendre à composer avec des caractères différents au niveau des entraîneurs.»
Sur une grande bâche le long du terrain du SC City Pirates à Merksem, on peut lire «Nous sommes les pirates d’Anvers», avec NXT Cities à côté en grosses lettres et une grande tête de pirate souriante avec le message latin «VelleestPosse», c’est-à-dire: vouloir c’est pouvoir. Le terrain synthétique se trouve à l’ombre du solennel château de Roosendael, mentionné pour la première fois à la fin du XVe siècle. Des fantômes semblent devoir surgir du bâtiment éclairé la nuit. Difficile de trouver un meilleur cadre pour un terrain de football rempli de pirates, où l’entraîneur DaniWilms (24 ans) joue le rôle du capitaine Jack Sparrow. L’un de ces City Pirates bleu et noir est l’ancien joueur de l’Antwerp Seth (U10), fils d’AviBollengier (41 ans) de Schoten. «Le fait, en tant que parent, d’être abordé par quelqu’un comme Thomas Premereur, qui après tout a amené un grand talent comme CisseSandra au Club Bruges, ne peut être que flatteur», dit-il. «De plus, j’ai vite remarqué qu’il ne vend pas que des paroles. Lui et, par extension, les entraîneurs tiennent leurs promesses: leur préoccupation première est la progression de chaque joueur, et ce dans un environnement footballistique agréable, avec des chauffeurs et des délégués d’équipe également très dévoués. C’est aussi digne d’éloges. Leur approche fait en sorte que l’on se sente immédiatement très bien accueilli ici, le Club NXT est une grande famille. Ce qui n’est pas sans importance après tout, car en tant que joueur, mais aussi en tant que parent, vous passez d’un entraînement dans un groupe beaucoup plus important à un petit cadre intime.»
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