Guillaume Gautier
La chronique de Guillaume Gautier| Lukaku est-il le privilégié de Tedesco?
Pas repris pour le rassemblement de septembre afin de se concentrer sur son intégration à Naples, Romelu Lukaku semble toujours avoir les faveurs de Tedesco après un Euro raté.
Romelu Lukaku est un grand fan de basket américain. De cette NBA où l’on compte les points comme des trophées. Alors, le meilleur buteur de l’histoire de la Belgique fait attention aux chiffres. Surtout aux siens. Comme une encyclopédie de son sport, il conclut donc logiquement sa première sortie sous le maillot du Napoli par un but et une stat, glissée l’air de rien: «Je marque toujours pour mes débuts. Il semble que ce soit une bonne habitude dans ma carrière.» Romelu le sait: de West Bromwich Albion à Chelsea en passant par Everton et l’Italie, sa première apparition sous un nouveau maillot fait souvent trembler les filets adverses. Deux entraînements et une relation privilégiée avec le coach Antonio Conte, artisan de la meilleure saison de sa carrière sous le maillot de l’Inter, lui ont suffi pour faire basculer la rencontre et alimenter le marquoir en trente minutes contre Parme.
Tous les entraîneurs rêvent d’un rapport privilégié avec leur buteur. Romelu Lukaku, lui, a besoin de se sentir aimé pour briller. Ce n’était pas le cas avec Marc Wilmots, qui lui préférait souvent Christian Benteke et l’avait rapidement désavoué lors du Mondial brésilien pour lancer sa trouvaille Divock Origi. Ce fut immédiatement l’histoire d’amour avec Roberto Martínez, sous les ordres duquel «Big Rom» planta 51 buts en 53 apparitions diaboliques. Cela devait aussi être le cas avec Domenico Tedesco. Le coach a confié à Lukaku le statut de vice-capitaine, d’abord partagé avec Thibaut Courtois puis occupé en solitaire depuis la querelle entre le gardien du Real Madrid et le sélectionneur des Diables. Surtout, il l’a confirmé sans équivoque dans le statut d’attaquant titulaire. L’absence de Kevin De Bruyne pour l’ensemble de la campagne qualificative à cause de blessures l’a même mué en leader naturel de la nouvelle génération, et en moteur offensif d’une équipe qui semblait plus que jamais avoir besoin de lui pour gagner.
En onze apparitions avant le coup d’envoi de l’Euro, Romelu Lukaku semble alors plus épanoui que jamais. Dix-sept buts et deux passes décisives, la feuille de stats est gargantuesque. Si tout s’effondre sur les prés allemands, avec quatre matchs sans le moindre but, la confiance de Domenico Tedesco reste intacte, laissant son buteur asséché sur le terrain jusqu’à la dernière minute du tournoi malgré une méforme et une crise de confiance croissantes. Le privilège de ceux qui ont prouvé par le passé qu’ils étaient capables de marquer à tout moment, dans une équipe en mal de buts, sans doute.
Le statut de Romelu Lukaku est décidément à part. La dernière sélection de Domenico Tedesco le prouve encore, lui qui a expliqué avoir parlé avec «Big Rom» et le laisser s’intégrer au Napoli plutôt que l’amener en Belgique pour les matchs de Ligue des Nations contre Israël et la France. L’épisode Thibaut Courtois ne racontait-il pas, pourtant, une Belgique où le temps des privilèges de l’ère Martínez était révolu?
Là où beaucoup aiment le décrire comme un ordinateur humain, Domenico Tedesco traite Lukaku avec le cœur. Peut-être parce qu’il a vu en Allemagne qu’un buteur sans confiance n’alimente plus les lignes de statistiques.
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