Hein Vanhaezebrouck: « Le nouveau format, c’est beaucoup mieux. Beaucoup de clubs risquent de descendre et vont devoir se battre » (entretien)
Entraîneur le plus expérimenté de Pro League, Hein Vanhaezebrouck a accepté de donner de son temps précieux pour rembobiner la VHS. Des turpitudes financières de son Gand actuel à ses débuts à Courtrai, qu’il avait mené parmi l’élite en 2008, en passant par l’évolution du championnat le plus «lourd» d’Europe.
Visioconférence en polo, short et claquettes: Hein Vanhaezebrouck facture peut-être 59 printemps, figure probablement au crépuscule de sa carrière, mais reste malgré tout un homme de son époque. À la mi-juillet, depuis le camp de base estival des Gantois, installés pour une semaine dans les environs d’Alkmaar, aux Pays-Bas, l’entraîneur fait le bilan. Calmement. Avec précaution, souvent. Parce que le natif de Courtrai – «il n’y avait pas d’hôpital à Lauwe, ma ville d’origine», rappelle-t-il –, consultant sur les plateaux télés de Flandre et de francophonie, ne se livre pas à son premier exercice médiatique et connaît pertinemment la puissance des mots. Leurs conséquences aussi, au sein d’un milieu déjà aseptisé, où tous les acteurs semblent se tenir par les dossiers. Alors, tel un vieux singe, Hein s’applique à ne pas toujours préciser le propos, les montants des transferts ou des salaires, les noms des intermédiaires. Pas même les souvenirs qui remontent au siècle dernier. Ce serait superflu. Quitte à ne raconter qu’une partie de l’histoire – une écrasante victoire 5-1 contre La Gantoise, en quarts de finale de la Coupe de Belgique version 2008, mais pas le 4-0 éliminatoire enregistré au retour – et à parfois répondre à côté des questions posées. Car si l’ex-technicien du KV Kortrijk n’a pour autant rien perdu de sa franchise, il se sent surtout plus à l’aise sur son propre terrain. Celui du tableau noir, des fenêtres de transferts grandes ouvertes, parfois dans la «survie» que la situation financière impose ; celui de son port d’attache, sa véritable maison, le KAA Gent, qu’il a guidé vers ses plus belles heures de gloire et où il entame sa septième et possible ultime saison. Le lundi suivant l’entretien, en pleine présentation de sa nouvelle équipe dans le centre-ville de Gand, il annoncera la nouvelle et jettera un froid sur le peuple buffalo, paré de bleu et blanc: tonton Hein souhaite «profiter doublement» de ce moment qui pourrait bien être le dernier du genre. «Je ne pense pas encore à la retraite, je ne sais pas combien d’années je vais encore travailler», lâchait-il deux jours plus tôt, en se levant de sa chaise. Au fond, Hein Vanhaezebrouck reste à l’image de ses équipes: sympathique à regarder, mais difficile à apprivoiser.
Le nouveau format, c’est beaucoup mieux. Beaucoup de clubs risquent de descendre et vont devoir se battre.» HEIN VANHAEZEBROUCK
Vous êtes l’entraîneur en activité qui comptabilise le plus de rencontres sur un banc de première division. Qu’est-ce que cela vous inspire?
HEIN VANHAEZEBROUCK: C’est bien. Dans une carrière, il y a des bons moments et des moments parfois difficiles. Certains entraîneurs commencent bien, mais disparaissent après quelques années aussi. Personnellement, je suis content parce qu’avec tout ce que j’ai vécu, dont un moment de repos (à la suite de son passage à Anderlecht, ndlr), je suis toujours là. Ça fait un bon bout de temps. Je n’ai pas commencé très tôt, j’ai dû attendre mes 36 ans et la fin de ma carrière de footballeur, mais j’ai beaucoup appris. J’ai travaillé comme adjoint, responsable du scouting, de la formation des jeunes… Tous ces rôles étaient différents et ils m’ont vraiment aidé à construire une vision, une manière de travailler, une idée de la façon dont je vois le foot, comment je peux le transmettre à mes joueurs. Et ça a plutôt bien marché…
«Courtrai 2007-2008, c’est peut-être l’une des meilleures équipes que j’ai eu»
Vous vous êtes souvent défini comme un autodidacte. Il y a forcément quelqu’un qui vous a inspiré…
VANHAEZEBROUCK: Non, pas vraiment. Bien sûr, tu apprends des gens que tu côtoies. Georges Leekens (ils ont travaillé ensemble à Lokeren, ndlr) était par exemple très bon dans la réorganisation, dans la création d’un nouvel élan. Ce qui n’est pas mal quand tu arrives quelque part, parce que tu ne peux pas toujours continuer de la même façon. Il faut parfois prendre des décisions fortes pour faire bouger les choses. Mais sur le plan tactique, je suis un autodidacte. J’y réfléchissais déjà quand j’étais joueur et je n’ai pas toujours pu convaincre mes entraîneurs avec mes idées. Ça a pu créer des tensions (il sourit). À la fin de ma carrière, j’avais déjà une idée assez précise du système que je voulais utiliser. Lors de ma première année à Courtrai, en 2006, j’ai commencé à jouer dans un 4-3-3 classique, puis on a été champions de deuxième division dans un 3-4-3, une formation assez novatrice pour l’époque.
L’idée ne vous est pas venue d’une autre équipe?
VANHAEZEBROUCK: Eh bien, non. L’idée m’est venue parce que je n’avais pas de vrai attaquant de pointe, un attaquant de grande taille. J’avais trois bons attaquants et je les voulais tous les trois dans l’équipe, donc je ne pouvais pas jouer en 4-4-2. Sinon, j’aurais dû en mettre un sur le banc. J’ai donc commencé à penser à un système qui me permettait de garder ces trois-là dans le onze de base, tout en gardant un équilibre au milieu de terrain où je n’avais plus que deux éléments. Il me fallait aussi un équilibre défensif. Et je crois qu’à ce moment-là, on a surpris beaucoup de clubs. Je me rappelle un match de Coupe contre Zulte Waregem, qui était alors cinquième de D1, lorsque nous étions leaders de D2. On a gagné (victoire 2-1, le 13 janvier 2008, ndlr) et je connaissais beaucoup de joueurs de Zulte. Ils m’ont dit qu’ils avaient longtemps cherché, mais qu’ils n’avaient pas trouvé de solutions pour nous battre. On a ensuite gagné 5-1 contre La Gantoise.
Cette montée en première division, c’est l’un de vos plus beaux souvenirs?
VANHAEZEBROUCK: Tout le monde parle du titre et de la Coupe gagnés avec Gand (respectivement en 2015 et 2022, ndlr), de nos parcours européens, de l’élimination de Tottenham à Wembley (en 2017, en seizièmes de finale de l’Europa League, ndlr), et c’est logique, mais pour moi, le titre avec Courtrai était l’un des moments les plus forts de ma carrière, oui. Je le mets au même niveau que les autres. La fête était super, les supporters aussi. Quand je suis arrivé, Courtrai jouait devant 1.000 personnes, 1.200 maximum. L’un de mes objectifs était de remplir le stade. Quand tu le fais, tu sais que tu travailles bien, que les résultats sont bons. Et on a réussi à le faire dès ma première année, notamment grâce à nos parcours en Coupe.
Pour avoir un groupe qui lutte pour le haut du classement, en Belgique, il faut au moins 25-26 joueurs de champ et trois gardiens.» HEIN VANHAEZEBROUCK
Qu’est-ce qui vous a le plus marqué dans cette saison 2007/2008?
VANHAEZEBROUCK: J’ai pu imposer mes idées à un groupe. Et surtout pratiquer un superbe football par moments. Un football de rêve. Les supporters étaient ravis. Quand tu revois les images du 5-1 contre Gand, elles ne sont peut-être pas très claires (il sourit), mais c’était de la grande classe. On avait créé quinze occasions et on aurait pu marquer dix fois. On ne voyait même pas ça en première division. Cette équipe-là, c’était peut-être l’une des meilleures dont j’ai eu la charge. Des gars intelligents, pas vraiment grands ni puissants, mais qui étaient dotés d’une belle qualité technique et d’une grande intelligence de jeu. Malheureusement, quand on est montés en D1, on a dû laisser partir quatre de nos meilleurs joueurs parce qu’on n’avait pas les moyens de les conserver. Ils ont été transférés chez des concurrents et on s’est retrouvés en D1 avec une équipe moins forte que celle qui avait assuré la montée…
«On évolue en fonction de l’argent des droits TV»
En quoi le championnat a changé depuis vos débuts?
VANHAEZEBROUCK: Il y a beaucoup de choses. Tout d’abord, la formule a changé. Quand j’ai commencé, en 2008, on jouait la D1 à 18. Mais il y avait quatre descendants possibles, dont deux qui jouaient le tour final. Ensuite, on a instauré les play-offs et ça a changé la philosophie de la première division, qui n’est pas la plus importante d’Europe. Avant, des grands clubs finissaient parfois sept ou huitièmes et ce n’était pas grave. Une fois les play-offs installés, ils ne pouvaient pas les rater, sinon c’était la catastrophe. Cette pression supplémentaire a permis d’augmenter le niveau.
Au contraire, les «play-offs 2», ceux du milieu de tableau, n’ont jamais été une franche réussite.
VANHAEZEBROUCK: On a naturellement eu des problèmes avec les PO2, qui n’étaient pas vraiment intéressants, malgré un possible duel à la fin pour le dernier ticket européen. Mais ce n’est qu’à ce moment-là que ça devient intéressant. On le voit au niveau des tribunes: les supporters viennent au stade lors de la phase classique, mais ne viennent pas voir les mêmes affiches en PO2. Le pire, selon moi, c’est d’avoir pensé à arrêter de jouer à la fin du mois de mars (pour les équipes qui n’étaient ni qualifiées pour les PO1 ni pour les PO2, ce qui n’est plus le cas désormais, ndlr). C’est incroyable qu’on ait pu accepter une telle situation. Les clubs, qui touchaient un peu plus d’argent, étaient contents d’arrêter leur saison si tôt.
Que pensez-vous du nouveau format?
VANHAEZEBROUCK: Je dois dire que c’est beaucoup mieux. Beaucoup de clubs risquent de descendre et vont devoir se battre pour rester en première division. Ils vont devoir jouer des matches supplémentaires, mais au moins, ils sont eux aussi dans la bataille. Ces matches à enjeu vont attirer des spectateurs et là, je trouve que l’intérêt sportif et l’intérêt public sont bien plus importants qu’avant.
Vous vous êtes récemment plaints du nombre de matches joués par votre équipe. Ce nouveau format ne va pas vraiment arranger la situation…
VANHAEZEBROUCK: Quand on regarde le nombre de nos matches sur les deux dernières saisons, il n’y a que Manchester City qui a joué un match de plus que nous (118 contre 117, selon ses propres chiffres, ndlr). Le Real en a joué un de moins. Nous sommes donc dans le top 3, entre deux géants. Deux géants qui ont un noyau de 38 joueurs qu’ils peuvent changer à tout prix, à tout moment. Nous, on a terminé la saison avec vingt joueurs de champ. C’est un miracle. Ça montre aussi que la formule de notre championnat est très lourde. Et en particulier pour les équipes qui font un bon parcours en Europe, ce que tout le monde espère, d’autant plus avec la création de la Conference League. C’est donc logique que les clubs belges aillent plus loin en Europe, mais de l’autre côté, il faut aussi disputer des tours préliminaires, des qualifications… Imaginons qu’on se qualifie pour la phase de poules, on aura déjà joué six matches européens. Ça fera douze avec les matches de groupe, puis seize si on passe deux tours. Ce qui ajoute un grand nombre de matches aux quarante qu’on va déjà potentiellement jouer dans le championnat, si on participe aux PO1 ou aux PO2. Mis à part le Championship anglais, où il y a 24 équipes mais qui ne jouent pas l’Europe, il n’y a aucun autre championnat sur le continent qui joue autant de matches que nous.
Qu’est-ce que ça raconte de la gestion de la Pro League?
VANHAEZEBROUCK: Ça raconte qu’on évolue en fonction de l’argent. Ce sont les droits TV qui sont devenus les plus importants. Les diffuseurs demandent plus de matches parce qu’ils ont déjà un accord avec la Pro League et que pour la même somme, ils vont pouvoir en diffuser davantage. C’est forcément beaucoup plus intéressant pour eux. Si tu leur dis qu’on ne fera que trente matches la saison prochaine, ils ne seront pas contents. Les clubs suivent parce que l’argent des droits TV est devenu trop important dans leur budget. Mais là, le problème, c’est que sur le plan sportif, les joueurs ne peuvent pas suivre. On ne peut pas construire des noyaux de 30-35 joueurs, on n’en a pas les moyens. Pour avoir un groupe qui lutte pour le haut du classement, en Belgique, il nous faut au moins 25-26 joueurs de champ et trois gardiens. Pour le moment (à la mi-juillet, ndlr), on est encore moins nombreux. C’est presque du suicide.
Quelques décisions ont coûté cher. On a donné des contrats de quatre ou cinq ans et des salaires trop élevés pour un club comme Gand.» HEIN VANHAEZEBROUCK
C’est ce qui vous a manqué pour accrocher les PO1?
VANHAEZEBROUCK: La saison passée, on a survécu avec beaucoup de chance. Je viens de faire des évaluations individuelles avec mes joueurs et ils sont nombreux à me dire qu’ils ont dû reprendre trop vite après une blessure, qu’après deux entraînements, ils se sont retrouvés sur le terrain, avant de se blesser à nouveau. Si nous, La Gantoise, on ne peut pas s’armer suffisamment pour se battre sur trois fronts, alors tu comprends qu’il y a quelque chose qui ne va pas.
«Kandouss, on pensait que c’était impossible»
Pourquoi La Gantoise dispose-t-elle de moins de moyens qu’auparavant?
VANHAEZEBROUCK: La crise sanitaire a bien évidemment eu un impact. On n’est pas un club avec de grands investisseurs qui peuvent augmenter le capital dès qu’il y a besoin. Tout vient des sponsors, du stade et de la billetterie, ce dont on a été privés pendant deux saisons. Ça a fait très mal à la caisse. On a aussi dû revoir l’effectif. Je n’étais pas là, mais avant la pandémie, on a cru tout à coup qu’on allait faire bouger les grands et devenir les numéros un. Quelques décisions ont coûté très cher pendant plusieurs saisons, parce qu’on a donné des contrats de quatre ou cinq ans et des salaires trop élevés pour un club comme Gand.
C’est-à-dire?
VANHAEZEBROUCK: Je n’étais pas là (il répète). Des joueurs sont venus et avaient des contrats qui sont plutôt du calibre de ceux que Bruges peut offrir, grâce à l’argent de ses participations à la Champions League. Normalement, ces contrats-là, tu ne les offres pas à Gand. Disons qu’on a pris un risque, mais que, comme tous les risques, c’était dangereux. On ne pouvait pas non plus prévoir le COVID. Depuis, le club doit faire attention à ses dépenses. On a dû diminuer le nombre de joueurs et recruter des nouveaux avec des contrats beaucoup moins onéreux. Ça nous a remis à notre place et peut-être même un peu en-dessous de celle qu’on aurait dû avoir.
Vous venez pourtant de transférer Ismaël Kandouss de l’Union Saint-Gilloise. Même votre staff n’y croyait pas au début…
VANHAEZEBROUCK: Oui, mais nous ne l’avons pas recruté au prix qui a été annoncé dans la presse. C’est facile de jeter des chiffres, mais il faut rester correct.
On a parlé de trois millions d’euros.
VANHAEZEBROUCK: Ce n’est clairement pas le cas. C’est quelqu’un qui nous a été proposé alors qu’on pensait que c’était impossible d’aller chercher des joueurs de l’Union, une équipe presque deux fois championne et qui aurait d’ailleurs mérité de l’être. On nous a dit que financièrement ce serait possible, dans nos moyens, qui sont «restricted» comme on dit. Et puis, quand je l’ai annoncé aux membres de mon staff, ils étaient surpris qu’on puisse avoir Kandouss sans devoir payer des montants déraisonnables.
Il y a un an, vous avez vous-même coché le nom d’Hyun-seok Hong, qui évoluait alors au LASK Linz, en Autriche. Comment avez-vous procédé?
VANHAEZEBROUCK: On avait raté Casper Nielsen (alors actif à l’Union Saint-Gilloise, ndlr). On avait de bons contacts avec lui et je crois sincèrement qu’il voulait venir chez nous. C’était clair. Il avait pris sa décision, mais on a un peu trop traîné et finalement, Bruges est revenu dans le coup. Je savais qu’il allait les choisir parce que Bruges jouait la Champions League. J’étais vraiment déçu, on était très proche de le signer. J’ai alors commencé à chercher moi-même un profil similaire, qui pouvait effectuer le pressing au milieu de terrain. Je me suis dit qu’il ne fallait pas que j’aille chercher dans les cinq grands championnats, ni au Portugal. Ce n’était pas possible pour nous financièrement. J’ai alors pensé à la Pologne, la République tchèque, les Pays-Bas ou l’Autriche. En Autriche, ce n’était pas possible non plus de recruter un joueur de Salzbourg, donc je me suis penché sur Linz. Je me suis rappelé qu’ils avaient joué contre Bruges (en 2019, en Champions League) et que leur pressing était incroyable, très énergique. J’ai vu que Keito Nakamura, l’ancien de Saint-Trond, était dans la sélection, mais c’est plutôt un attaquant. C’est là que je suis tombé sur le profil de Hong. J’ai commencé à regarder des vidéos et en cinq, dix minutes, j’étais déjà persuadé qu’il nous le fallait. J’ai tout de suite appelé mes collègues. Et rapidement, tout le monde était convaincu. J’ai dit à Michel (Louwagie, le manager général, ndlr) que j’avais trouvé un remplaçant à Nielsen, peut-être aussi bon que lui, mais nettement moins cher, et il s’est occupé du reste. J’étais très content, mais ce n’est qu’une partie de notre travail. Ça ne veut pas dire qu’à chaque fois qu’on se met au boulot, on trouve aussi facilement. On cherche parfois pendant des semaines sans tomber sur des profils très convaincants, mais cette fois-ci, c’était en plein dans le mille.
Vous avez également dû faire des choix difficiles. Cet été, vous avez prolongé Sven Kums, mais pas Vadis Odjidja. Pourquoi?
VANHAEZEBROUCK: Ce sont des choses qui se discutent avec les joueurs, les dirigeants, le staff. On évalue notre noyau et on regarde comment on veut évoluer la saison prochaine. On a choisi de former un groupe plus énergique, avec moins de blessures aussi. Sven a joué 53 matches la saison passée, tandis que Vadis a chaque année ses petites blessures. Et à chaque fois, il prend du temps pour revenir, s’il ne se reblesse pas. Il n’a pas non plus eu la plus grande des efficacités ces dernières années: il n’a pas été l’auteur de beaucoup de buts ni de beaucoup d’assists. Il n’a jamais pu vraiment arriver à son top niveau, peut-être à cause de ses blessures. Et en devenant plus âgé, le risque que cette situation se répète était naturellement plus grand. Il avait aussi un contrat très lourd pour le club. Ce sont les raisons pour lesquelles on a décidé de ne pas le prolonger, mais de proposer à Sven un nouveau contrat.
Je ne suis pas contre un nouvel investisseur, je suis là pour aider.» HEIN VANHAEZEBROUCK
Avec un salaire moins important?
VANHAEZEBROUCK: Nettement moins important qu’avant, sinon ce n’était pas possible. On ne peut plus reproduire les erreurs du passé. Ngadeu, c’est la même histoire. C’était un joueur important, qui a joué presque tous les matches chez nous, mais on l’a aussi perdu à cause d’un contrat trop lourd pour le club. On ne pouvait pas le prolonger (il est parti en Chine, en mars dernier, ndlr). Ces décisions ne sont peut-être pas les plus populaires, mais les joueurs connaissent la situation. Si Sven Kums avait refusé de diminuer son salaire, et s’il n’avait pas joué autant la saison dernière, il n’aurait pas été prolongé non plus.
«Je comprends qu’un club comme Gand doit évoluer»
Quand vous avez prolongé votre propre contrat, l’an dernier, vous avez dit ne pas vouloir revivre la situation d’un rachat, comme ce fût le cas à Anderlecht, fin 2017. Vous êtes désormais en plein dedans…
VANHAEZEBROUCK: Je n’ai pas dit que je ne voulais pas de rachat, mais plutôt que je ne voulais pas revivre ça juste après mon arrivée. J’ai su dès le moment où je suis revenu à Gand qu’il y avait la possibilité que le club soit racheté, mais que ça ne se ferait pas tout de suite. À Anderlecht, quand j’ai signé, je ne savais rien du tout, puis le club a rapidement été vendu à un autre propriétaire (Marc Coucke, ndlr), qui a directement joué son rôle. Il a amené des joueurs d’Ostende, bons ou pas bons, on n’avait rien à dire et ils étaient là. Il s’est quand même pas mal mêlé du sportif. C’est de cette situation dont je voulais parler. Je comprends qu’un club comme Gand doit évoluer, que les dirigeants ne sont pas éternels, et je n’ai aucun problème avec ça. Quand j’ai resigné l’an dernier, j’ai senti que cette situation se rapprochait et je n’ai jamais été contre.
C’est aussi l’une des grandes évolutions du football belge: la majorité des clubs professionnels sont passés sous pavillon étranger. L’Américain Bill Folley, qui détient des parts à Lorient et Bournemouth, a un temps été pressenti pour investir à Gand. Comment l’auriez-vous vécu?
VANHAEZEBROUCK: Je crois que ça n’a jamais été une option. La Ville, qui a quand même son mot à dire, n’aurait pas accepté.
La volonté était de rester gantois?
VANHAEZEBROUCK: Peut-être pas pour les dirigeants, mais pour la ville, oui. Ils voulaient un investisseur local, ils l’ont trouvé (l’entrepreneur Sam Baro, ndlr). Pour moi, ça raconte l’évolution du foot en général. Le football est devenu un investissement. Il y a des gars qui achètent un club, qui essaient d’en profiter pour ensuite le vendre plus cher. Certains ont de bonnes intentions, mais d’autres ne s’intéressent pas du tout de savoir si vous terminerez dans les quatre premiers, entre la sixième ou la douzième place. Peu importe. Et ça, c’est malheureux pour tout le monde, à commencer par les supporters, par ceux qui sont intimement liés au club. C’est presque un casino.
Le projet de Sam Baro vous parle davantage?
VANHAEZEBROUCK: On n’a aucune garantie pour l’instant. Quand un club est repris, il n’y a d’ailleurs jamais de garantie. J’ai lu qu’il a dit lui-même qu’il préfère investir dans dix sociétés et ne réussir qu’avec trois d’entre elles, plutôt que d’investir dans un seul projet. Parce que ça reste toujours trois fois plus rentable. Voilà, on doit simplement attendre et espérer figurer dans les trois qui réussissent.
Ce qui constitue un faible pourcentage.
VANHAEZEBROUCK: Parce que le foot, c’est aussi quelque chose de spécial. Ce n’est pas évident, ce n’est pas un business comme celui des autres entreprises. Ça reste un domaine où on est dans l’émotionnel. Et j’arrive à un âge où on pourrait croire que je ne suis pas la bonne personne, à la bonne place. Moi, je ne suis pas contre un nouvel investisseur, je suis là pour aider. Et je le ferais avec plaisir. Mais si jamais on pense qu’il faut trouver quelqu’un d’autre pour faire progresser le club, c’est clair qu’on trouvera une solution.
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