Guillaume Gautier

La chronique de Guillaume Gautier | Charleroi-Standard, image d’un foot wallon où plus personne ne gagne

Guillaume Gautier Journaliste

Les amateurs de football wallon ont plongé dans l’ennui lors du duel entre Zèbres et Rouches. Le symbole de bastions du sud qui regardent de plus en plus dans leurs rétroviseurs.

C’était le 20 mai 2018. Une semaine après avoir effleuré le titre au prix d’une remontée fantastique, le Standard conclut sa saison par un triste nul blanc dans le Pays Noir. Toute la lumière est prise par Ricardo Sá Pinto, coach portugais des Rouches qui lit une lettre écrite à l’attention de la presse et de ses dirigeants, prêts à le remplacer par Michel Preud’homme malgré une fin de saison aboutie. Plus de six ans plus tard, l’histoire retient pourtant autre chose: ce duel entre Carolos et Liégeois est le dernier souvenir d’un choc wallon joué dans le cadre des play-offs 1. Encore rivaux des grosses machines du nord du pays ou de la capitale voici quelques saisons, Charleroi et le Standard ne boxent désormais plus dans la même cour que les grands bastions belges. Leur concurrence directe ne s’appelle plus Anderlecht, Bruges ou Genk. Aujourd’hui, les adversaires de leur calibre semblent être devenus des clubs comme Malines ou Westerlo. Le 30 novembre, dans le Pays Noir, le match entre Zèbres et Rouches n’a jamais enthousiasmé les spectateurs, le scénario d’une égalisation tardive suffisant à peine pour ajouter un peu de piment à un affrontement footballistique d’une fadeur inquiétante.

Un étage plus bas, le tableau du football wallon est aussi terne que les 90 minutes du samedi soir. A l’exception notable de la RAAL, coleader de Challenger Pro League construit sur un modèle entrepreneurial qui rappelle la logique des meilleurs clubs flamands, aucun des autres bastions du sud ne se trouve dans la première partie de tableau du championnat. Ni le RFC Liège ni Eupen, et encore moins Seraing et les Francs Borains ne semblent en mesure de jouer à terme les premiers rôles, les deux derniers devant déjà lutter pour éviter un retour à l’échelon amateur du football belge.

Les raisons sont évidentes: le football est devenu une grosse machine où des professionnels de secteurs aussi pointus que l’analyse de données ou les sciences du sport ont pris une importance croissante. L’encadrement des joueurs est, lui aussi, de plus en plus professionnalisé pour les mettre dans des conditions optimales de performance, y compris quand ils évoluent à des milliers de kilomètres de chez eux, éloignés de leur famille alors qu’ils sortent parfois à peine de l’adolescence. Au Standard, lors des dernières années de gloire, Christian Luyindama avait expliqué qu’il se nourrissait de gâteaux et de sodas quand il s’ennuyait chez lui dans son appartement. Des déclarations soigneusement glissées sous le tapis, illustrant pourtant à merveille le manque de professionnalisme régnant dans les clubs wallons, le cas étant loin d’être isolé dans les clubs du sud du pays. A l’époque, quand la course au football scientifique n’avait pas encore atteint la plupart des centres d’entraînement, on pouvait gagner beaucoup de matchs sans être à la pointe. Aujourd’hui, c’est devenu de plus en plus difficile. En Wallonie, faute de moyens pour certains ou de culture de la performance pour d’autres, tout le monde ne semble pas encore l’avoir compris.

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