La saison de Feyenoord sous la loupe: de la culture américaine à une finale européenne
Chaque jour, Sport/Foot Magazine s’intéresse de plus près à un club étranger de premier plan. Nous faisons le bilan de la saison écoulée et envisageons les défis à venir. Ce mercredi, nous nous arrêtons dans la cité portuaire néerlandaise où les pensionnaires du Kuip ont disputé une saison pleine, ponctuée par une finale européenne.
Forces et faiblesses
Feyenoord n’a pas réalisé une saison exceptionnelle sur la scène nationale. Il a terminé troisième, avec douze points de retard sur le champion Ajacide. Il a même pu se permettre de perdre contre le quatrième de l’Eredivisie, le FC Twente, lors de la dernière journée de compétition. Dans leurs confrontations contre l’Ajax, les Rotterdamois ont connu deux fois l’éche, mais ils ont obtenu un quatre sur six contre le PSV. C’est surtout contre les équipes du milieu de tableau que Feyenoord a perdu quelques unités évitables.
En coupe, l’aventure n’aura duré qu’un seul match. Contrairement à d’autres fois, Feyenoord a manqué de réalisme contre le FC Twente qui en a profité pour l’éliminer.
Sous la direction d’Arne Slot, Feyenoord est une équipe qui aime être en possession du ballon et marquer sur des attaques placées. Elle ne voulait pas non plus jouer dans sa propre moitié de terrain. Le football offensif et l’énergie d’Arne Slot ont fait de Feyenoord une équipe agréable à regarder parce qu’elle jouait plus sur ses forces que ses faiblesses. Contrairement aux deux autres membres du top 3, l’infimerie du Kuip est restée plutôt vide pendant l’ensemble de la saison.
Avec une nouvelle « culture sportive américaine », les joueurs devaient s’améliorer chaque jour et continuer à travailler sur leurs fondamentaux. Pour les motiver à en faire un peu plus que leurs adversaires, la « Coupe de la récupération » a été mise en place. Ce trophée fictif permettait aux joueurs d’obtenir des points et des prix s’ils travaillent activement à leur récupération. Orkun Kökçü est l’un de ceux sur qui cette nouvelle façon de travailler a eu une grande influence, comme il l’avait confié à AD. « Avant cette saison, j’avais souvent l’impression d’être épuisé et de ne pas être capable de pouvoir disputer l’intégralité d’une rencontre. Et je vais être honnête maintenant. Je n’étais tout simplement pas assez en forme les années précédentes. Cela a changé », explique l’international turc.
Cette année, l’équipe est également devenue un véritable collectif. Bryan Linssen a même parlé d’une famille après le match à Marseille. Cette mentalité et cette atmosphère a permis à Feyenoord de rester uni même lorsque la pression était forte. Cela explique sans doute comment, le club a pu atteindre la finale de la Conference League.
En Coupe d’Europe, Feyenoord a connu une saison de rêve. La campagne avait commencé assez tôt, le 22 juillet à Drita, au Kosovo, lors du deuxième tour de qualification. Elle s’est conclue par une finale à Tirana, en passant par Lucerne, Haïfa, Prague, Berlin, Belgrade, Prague de nouveau et Marseille. Si les pensionnaires du Kuip n’ont pas remporté la première édition de la dernière née des compétitions européennes, ils ont cependant retrouvé une vraie identité de jeu, qui a séduit bon nombre d’observateurs.
La performance des Rotterdamois permet aux Pays-Bas de bien remonter au ranking UEFA et ils peuvent même commencer à espérer dépasser la France. Feyenoord avait dans ses rangs, le meilleur buteur de la compétition Cyriel Dessers, mais aussi des joueurs importants comme Luis Sinisterra, Lutsharel Geertruida, Gernot Trauner et Tyrell Malacia . Ces derniers ont tous été nommés dans l’équipe de la saison.
Lors de cette Conference League, Slot a presque battu un record néerlandais en alignant 32 joueurs différents sur l’ensemble de la compétition. Personne n’a non plus joué les dix-huit matches de la campagne.
L’entraîneur: Arne Slot
L’architecte du nouveau Feyenoord était Arne Slot. Lors de sa nomination, on se demandait si son style très porté sur l’offensive conviendrait à cette équipe, mais il a rapidement su imposer ses idées. Lors de son premier jour au Kuip, il a affirmé que le plus grand défi était « d’amener les joueurs à effectuer de nouvelles tâches à un niveau élevé ».
L’animation où les attaquants chassent inlassablement la défense de l’adversaire était presque la philosophie inverse de son prédécesseur Dick Advocaat. Le nouvel entraîneur a été engagé pour que l’équipe développe enfin le football offensif dont rêvent le club et les supporters. Guus Til, qui a joué sous la direction de Slot à l’AZ, a été engagé. Feyenoord dispose d’un budget limité sur le marché des transferts. Le directeur technique Frank Arnesen est conscient qu’il est donc difficile d’attirer de grands noms, mais il a réussi à dénicher des éléments relativement inconnus comme Fredrik Aursnes et Gernot Trauner , qui ont permis que le départ de Steven Berghuis ne se constate pas trop.
Slot a également relancé ceux qui étaient déjà en place, comme par exemple en replaçant son plus talent, Kökçü, à un nouveau poste. Sous la direction d’Advocaat, l’international turc a joué avec plus ou moins de succès en tant que milieu offensif, mais cette saison, il a excellé en tant que milieu défensif. Malgré ce recul dans l’échiquier, Kökçü a marqué neuf buts et délivré autant de passes décisives. On le sent aussi beaucoup plus heureux sur le terrain. « Le numéro 10 est seulement sur mon maillot. Le rôle de contrôleur au milieu de terrain, c’est ma position. Je suis donc plus impliqué dans la préparation. J’avais l’habitude de vouloir faire des actions folles parce que les joueurs qui en étaient capables étaient mes préférés. Désormais, je regarde beaucoup plus de vidéos d’Andrès Iniesta et j’ apprécie beaucoup plus qu’avant ce type de joueur », avait-t-il confié à AD.
Sur le plan tactique, Sinisterra a bénéficié de tout l’espace nécessaire à la réalisation ses actions individuelles, ce qui s’est traduit par 23 buts. Ls adversaires ont aussi été dépassés par la force de Bryan Linssen et Cyriel Dessers.
L’entraîneur a une vision très clair pour l’équipe et a été dur avec son groupe quand c’était nécessaire. Par exemple, il n’a pas hésité à remettre le capitaine Jens Toornstra sur le banc quand il a été moins performant. Grâce à une communication claire, le noyau sait ce que l’on attend de lui et les remplaçants se montrent également positifs à l’égard de leur entraîneur.
La campagne européenne de Slot s’est déjà inscrite dans les livres d’histoire des Rotterdamois. Avec dix-neuf matches européens, il a égalé Václav Jezek, qui a dirigé le club entre 1978 et 1982, et tous deux ont également remporté douze matches. Seul Bert van Marwijk (35 matches) a entraîné et gagné plus de matches (14).
Joueur de la saison : Luis Sinisterra
Cyriel Dessers a été d’une importance capitale pour Feyenoord sur la scène continentale. Ses dix buts lui ont permis de devenir le meilleur buteur de la compétition et il a été décisif pendant le tournoi, notamment lors de la demi-finale contre l’OM. En Eredivisie, il est resté plus souvent le banc de touche, mais ses neuf buts ont permis au club de prendre des points dans les dernières rencontres.
Luis Sinisterra a excellé aussi bien aux Pays-Bas qu’à travers l’Europe. Le Colombien porte les couleurs de Feyenoord depuis plusieurs années maintenant, mais ses statistiques n’ont jamais été aussi brillantes que cette saison. En Conference League, l’ailier a marqué à six reprises lors des qualifications et à six autres lors du tournoi principal comprenant la phase de poule et à élimination directe. En Eredivisie, il était presque toujours titulaire et a trouvé le chemin des filets à douze reprises. Grâce à ses performances européennes, il a été élu meilleur jeune joueur de la Conference League.
Il faut aussi évoquer le cas de Gernot Trauner. Le milieu de terrain n’est pas celui qu’on voit le plus sur un terrain, mais il a été d’une grande importance pour ses couleurs en aidant certains de ses partenaires à mieux jouer. Son style de jeu prudent et sobre, lui vaut le surnom de « pharmacien ». Trauner ne veut pas être une star, il préfère mettre ses opposants en difficulté en jouant en une ou deux touches de balle. Slot considérait l’Autrichien comme un « game changer ». Il voit les solutions plus tôt que quiconque. Il a besoin de peu de contacts avec le ballon pour le faire avancer et il peut facilement déplacer le jeu de gauche à droite’. En 30 matches d’Eredivisie et 15 matches européens, il n’a donné qu’une seule passe décisive, mais il est devenu le moteur de l’équipe.
Le futur
L’été s’annonce mouvementé au Kuip, car de nombreux joueurs sont pistés par grandes équipes après cette superbe campagne européenne. Conserver tout le noyau sera une tâche impossible pour Frank Arnesen. Les finances ne sont pas extraordinaires et le club a besoin d’effectuer des ventes lucratives.
La question n’est pas de savoir si Tyrell Malacia va partir, mais vers laquelle des douze équipes intéressées. Bryan Linssen a confirmé qu’il pourrait partir au Japon, mais ce n’est pas encore acté. Orkun Kökçü et Luis Sinisterra bénéficient également de l’intérêt de nombreux cercles étrangers. Marcos Senesi dispose d’encore un an de contrat, mais il n’y a pas eu de nouvelles négociations depuis un certain temps. Il devrait donc aussi probablement partir. L’option d’achat prévue dans le contrat de l’ancien Anderlechtois Philippe Sandler ne sera pas levée. Il partira donc après seulement… 51 minutes de jeu à son compteur.
Le club dispose d’un budget limité et a donc commencé à engager des joueurs. Cyriel Dessers ne reste pas et Reiss Nelson va retourner à Arsenal. Guus Til aimerait prolonger son séjour, mais son salaire est une pierre d’achoppement. Les Rotterdamois avaient loué Marouan Azarkan qui a joué un rôle important dans la promotion de l’Excelsior. Un retour au Kuip est donc une option.
Feyenoord a déjà acquis gratuitement l’attaquant brésilien de l’Ajax, Danilo. Il faudra transférer d’autres joueurs si certains partent sous d’autres cieux, car les réservistes ne sont pas nombreux. Cette saison, c’était déjà un problème lorsqu’un défenseur manquait à l’appel. Arnesen devra prouver qu’il peut vendre des joueurs pour des dizaines de millions et aussi attirer de bons remplaçants qui disposent d’une valeur marchande qui peut fortement augmenter.
Si le noyau devait subir beaucoup de modifications dans les prochaines semaines, il reste comme lueur d’espoir, la capacité de Slot à mettre sur pied un collectif efficace à la vitesse de l’éclair. Dans ce cas, il ne serait pas impossible de vivre une autre belle saison dans la cité portuaire.
Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici