Swann Borsellino
La chronique de Swann Borsellino : une D1A+
Pour juger de la qualité d’un championnat, il est souvent plus utile de regarder « l’autre match » que « LE match ». D’une, parce que souvent, notamment lorsqu’il s’agit d’un derby ou d’un classique, le sportif, le ballon, est souvent remplacé par du combat où l’intensité physique ne réside pas dans l’appel à haute intensité ou la passe bien appuyée, mais dans le duel. Ensuite parce que l’enjeu anesthésie bien souvent la spontanéité, rendant les plans de jeu limpides lors de semaines lambdas finalement assez flous. C’est donc avec une certaine impatience que j’attendais le Charleroi – Bruges de ce samedi. Parce que l’on apprend ce qu’une grande équipe a dans le ventre le lendemain de ses veilles européennes. Parce que ce Charleroi-là a quelque chose en plus. Parce que c’est important pour la Pro League d’avoir plusieurs gros matches chaque semaine et que celui-là a clairement répondu à nos attentes.
La cohérence, la répétition de matches de qualité avec une vision claire vous rapporteront toujours plus de points.
Les supporters des Zèbres ne s’y sont pas trompés. Accueil de Ligue des Champions pour Bruges, entre le bruit et la pyrotechnie. Accueil très clair d’ Edward Still: ça sera les yeux dans les yeux ou rien. Une philosophie qui m’amène à prendre un peu de recul sur ce match, pour parler de la Pro League en général. Il y a eu le contre-exemple Beerschot. Qui m’avait accueilli avec la folie Losada, ode au football inconscient, puis avec l’autre Still, Will, dans un football qui me parlait, pour finalement opter pour Peter Maes avec le succès que l’on a connu. Aujourd’hui, en Belgique, on s’est ouvert l’esprit. Avec du Wouter Vrancken, du Brian Priske, de l’ Alexander Blessin, pour ne citer qu’eux. En France, la même chose apparaît, avec une conséquence directe pour la Ligue 1. L’émergence de coaches comme Franck Haise à Lens, Pascal Gastien à Clermont ou encore de Laurent Battles à Troyes ont eu deux effets très nets: permettre aux anciens, pas forcément moins brillants, il faut le rappeler, d’être bousculés dans leurs principes, leurs méthodes de travail et leurs routines. Faire de matches autrefois sans histoire des parties qui suscitent l’intérêt de tous. Dans une France du foot qui peinait à faire confiance aux nouveaux et redoutait les étrangers, l’ouverture d’esprit à parfois permis de combattre le manque de sous. Les idées ne font pas les millions, mais elles permettent quand même de livrer une bataille.
Ce qui m’amène évidemment à revenir à celle livrée au stade du Pays de Charleroi, où d’épatantes individualités ont été au service d’un collectif qui, au mieux, aura été mal payé, au pire, a passé une nuit de samedi pleine de regrets. Certes alignés dans une zone où Mats Rits aura été bien seul lors des 45 premières minutes, Zorgane, Morioka et Ilaimaharitra ont été bons, chacun dans leur registre, permettant à leurs coéquipiers de bien négocier les transitions tant désirées, avec le dernier geste comme seule vraie frustration. L’efficacité, « une règle dans le foot » selon Edward Still, qui en bon amateur de datas, saura également donner l’importance nécessaire aux nombreuses occasions des Zèbres, aux 17 frappes au but, aux parades de Mignolet, mais également au niveau physique.
De Charleroi, on connaît les départs qualitatifs, mais celui-ci ne ressemble en rien à celui de l’année dernière. De l’interview post-match de Still, je garde le « On a perdu en étant nous ». Une affaire d’identité. Une identité, mais aussi de principes de jeu, d’étapes. Le coach sait que son équipe ne peut pas tenir la possession face à Bruges, mais il sait très bien ce qu’il peut faire et, plus important, où il veut l’emmener. Un plan de route que les joueurs, le capitaine en tête, on bien inscrit dans leur GPS et qui est la meilleure garantie pour proposer quelque chose de cohérent. Et c’est bien cette cohérence qui apporte les résultats et pas le contraire. La cohérence, la répétition de matches de qualité avec une vision claire vous rapporteront toujours plus de points, peu importe les quelques bas qui viendront perturber les hauts. Et à ce petit jeu-là, puisque je vous ai dit que pour juger de la qualité d’un championnat, il fallait regarder « l’autre match », les observateurs D1A ont plein de raison d’être enthousiastes. Il suffit de regarder la colonne de droite et de commencer à réfléchir à qui va jouer le maintien. Le niveau est plus dense, les équipes plus difficiles à battre et le championnat promet, à tous les niveaux.
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