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Comment le futur crack du Bayern Joshua Zirkzee s’est retrouvé en prêt à Anderlecht ?

Pierre Danvoye Pierre Danvoye est journaliste pour Sport/Foot Magazine.

Joshua Zirkzee a un talent dingue, il y a unanimité là-dessus aux Pays-Bas et en Allemagne. Mais comment se retrouve-t-on en prêt à Anderlecht en étant considéré comme un futur crack du Bayern? Explications.

Anderlecht attend de Joshua Zirkzee qu’il fasse oublier Lukas Nmecha. Et il en a donné un premier aperçu contre le Cercle, dimanche, en prenant à son compte 100% de la production offensive des Mauves. Il serait même plus tueur que l’Allemand, il paraît! Avec quelles chances de réussite à plus long terme? Le costaud Zirkzee, qui affirme avoir hérité sa taille de son père néerlandais et sa puissance de sa mère nigériane, est (encore) tout jeune – vingt ans – mais a (déjà) un parcours chaotique. On va le voir, avec lui, les périodes de compliments sont toujours suivies de commentaires plus sceptiques. C’est comme ça depuis qu’il a explosé en catégories de jeunes avec Feyenoord pour susciter l’intérêt de décideurs du Bayern, qui l’ont fait signer quand il n’avait que seize ans. Avec Joshua Zirkzee, c’est toujours oui, mais… Analyse.

Quand Zirkzee monte au jeu pour le Bayern, il remplace… Perisic, Coutinho, Lewandowski, Tolisso.

EURO 2020 vs arrogance

Marco van Basten, Ronald Koeman, Willem van Hanegem. Trois légendes du foot batave, pas loin de 200 matches avec la sélection ensemble. Autre point commun: ils en ont depuis longtemps plein la bouche quand ils évoquent Zirkzee. Chez eux, on a par exemple entendu qu’il était « dommage » que le joueur quitte Feyenoord aussi tôt parce qu’à ce moment-là déjà, selon eux, il aurait déjà dû jouer en équipe première de ce club. Et le plus élogieux des trois est Van Hanegem. Lui, il est carrément dingue de Zirkzee. En 2020, il avait fait sa propre campagne médiatique pour réclamer sa présence dans le noyau à l’EURO.

Oui, mais…

Ceux qui suivaient les matches de jeunes aux Pays-Bas il y a quelques années n’étaient pas nécessairement convaincus que Joshua Zirkzee avait la mentalité adéquate pour percer au plus haut niveau. Point de vue foot, il avait tout ou presque, le potentiel quasi complet de l’attaquant de pointe moderne. Il s’amusait à dribbler des défenses entières pour déposer ensuite le ballon au fond. À côté de ça, on pointait une certaine nonchalance et un comportement parfois à la limite quand il venait de mettre un beau but. Il le fêtait à peine, faisait comme si le fait d’avoir marqué, et avec la manière, était à ses yeux la chose la plus normale du monde. Ça passait pour de l’arrogance, de la suffisance. Les mêmes personnes insistaient sur le fait qu’il n’était absolument pas arrogant dans la vie de tous les jours, mais là, habillé en footballeur, son caractère et son comportement changeaient dans la mauvaise direction.

Précocité vs coup de sang

À 18 ans, Joshua Zirkzee monte au jeu avec le Bayern en Ligue des Champions, contre Tottenham. Ses premières minutes avec l’équipe A du géant. Une semaine plus tard, il débute en Bundesliga, il joue une minute et marque un but, sur sa première touche de balle. Il devient le plus jeune buteur néerlandais de l’histoire du championnat et le troisième plus jeune buteur du Bayern en BuLi. Trois jours après, il a droit à sept nouvelles minutes en D1 allemande et score à nouveau. Il est la nouvelle attraction fatale. Les commentaires sont terribles, et il n’y a que du positif. En interne notamment, où Karl-Heinz Rummenigge signale que son parcours doit encourager d’autres jeunes prometteurs à signer à Munich. Il y a aussi le discours du directeur sportif, HasanSalihamidzic, qui l’encense une nouvelle fois – une vieille habitude chez lui depuis que Zirkzee a débarqué en Bavière.

Et surtout, le Néerlandais se révèle à une période où le Bayern est dans le dur. Ça n’a pas marché en première partie de saison avec Niko Kovac à la tête de l’équipe, il a été remplacé par Hansi Flick qui lance Zirkzee. La période où il fait ses débuts en équipe première coïncide avec le début de la remontée au classement. Au bout de la saison, il a joué dans trois compétitions: Bundesliga, Coupe d’Allemagne et Ligue des Champions. Trois trophées que le Bayern met dans son armoire. À 19 ans, il a déjà un palmarès qui vaut le détour, même s’il a très peu joué. Et c’est intéressant de voir les noms des joueurs qu’il a remplacés quand il a été lancé dans les dernières minutes: Ivan Perisic, Philippe Coutinho, RobertLewandowski, Corentin Tolisso. Rien de moins. Joshua Zirkzee s’est installé au milieu des plus grands, il côtoie désormais des légendes au quotidien. Il se confie alors à l’ AlgemeenDagblad, un quotidien de son pays: « Quand je suis entré dans le vestiaire pro pour la première fois, je les ai tous vus. Tous ces champions du monde, tous ces vainqueurs de la Ligue des Champions, tous ces gars qui avaient été élus Joueur de l’Année. Évidemment, tu ressens une certaine tension. Au Bayern, les nouveaux joueurs sont brièvement présentés au groupe, et après ça, il faut y aller à fond à l’entraînement. Mais honnêtement, quand j’ai regardé autour de moi et que j’ai vu Thomas Müller, Robert Lewandowski, Manuel Neuer, Jérôme Boateng, David Alaba… Et tous les autres. »

Joshua Zirkzee:
Joshua Zirkzee: « Quand je suis entré dans le vestiaire pro du Bayern, j’ai vu tous ces champions du monde, ces vainqueurs de la Ligue des Champions, ces gars qui avaient été élus Joueur de l’Année. »© BELGAIMAGE

Oui, mais…

L’ascension à la vitesse V-V’ est suivie par un coup de moins bien. Il faut croire que Joshua Zirkzee prend un peu les choses à la légère, se relâche. Flick le voit et le renvoie en réserve durant la saison 2020-2021. Peut-être sous le coup de la frustration, l’attaquant pète un câble, commet une faute assez violente sur le gardien adverse et est exclu. Pas le genre de la maison. Il n’arrive pas à confirmer tout le bien qu’on a dit de lui quelques mois plus tôt. Il est aussi frappé par le Covid. À la même période, le Bild l’accuse de ne plus mettre le pied à l’entraînement. De se croire déjà arrivé. Zirkzee est dans le dur. Il est prêté à Parme. Où ça ne se passe pas bien. Il joue à peine. Parce qu’il a des blessures, et aussi parce qu’il n’est pas bon. Son aventure italienne d’une demi-saison est un gros échec. Son bilan chiffré, en 2020-2021, est dramatique: pas un seul but marqué.

À Munich au culot vs jeu (anglais) interdit

Joshua Zirkzee reste un joueur suivi par plusieurs grosses écuries européennes. Il est aujourd’hui à Anderlecht, mais il aurait pu se retrouver ailleurs parce que le Bayern avait reçu d’autres propositions de prêt. Et le Sporting n’a pas obtenu d’option d’achat, ce qui prouve que les Bavarois continuent à croire en lui. En fait, ça fait des années qu’il suscite la curiosité un peu partout en Europe. Au moment où il a quitté Rotterdam pour Munich, il aurait pu aller ailleurs aussi: à l’Ajax, au PSV, à Manchester United, à Everton, à Arsenal, à Benfica. Son exil est parti d’un malentendu et d’une frustration. Il a vu que des coéquipiers recevaient un contrat pro, et à lui, on ne proposait rien. Il a interprété ça comme un manque de confiance. Des gens du Bayern étaient venus le scouter, mais dans ces matches-là, il n’avait pas été bon. Alors, sûr de lui, il a demandé un test à Munich. Il a été brillant là-bas. À ce moment-là, la direction de Feyenoord avait réfléchi et lui avait préparé un contrat. Mais pour lui, la relation de confiance était cassée. Joshua Zirkzee a son orgueil, on tient là un gars sûr de lui, qui sait ce qu’il veut.

Oui, mais…

Parfois, il va trop loin et trop vite. Prenez cette période où il terminait sa vie rotterdamoise. Il s’est cassé, sans rien dire à personne. Il est parti passer un test à Everton, donc sans l’accord de son club. Avec les Toffees, il a disputé deux matches dans un tournoi international en République tchèque. Illégalement, donc. Ronald Koeman entraînait alors Everton. Ce n’était pas un hasard. Feyenoord a contacté Everton pour recevoir des éclaircissements, les Anglais n’ont pas pris la peine de répondre.

Lewandowski vs nobody

Joshua Zirkzee est parfois comparé à Romelu Lukaku. Une question de dimensions physiques. Mais surtout, il est présenté comme le possible successeur de Robert Lewandowski à la pointe de l’attaque du Bayern. C’est en tout cas ce qu’on disait de lui en Allemagne quand il a obtenu ses premières minutes en équipe A. Dans la hiérarchie, il commençait à passer pour le premier remplaçant du Polonais, il figurait donc carrément à la deuxième place dans le classement des attaquants du club. Lui-même a déclaré plusieurs fois qu’il voulait devenir, à terme, le numéro 9 attitré du Bayern. Pour étayer son discours, il rappelait ses statistiques XXL avec l’équipe B.

Oui, mais…

Mais ça, c’était hier. Parce que le Néerlandais n’a pas confirmé entre-temps. Et c’est pour ça qu’il se retrouve pour une saison dans le championnat de Belgique. Quand il y a Robert Lewandowski, Kinglsey Coman, Eric Maxim Choupo-Moting, Serge Gnabry, Thomas Müller et Leroy Sané dans le noyau pour marquer des buts, ça laisse peu de place pour un gamin qui a encore tout à prouver, qui n’a pas encore confirmé ses débuts de rêve. Joshua Zirkzee est chez nous pour la relance. Soit il fera comme Lukas Nmecha et profitera de son passage à Anderlecht pour trouver un contrat plus haut. Soit il suivra le même chemin que tant d’autres jeunes pépites encensées trop tôt. Et là, ce sera compliqué pour la suite.

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