Gestion de Cristiano Ronaldo et troisième étranger: à quoi doit s’attendre Roberto Martínez à la tête de la sélection du Portugal

Peu de temps après la fin de son contrat avec les Diables rouges, Roberto Martínez a déjà retrouvé de l’emploi. Cette fois, c’est l’équipe nationale du Portugal qu’il tentera de mener aux sommets. Mais qu’est-ce qui l’attendra au sein de la Seleçao das Quinas ?

Les Portugais auraient aimé que les choses se passent différemment en décembre dernier. Lors de la Coupe du monde, où elle était considérée comme l’une des grandes favorites, la Seleçao das Quinas a été éliminée en quart de finale contre le Maroc. Pourtant, jusqu’à cette sortie de route, le tournoi s’était bien déroulé pour le Portugal, qui avait réalisé un joli 6/9 en phase de groupe (seule la Corée du Sud a un peu gâché la fête avec une victoire inattendue lors du dernier match) avant de décrocher une qualification convaincante, aussi bien dans les chiffres que dans la manière (6-1), contre la Suisse en 1/8e de finale.

Mais en quart de finale contre le Maroc, les choses ont mal tourné. La surprise de la Coupe du monde s’est imposée 1-0, tout en ne réussissant que 15 passes dans la moitié de terrain des Portugais, contre 215 pour Bruno Fernandes et ses partenaires dans les 45 mètres des Lions de l’Atlas. En revanche, les champions d’Europe 2016 ne sont pas parvenus à amener beaucoup de danger puisqu’ils ont tiré autant de fois au but (3) que leur bourreau de l’Atlas.

Ce revers inattendu a été le coup de grâce pour Fernando Santos à la tête de la Seleçao das Quinas. Cela faisait un moment qu’il était contesté, mais il pouvait toujours se targuer d’avoir mené les siens sur le toit de l’Europe en 2016. Le premier titre international de son pays. Au cours de ses huit années de règne, le technicien de 68 ans a aussi permis à son pays de remporter la première édition de la Ligue des Nations, à domicile de surcroît. Mais vu la qualité du noyau portugais, il était plutôt décevant de devoir se contenter de deux huitièmes de finale (Coupe du monde 2018 et Euro 2021) et d’un quart lors de la défunte Coupe du monde. Pour relancer la sélection et l’amener vers de nouveaux sommets, la Fédération Portugaise a finalement décidé de confier les clés du camion à Roberto Martinez. Un entraîneur qui reste pourtant sur une sortie de route précoce avec la Belgique au cours de l’épopée au Qatar. Voici d’ailleurs quelques défis et missions auxquels il sera confronté dans ses nouvelles fonctions.

L’encombrante ombre de Cristiano Ronaldo

Martínez a peut-être réalisé le meilleur choix qu’il pouvait faire en acceptant, après son passage à la tête des Diables rouges, le défi proposé par le Portugal. Il aurait pu retourner travailler dans un club, mais il a finalement choisi de rester sur le circuit international. Lorsque les Lusitaniens sont venus aux nouvelles, le Catalan n’a pas hésité longtemps. La sélection regorge de talents à tous les postes et Santos a déjà opéré un certain changement de génération ces dernières années. Cela va permettre à Martínez de prendre en charge une équipe à la fois jeune et expérimentée.

Avec Bruno Fernandes, Bernardo Silva, João Félix et Ruben Dias, les principaux leaders de cette nouvelle génération sont déjà au sommet depuis quelques années, tant en club qu’en sélection. Les éclosions récentes de Gonçalo Ramos et Nuno Mendes vont aussi offrir deux autres talents de premier ordre à la Seleçao das Quinas.

La seule ombre au tableau et non des moindres : que doit faire Roberto Martínez de Cristiano Ronaldo ? La superstar absolue dans l’histoire du Portugal a été ingérable, aussi bien dans son ancien club (Manchester United) qu’en sélection. Son contrat avec les Mancunians a été résilié après une interview explosive accordée à Piers Morgan et ensuite, lors de la Coupe du monde, Fernando Santos l’a renvoyé sur le banc avant le 1/8e de finale face à la Suisse. L’ancien guide lusitanien reprochait le comportement de son capitaine lors du duel contre la Corée du Sud. Une fois Ronaldo sur le banc, le Portugal l’a emporté 6-1, avec notamment un triplé de celui qui avait pris son relais sur le terrain, Gonçalo Ramos. Même si une rencontre plus tard, l’absence de Ronaldo dans la liste des onze noms de départ n’a pas permis aux Portugais de se hisser dans le dernier carré.

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Comment Roberto Martinez va-t-il gérer le cas de Cristiano Ronaldo ? (Photo by Eric Verhoeven/Soccrates/Getty Images) © belga

Depuis lors, CR7 a déménagé en Arabie Saoudite mais reste encore disponible pour l’équipe nationale. Le Portugais de 37 ans compte 118 buts en 196 apparitions internationales et a déjà battu tous les records. On peut imaginer que Ronaldo aura à cœur d’atteindre la barre des 200 caps, mais y parviendra-t-il sous les ordres de Roberto Martínez ? Dans le dernier numéro de notre mensuel Sport/Foot, Martínez avait déclaré que « l’on ne dit pas adieu aux légendes » lorsqu’on lui demandait pourquoi il faisait toujours appel à certains cadres vieillissants de nos Diables rouges. Mais que peut encore concrètement apporter CR7 à cette équipe lusitanienne ?

Il faudra aussi gérer le cas d’un autre taulier en bout de course, mais toujours performant: Pepe. A bientôt quarante ans, le défenseur central est toujours titulaire et n’a pas annoncé son intention de faire un pas de côté sur le plan international. Une différence existe cependant entre ces joueurs importants du Portugal et ceux de la Belgique. Chez les Diables rouges, le technicien catalan a grandi avec les Eden Hazard, Axel Witsel, Jan Vertonghen et compagnie. L’aspect affectif sera donc bien différent, mais cela ne veut pas dire pour autant que Martinez sera prêt à demander à Ronaldo ou Pepe d’arrêter.

Un pays aux attentes élevées

Tout dépendra du style de jeu que Martínez voudra mettre en place au sein de sa nouvelle formation. Avec CR7 dans vos rangs, vous disposez peut-être d’une machine à marquer, mais ce sera aussi lui qui déterminera comment tout se passe. Il est l’homme autour duquel vous devez alors établir votre tactique. Sans l’icône portugaise dans le vestiaire, Martínez pourra sans doute imposer sa griffe et ses idées plus facilement à son nouveau groupe. Il suffit de voir comment a progressé le Manchester United d’Erik ten Hag depuis qu’il a évincé CR7.

L’une des attentes du Portugal avec la nomination de l’ancien guide diabolique est que la sélection produise un jeu plus offensif et attrayant que sous Santos. Celui-ci prônait un jeu trop stérile et sans idées. Le technicien aimait que le ballon circule dans ses rangs et était avant tout adepte du jeu défensif. Ses entrejeux étaient souvent renforcés avec des milieux défensifs dans l’axe. Il craignait clairement plus de concéder un but qu’il n’avait la volonté d’en marquer un. Les supporters estiment au vu du potentiel, principalement offensif, de leur sélection que l’état d’esprit dans le rectangle vert doit changer.

Martínez peut citer la Coupe du monde 2018 comme accomplissement. La Belgique, qu’il a menée à la médaille de bronze, était l’un des pays les plus attractifs du tournoi avec un nombre impressionnant de buts marqués, grâce à un secteur offensif riche. Un détail qui n’aura pas échappé à la Fédération portugaise de football.

Roberto Martinez avec celui auquel il va succéder à la tête du Portugal, Fernando Santos. Lors du 1/8e de finale entre la Belgique et le Portugal lors du dernier Euro, ce sont les Diables rouges qui l’avaient emporté. BELGA PHOTO DIRK WAEM

Si Santos n’était pas le grand prêtre du football spectacle, il a cependant récolté les seuls titres du Portugal dans son histoire, avec le gain de l’Euro en 2016 et la Ligue des Nations en 2019. C’est sans doute pour cette raison qu’il a conservé un grand crédit malgré d’autres compétitions où les résultats furent moins brillants. Il y a eu d’autres grandes générations dans l’histoire du Portugal. Celle d’Eusébio dans les années 1960 et celle des Deco, Manuel Rui Costa et Luis Figo au début de ce siècle. Aucune de ces équipes n’était pour autant parvenue à ramener un titre en bordure d’océan Atlantique. Roberto Martínez devra aussi réussir des résultats lors de son mandat, car le peuple portugais attend désormais plus de ses couleurs depuis 2016. Surtout que la fournée actuelle est certainement plus talentueuse que celle qui s’était hissée sur le toit de l’Europe de manière un peu inattendue à l’époque.

Premier Espagnol et troisième étranger seulement

Si les attentes sont donc très élevées sur le plan sportif, Martínez devra également faire ses preuves dans un autre domaine. En effet, avant lui, il n’y a eu que deux étrangers à la tête de la Seleção avec Otto Glória (1964-66 et 1982-83) et Luiz Felipe Scolari (2003-2008). D’ailleurs, avant l’ère Fernando Santos, les deux Brésiliens étaient les sélectionneurs les plus performants de l’histoire du Portugal en termes de résultats dans les grands tournois. Par exemple, Glória a conduit l’équipe d’Eusébio à une troisième place historique lors de la Coupe du monde 1966 (les Portugais n’ont jamais fait mieux d’ailleurs) et c’est sous la conduite de Scolari, champion du monde deux ans plus tôt avec une autre Seleçao, celle du Brésil, que le Portugal avait échoué, à domicile, en finale de l’Euro 2004.

Sous Luiz Felipe Scolari, le Portugal avait atteint la finale de l’Euro. Le meilleur résultat de la sélection avant l’arrivée de Fernando Santos . (Photo by Shaun Botterill/Getty Images)

Il faut aussi noter qu’au Qatar, Santos est devenu le premier entraîneur national portugais à atteindre les quarts de finale d’une Coupe du monde avec son pays. C’est peut-être pour cette raison que la fédération de football a regardé au-delà de ses frontières pour trouver son nouveau guide. Pourtant, plusieurs coaches portugais, dont le légendaire José Mourinho en tête, étaient pressentis pour le poste. Par conséquent, Roberto Martínez est devenu le premier sélectionneur portugais non lusophone de la Seleção.

De plus, la fédération portugaise a choisi un Espagnol et c’est un choix étonnant quand on connaît la rivalité entre les deux pays voisins. On peut aussi se demander dans quelle langue communiquera le technicien catalan, qui a déjà précisé lors de sa présentation qu’il ne parlait pas le Portugais. On s’en souvient, certains ont souvent reproché à Martinez de parler anglais au lieu de l’une des trois langues nationales de notre Royaume. On peut imaginer que pour ne froisser personne dans notre pays déjà si pourri par les conflits de clocher et communautaires, le Catalan ait logiquement choisi de s’exprimer dans une langue neutre, et largement en vigueur dans le milieu du foot. Au Portugal, il n’est pas sûr que la pratique de l’Anglais sera suffisante. Est-ce que cela ne sera pas le plus grand défi à relever pour l’ancien guide diabolique ?

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