Dessert tactique #8 : l’espace de Kouamé, le rôle de Raskin et l’immobilisme de l’Antwerp
Retour en cinq bouchées sur les observations tactiques du week-end sur les pelouses de Pro League.
Pourquoi Malines ne sait pas gérer un résultat ?
Le retour au grand galop des Zèbres derrière les Casernes avait un air de déjà vu. L’histoire répétée d’un Malinwa qui bafouille quand le score semble acquis. Spectaculaires en début de rencontre, avec une tempête collective qui aurait pu encore alourdir la marque, les hommes de Wouter Vrancken se sont retrouvés dès le passage du premier quart d’heure dans la configuration où ils sont le moins à l’aise : la gestion d’un résultat.
Minutieusement chorégraphié lors des phases de possession de balle, où les permutations entre les joueurs offensifs étaient illisibles pour le marquage individuel des Carolos, le KaVé était bien moins souverain à l’heure de regarder plus souvent dans le rétroviseur que vers l’horizon. C’est sans doute le principal problème de ce Malines, épatant avec le ballon, efficace dans les secondes qui suivent la perte de balle, mais très exposé une fois son contre-pressing effacé. Sans parler des phases arrêtées, qui ont coûté aux Sang et Or 17 buts cette saison. Un tiers de ceux qu’ils ont concédé, et un bilan qui fait largement d’eux le pire élève de l’élite en la matière.
Il n’y a finalement que loin de leurs buts que les Malinois sont heureux. Leur problème, c’est que leur possession n’est jamais envisagée pour être défensive.
Où doit jouer Nicolas Raskin ?
La question ne semble pas encore avoir coûté de cheveux à Luka Elsner, mais elle parcourt inévitablement l’esprit des derniers coaches qui se sont succédé sur le banc de Sclessin. Les qualités de Nicolas Raskin sont à la fois indéniables et paradoxales. Sans le ballon, son agressivité donne envie à tout entraîneur protagoniste de l’envoyer à l’assaut des premières passes de la relance adverse, parce qu’un rôle de sentinelle se marie mal avec son amour de la défense impulsive.
Avec le ballon, par contre, Raskin a besoin d’espace devant lui. Pas tant pour voir le jeu que pour s’y engouffrer. Assez haut sur la pelouse face à Seraing, le milieu a souvent semblé mal à l’aise quand il devait recevoir le ballon dos au jeu, sans le temps et l’espace pour se retourner. Les caractéristiques d’un homme qui doit entamer ses actions de son côté du rond central, même s’il est ensuite capable de les faire vivre jusqu’aux abords de la surface adverse grâce à ses atouts en percussion balle au pied.
Pourquoi le Cercle est si difficile à affronter ?
Rares sont ceux qui bouleversent autant les certitudes adverses que le Cercle de Dominik Thalhammer. L’Autrichien avait débarqué dans la Venise du Nord dans un climat de contestation, après la séparation consécutive à une victoire avec Yves Vanderhaeghe. Très vite, pourtant, il a montré que ses idées énergiques se marieraient parfaitement avec la jeune et puissante équipe brugeoise. Pourtant loin d’être ridicule dans les matches où il faut montrer les dents et les muscles, les Kerels de Karim Belhocine en ont fait l’expérience au stade Jan Breydel.
Pressing le plus époumonant de l’élite, la marée verte et noire s’amuse à noyer tous ceux qui tentent d’échapper à ses vagues collectives défensives. À défaut d’être télégénique, malgré les exploits individuels de Rabbi Matondo et le coup de patte chirurgical de Dino Hotic, le jeu du Cercle présente une équation difficile à résoudre pour ses adversaires, avec son surnombre systématique autour de la balle. Comme Alexander Blessin un an avant lui, Thalhammer fait souffler le vent de la nouvelle école allemande sur le jeu belge. Plutôt une tempête qu’une légère brise.
Comment Kouamé exploite mieux son registre ?
L’Ivoirien a le corps de ceux qui aiment les malentendus. Une stature de colosse qui donne forcément l’allure d’un combattant, vanté à ses débuts par Vincent Kompany pour sa faculté à faire tourner à son avantage la plupart des duels équilibrés qui s’offrent à lui. Pourtant, Christian Kouamé est avant tout un affamé de profondeur. Un prédateur de cet espace compris entre la défense et le gardien adverse, parfaitement complémentaire avec les décrochages de Joshua Zirkzee.
Face au duo d’attaquants mauves, l’adversaire doit choisir son poison. Si la défense recule, elle offre de l’espace au Néerlandais pour se retourner entre les lignes et faire parler son flair et son toucher. En avançant pour étouffer la zone d’expression favorite du jeune talent du Bayern, elle offre son dos à Kouamé, que les progrès dans l’orientation du corps au moment d’appeler le ballon en profondeur ont encore rendu plus redoutable dans l’exercice. Effrayés par la présence conjointe de Zirkzee, Lior Refaelov et Yari Verschaeren entre les lignes, les adversaires ont tendance à choisir la deuxième option. Et à rendre l’Ivoirien de plus en plus précieux dans l’arsenal offensif mauve.
Pourquoi l’Antwerp n’avance plus ?
Sur les pelouses espagnoles, il existe un adage qui veut que la Copa del Rey, planifiée au début du mois de janvier, soit le baromètre idéal pour jauger les équipes sur lesquelles il faudra compter lors du sprint final. Sur la scène européenne, on dit aussi que les champions naissent en hiver. Du côté du Bosuil, la nouvelle année n’a visiblement pas permis la naissance de nouvelles certitudes, malgré un noyau quasiment inchangé au bout du mercato de janvier.
Mis à part un système de jeu qui lui permet de compiler un maximum d’atouts offensifs sur le terrain, qu’a construit Brian Priske avec son Great Old ? Le début de saison avait permis d’empiler des points, à défaut de certitudes, surtout dans les confrontations directes, mais l’avancée des rencontres a vu la concurrence progresser collectivement pendant que les Anversois semblaient stagner. La rencontre face à Anderlecht était particulièrement symbolique, entre l’évolution de Mauves de plus en plus rôdés à leur football et un Antwerp égal à lui-même, surtout tributaire de ses exploits dans les deux surfaces. Finalement, rien n’a changé au Bosuil, sauf les points dans la balance. Si les championnats se gagnent en hiver, le matricule 1 vient peut-être de perdre une bonne partie du sien.
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