Dans les coulisses du grand nettoyage à Mouscron
En quelques jours, l’Excel a viré trois légendes qui totalisent près de 200 matches chez les Diables. Indiscrétions et explications.
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« Fernando Da Cruz et le Royal Excel Mouscron mettent un terme à leur collaboration. La direction du club tient à souligner le travail réalisé et l’implication de Fernando Da Cruz et de son staff dans la mission qui leur avait été confiée. » Communiqué de mi-octobre 2020. Un an plus tard, presque jour pour jour, c’est Enzo Scifo qui a pris la même porte de sortie. Avec des commentaires publics bien moins lissés de la part de la direction. La semaine passée, le président Patrick Declercq s’est lâché dans Het Laatste Nieuws : « La mission d’Enzo Scifo était de mélanger des joueurs expérimentés avec des jeunes talents, mais il ne l’a pas fait (…) Nous étions des grands fans d’Enzo en tant que joueur. Mais comme entraîneur, il nous a déçus. »
Clairement, on ne parlera pas d’une séparation de commun accord et dans une ambiance sereine. Mais Mbo Mpenza, à son tour viré en début de semaine passée, a encore plus morflé. Ce communiqué de l’Excel a même étonné : « Arrivé au club avec les coudées franches pour former un groupe et un staff compétitifs, l’ancien Diable rouge n’a pas répondu aux attentes de la direction. Avec des résultats qui ont plongé le club dans les abîmes de la D1B, la direction se devait de réagir et de prendre une décision forte. C’est chose faite. » Et bam ! Il a aussi payé pour avoir lié son avenir à celui du T1 qu’il avait choisi. Lors de leur dernière conférence de presse commune, Mbo Mpenza avait dit : « Si Enzo Scifo part, je le suis. »
José Jeunechamps, un retour qui veut dire beaucoup
On avait applaudi durant l’été quand l’Excel avait rapatrié ces deux enfants de la maison mais aussi Emile Mpenza, intégré dans le staff. Le retour d’un vrai ancrage local. Enfin. Avec le recul, il faut dresser ce constat : ça ne pouvait pas marcher. Dans un championnat où il faut s’arracher en semaine et mettre des tampons le week-end, la méthode Scifo était condamnée à l’échec. Prenons les cadres du vestiaire. Christophe Lepoint a bossé en Bundesliga et dans la rugueuse D2 anglaise, il a travaillé avec des durs comme Hein Vanhaezebrouck, Mircea Rednic, Michel Preud’homme. Teddy Chevalier a dû supporter les méthodes et les cris de Hugo Broos, Francky Dury, Erwin Koeman, Vanhaezebrouck, Luka Elsner. Clément Tainmont connaît les excès de Frédéric Vanderbiest et Dennis van Wijk. Jérémy Taravel a côtoyé Vanhaezebrouck, Dury, Peter Maes, Franky Vercauteren, Bernd Storck.
On a vite compris qu’on n’irait nulle part avec les méthodes douces d’Enzo Scifo.
Un Mouscronnois
Et là, il se sont retrouvés face à un Enzo Scifo qui n’a jamais été réputé pour montrer les dents. La griffe Scifo, c’est plutôt un « Allez les gars, on y va » accompagné d’un petit claquement de pognes. « On a vite compris que ça allait poser problème, qu’on n’allait pas jouer un rôle de premier plan avec ses méthodes douces », nous explique un Mouscronnois. « Scifo, c’est un vrai gentil. Mais dans ce métier, ça ne mène souvent nulle part. » Des aînés du groupe lui ont parfois fait l’une ou l’autre remarque, lui ont posé des questions. L’ex-petit prince ne l’a pas toujours bien pris. On nous dit aussi ceci : « Si je dois résumer ses méthodes de travail en un mot ? Improvisation. »
Pendant des semaines, ça a été un gimmick au Canonnier. Enzo Scifo déboulait au stade pas très longtemps avant l’entraînement, et il ne s’y éternisait pas quand la séance était terminée. Ses assistants étaient bien plus assidus et donnaient les exercices. Parmi eux, José Jeunechamps. Un T2 dont l’engagement est à l’opposé du côté cool et zen de Scifo. Et donc, ça ne pouvait pas fonctionner. Ils n’étaient pas faits pour collaborer. Jeunechamps est parti de lui-même, il y a un gros mois. Aujourd’hui, il revient comme entraîneur principal. « La preuve que la direction croit en lui, croit beaucoup plus en sa méthode qu’en celle de Scifo », nous dit une source au club. Le même interlocuteur ajoute que, d’un point de vue purement humain, l’ancien Diable rouge ne laissera pas de mauvais souvenirs au Canonnier. « C’est un gentil, avec une personnalité à l’opposé des entraîneurs allemands qui sont passés récemment. Avec eux, c’était très compliqué certains jours. Mais au moins, ça bossait, c’était du sérieux, ils ne supportaient pas le relâchement. Il faut pouvoir s’adapter aux situations qu’on vit, en D1B il faut aller au charbon, ce n’est pas un championnat pour danseuses. »
Et les raisons d’y croire…
Le nouveau coach s’attaque à un chantier gigantesque. L’Excel est englué à la dernière place, avec une majorité de joueurs qui ont la tête à l’envers. « Quand tu étais encore en D1A il y a quelques mois, et qu’aujourd’hui tu es plus proche de la troisième division et du foot amateur, tu es frustré, en colère », nous explique un Mouscronnois. « L’ego en a pris un coup. Parce qu’on est ridicules. Le problème est plus dans les têtes que dans les jambes. » On entend aussi que l’ambiance est complètement plombée dans le club en général. Un malaise que le propriétaire, Gérard Lopez, ne veut toujours pas voir en face : il continue à ne jamais venir à Mouscron, trop occupé par ses autres clubs, Bordeaux et Boavista. Il y a un nouveau CEO pour faire tourner la boutique au quotidien, l’ancien responsable financier Benjamin Sellier, qui a remplacé Paul Allaerts.
Priorité des priorités, aujourd’hui : remonter dans le classement pour éviter une deuxième rétrogradation d’affilée. « On mérite sans doute un ou deux points de plus parce qu’on a plusieurs fois été clairement pénalisés par l’arbitrage, mais ça s’arrête là », lâche un interne. « Notre classement reflète notre niveau depuis l’été. »
Le pompier appelé pour éteindre l’incendie n’en est pas à son coup d’essai. C’est évidemment le traditionnel serviteur Philippe Saint-Jean. Une de ses premières décisions a été de fabriquer de nouveaux ponts entre le centre de formation et l’équipe première en dépêchant des entraîneurs de jeunes vers le staff de l’équipe pro. Dans le groupe actuel, il y a une demi-dizaine de joueurs formés au Futurosport. Et les U21 de l’Excel font un championnat très correct dans le groupe B (pas celui du Standard, d’Anderlecht, de Bruges et de Genk) face à des adversaires comme Eupen, Ostende, le Beerschot et l’Union. Rien que ça, ça colore un peu le tableau de la saison au Canonnier.
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