Guillaume Gautier
La chronique de Guillaume Gautier| Au lieu de virer Pocognoli, l’Union l’a aidé
Sébastien Pocognoli est toujours le coach de l’Union malgré un début de saison difficile. La preuve que le club bruxellois analyse tout dans les moindres détails.
Bien placé dans la hiérarchie des sentences qui prennent d’assaut le jargon du journalisme sportif, un dicton dit qu’à l’automne, les entraîneurs tombent comme des feuilles. Puisque même en 2024, certains clubs se dirigent encore avec des proverbes, on aurait pu craindre le pire pour Sébastien Pocognoli, ancien latéral gauche qui vit sa première expérience de coach chez les adultes à la tête de l’Union Saint-Gilloise. Avant de recevoir Genk, autoritaire leader du championnat, les Bruxellois présentaient un triste bilan de seize points récoltés sur 39 possibles. Après treize journées, les trois saisons précédentes s’étaient bouclées à 28, 28 et même 31 points pour les Jaune et Bleu. Un peu peu, donc, le bilan de «Poco».
Pour beaucoup de dirigeants, un départ raté sous les ordres d’un coach inexpérimenté aurait précipité la décision. Pocognoli aurait dû céder sa place à un entraîneur chevronné, peut-être même un homme à poigne pour redresser le vestiaire. Les joueurs auraient affiché leur soutien en interview, affirmant que ce n’est pas l’entraîneur qui marque les buts et qu’ils devaient regarder dans leur assiette. Sans doute même que dans le milieu, la majorité des suiveurs et des analystes auraient trouvé ça normal.
L’Union Saint-Gilloise est différente. Inspirée par le modèle du club anglais de Brighton, elle accorde énormément d’importance aux sentences chiffrées. Celle des expected goals, surtout. Plutôt que le résultat, la donnée permet de mesurer la performance en calculant la qualité des occasions créées et celle des opportunités concédées. Comme Brighton en Premier League, l’Union a toujours été une référence en matière de production offensive et de protection défensive depuis son retour parmi l’élite. Cette saison ne déroge pas à la règle: avec 23,5 xG (expected goals) créés, les Bruxellois sont la troisième menace offensive du championnat derrière Bruges et Genk. Les 15,4 xG concédés font également d’eux la deuxième défense la plus robuste, juste derrière Oud-Heverlee Louvain (OHL). Avec une différence de xG pointée à +0,58 par match, l’Union se hisse sur le podium du ratio créé/concédé, derrière Genk et Bruges. Certes, le classement prouve que quelque chose coince, mais ce n’est pas sur le banc que se trouve le problème.
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Les chiffres offensifs interpellent. Dix-sept buts seulement, dans la foulée du carton contre Genk (4-0) avec 23,5 xG créés. Pareil en Coupe d’Europe, où les 5,4 expected goals n’ont rapporté que deux buts. Les Saint-Gillois souffrent devant, et ont décidé de chercher un remède. L’ancien Diable Rouge Kevin Mirallas est arrivé pour coacher les attaquants, appliquant ainsi la recette de l’entraîneur spécifique déjà maintes fois utilisée à Brighton. De quoi faire progresser un secteur offensif qui sous-performe: à eux quatre, Fuseini, David, Ivanović et Rodríguez n’ont marqué «que» onze buts en championnat, avec 15 xG créés.
Beaucoup auraient viré leur coach. L’Union a agrandi son staff. Un choix guidé par l’analyse rationnelle plutôt que par un élan émotionnel. Ça vous semble normal? En football, un tel raisonnement reste pourtant une exception. Jusqu’à ce qu’on en écrive un dicton.
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