Charly Musonda: l’itinéraire d’un talent gâché (ou encore caché ?)
Légende de Neerpede, promesse de Chelsea, intermittent du spectacle à Séville puis abonné aux infirmeries et aux salles de sport du monde entier, Charly Musonda Junior n’a que 25 ans, mais déjà plusieurs vies dans le rétroviseur. Sans pour autant se défaire de l’étiquette paradoxale d’une promesse dont la carrière n’a pas encore vraiment commencé. Talent gâché ou encore caché? Mission de détective, sur les traces éphémères et effaçables d’un phénomène resté coincé dans les starting-blocks.
Il y a toujours plusieurs façons de raconter une histoire. Charly Musonda Junior a choisi Instagram. Avec les avantages d’une autobiographie mouvante, corrigeable au rythme des posts supprimés ou des stories soigneusement choisies. Parmi la trentaine de publications qui jalonnent sa page, il y a beaucoup de Chelsea, pas mal de résilience et un peu de Levante. Parce que c’est au sud-est de l’Espagne, dans l’antichambre du football ibère et sous le maillot de l’autre club de Valence que l’ancien enfant prodige du jeu belge a décidé de lancer son reset.
Musonda était intouchable à Anderlecht. Tout le club avait si peur de le perdre qu’il n’était jamais mis face à ses erreurs.» Dirk Gyselinckx, ancien formateur du RSCA
Contre Cartagena, après un peu plus de 81 minutes de jeu, son entrée à la place d’Enric Franquesa met un terme à plus de trois années de disette professionnelle. Conséquence douloureuse d’une blessure aux ligaments postérieurs du genou qui, pour beaucoup de spécialistes consultés, aurait l’odeur nauséabonde d’une fin de carrière. Là où d’aucuns verraient le coup dur de trop, Charly voit un chemin. Une histoire, qu’il raconte à la BBC au printemps 2021, après son retour sur les pelouses de l’Académie des Blues au bout d’interminables semaines de rééducation et de séances solitaires, souvent sous le soleil du Golfe: «Je crois que si je reviens, je peux encore jouer pendant une bonne dizaine d’années. J’arrive dans le prime de ma carrière. C’est mon but.»
Les rêves de Charly ont toujours été précis. Bob Browaeys est bien placé pour en parler, lui qui aimait exiger de ses jeunes internationaux qu’ils couchent leur futur idéal sur papier. «Je demande toujours à mes joueurs d’écrire un plan de carrière», confirme celui qui a dirigé Mus’ pour ses débuts avec les sélections d’âge des Diables. «En U16, Charly disait qu’il voulait devenir champion du monde avec la Belgique au Qatar.» Les plans ont forcément changé, au fil d’une histoire qui est loin de s’être passée comme prévu. Instagram a soigneusement effacé les méandres, mais ceux qui ont côtoyé les pieds les plus choyés de l’histoire de Neerpede ont la mémoire moins sélective.
LE CHOUCHOU DE NEERPEDE
Très tôt, le fils de Champagne Charly agite les bruits de couloir de l’académie mauve. «J’étais en U11 et il était en U12», rembobine Julien Ngoy, aujourd’hui à Malines après avoir tenté, comme Mus’, l’aventure anglaise adolescente. «Il était assez connu là-bas. Nous, on faisait nos trucs dans notre coin mais lui, dès qu’il faisait quelque chose, tout le monde en parlait. Quand tu es à Anderlecht, tu es habitué à ce qu’on te dise que tu es fort, à ce qu’on en fasse des tonnes autour de toi et de ton talent. Mais avec Charly, c’était encore différent.» C’est l’époque où, à Neerpede, on murmure que Jean Kindermans, éleveur en chef du jeune blé mauve, aime répéter qu’en cas de dispute avec sa femme, il va «voir jouer Mus’ et ça va mieux».
«Musonda était intouchable à Anderlecht», embraie Dirk Gyselinckx, ancien coordinateur des jeunes et bras droit de Kindermans chez les Bruxellois.. «Tout le club avait si peur de le perdre qu’il n’était jamais mis face à ses erreurs.» L’histoire du passe-partout, qui donne à Charly un accès complet à tous les bureaux et infrastructures de Neerpede dès son plus jeune âge – privilège normalement réservé aux dirigeants et à l’équipe première – est désormais célèbre. Au bord des étangs de l’ouest de la capitale, on raconte aussi que plusieurs coaches ferment volontairement les yeux quand le prodige local brille par son absence à l’occasion d’un test physique ou d’une séance plus musclée. Hypnotisés par cette conduite de balle soyeuse, les yeux toujours levés vers l’horizon sans jamais se poser sur un ballon qui semble entièrement sous le joug de ses pieds, certains accepteraient d’oublier le reste, d’autant plus que le joueur était acclamé par les plus hautes sphères du club. «Sa technique était fabuleuse, mais son rendement dans le dernier tiers du terrain était trop faible. Il jouait trop bas, marquait trop peu, donnait à peine quelques assists», synthétise Gyselinckx.
Je crois que si je reviens, je peux encore jouer pendant une bonne dizaine d’années. J’arrive dans le prime de ma carrière. C’est mon but.» Charly Musonda Junior
Contestées par d’autres coaches ayant eu le phénomène entre les mains, les limites ne freinent en tout cas pas les plus grands clubs européens, qui se bousculent aux portes de Neerpede pour s’offrir ses services. Convoité par le Barça, dragué par une bonne partie de l’Angleterre, Charly Musonda Junior prend finalement la route de Chelsea, entamant un parcours que les dirigeants de la formation bruxelloise utilisent aujourd’hui pour dissuader leurs plus grands talents de prendre la route de l’étranger trop tôt. Au départ, le plan de Mus’ était pourtant bien différent: débuter en équipe première dès ses seize ans, puis quitter la Belgique avec un Soulier d’or au pied pour partir à la conquête de l’étranger. C’est presque désolé qu’il annonce son choix à Bob Browaeys, avec qui il entretenait une relation particulière chez les jeunes Diables. «Je l’avais tout de suite nommé capitaine», se souvient l’intéressé. «Pas seulement parce qu’il était parfaitement trilingue, mais aussi parce qu’il avait une forme de leadership naturel. Un mois avant notre premier grand tournoi, l’EURO U17, il m’a envoyé un PowerPoint avec des images de nos matches, et m’a demandé s’il pouvait le montrer aux joueurs. Il avait une vraie idée de la façon dont nous devions aborder le tournoi.»
Une anecdote qui en rappelle d’autres, sorties au pluriel des vestiaires de Neerpede. «J’ai fait ça souvent, en vérité», se marre Charly à la fin de l’année 2016, quand on lui évoque l’anecdote initialement racontée par Mo Ouahbi, l’un de ses premiers formateurs chez les Mauves. «Je voulais toujours savoir ce qu’on pouvait faire pour gagner le match. J’avais dix ans, et on peut dire que j’avais déjà une grosse personnalité», enchaîne celui qui, quelques instants plus tôt, répondait aux journalistes internationaux rassemblés dans le lobby d’un hôtel de l’est de Bruxelles en jonglant sans difficulté entre français, néerlandais, anglais et espagnol.
«Il avait son avis sur tout», confirme Roel Clement, son coach en U15 à Anderlecht, proche de Charly Senior et chauffeur récurrent de la progéniture sur les trajets entre son domicile et les terrains d’entraînement. «Surtout sur le football, en fait. Il était occupé avec le jeu du matin au soir. On parlait du Barça, du Real… Et il savait tout. Y compris les détails tactiques.» Quand Chelsea met la main sur le phénomène et sa famille, le sujet fait grincer énormément de dents dans les bureaux des dirigeants bruxellois, mais les quelques doutes émis sur sa réussite future dans la jungle footballistique londonienne sont alors mis entièrement sur le compte d’une rancœur trop tenace.
L’IMPATIENT ANGLAIS
Chez les Blues, on est néanmoins convaincu du futur brillant du wonderboy belge. «À l’époque, c’était LE talent», se souvient le scout Piet de Visser, voix très écoutée à Cobham, le centre d’entraînement bleu de Londres. «Le talent à Anderlecht, d’abord, mais aussi quand il est arrivé à Chelsea, où on l’a rapidement surclassé au sein de l’Académie.» Figure de proue de l’équipe qui remporte la Youth League, version miniature de la Ligue des Champions, en 2015, Mus’ est rapidement invité à s’entraîner avec les pros. Son insolence, capable de mettre un défenseur chevronné les fesses au sol en un crochet ou de caler un petit pont à un cadre de l’équipe, en agacent certains et rappellent à Eden Hazard ses jeunes années lilloises. Le Diable prend son compatriote sous son aile, tout comme les autres francophones du vestiaire. Charly est un talent qu’on n’oublie pas. «Qu’est-ce que tu as fils?», demande ainsi Didier Drogba sur Instagram quand Musonda poste une photo, jambe bandée et pouce levé, depuis son lit d’hôpital anversois à l’automne 2019.
Je trouve dommage qu’il ait eu une telle malchance avec les blessures, mais s’il n’a pas percé jusqu’à aujourd’hui, ce n’est pas seulement à cause de ça.» Piet de Visser, scout
À Stamford Bridge, Charly Musonda Junior rêve de contredire une loi. Celle qui veut que les jeunes talents du monde entier qui débarquent en masse à l’Académie ne finissent presque jamais par s’installer durablement dans le onze professionnel. «Chelsea, c’est un club très organisé au niveau des prêts», confirme Christophe Lollichon, entraîneur des gardiens des Londoniens jusqu’en 2016 puis nommé responsable des gardiens prêtés par le club, et donc aux premières loges des discussions qui animent la cellule supervisant les joueurs prêtés. «Personne ne débarque comme ça à quinze ans en rêvant de l’équipe première. Or, c’est l’impression qu’a parfois donnée Charly. Évidemment, il était perçu comme un joueur avec un talent extraordinaire. Vitesse, accélération, élimination. Des choses assez rares et pour lesquelles des clubs comme Chelsea sont prêts à mettre de l’argent. Mais dans ce genre d’investissement, il y a une période de préparation inévitable.» Celle qu’a par exemple traversé Tammy Abraham, avec ses 127 matches pros éparpillés entre Bristol, Swansea et Aston Villa avant de véritablement recevoir sa chance au Bridge. Une expérience également vécue par Mason Mount (83 matches pour Vitesse puis Derby County) ou Reece James (46 matches avec Wigan) avant de conquérir leur place au sein du onze blue. «Charly ne semblait pas mesurer le chemin nécessaire», boucle Lollichon.
À l’heure de choisir son premier point de chute professionnel, Mus’ fait effectivement la fine bouche. Les candidats sont pourtant nombreux, Yannick Ferrera – qui l’a connu à Neerpede – rêvant même de lui faire fouler la pelouse de Sclessin. «J’ai un plan pour ma carrière, et je ne voyais pas une situation où je revenais jouer en Belgique», explique plus tard le dribbleur, une fois installé dans le noyau du Betis. «C’étaient mes débuts, il fallait bien y réfléchir. Je voulais représenter quelque chose de nouveau, que le monde découvre. Si je reviens en Belgique, le monde ne me découvre pas. Tu retournes d’où tu viens. Oui, il y aura des gens en Belgique qui veulent te voir, mais ça se limitera au pays. À part ça, il n’y aura rien du tout.» Pour parfaire le récit de sa carrière, qui pourrait se faire dans les langues de Shakespeare ou de Goethe, le Diablotin opte finalement pour la Liga, centre d’attention des amateurs de football parce qu’elle regroupe encore Lionel Messi, Cristiano Ronaldo et Neymar Junior. En quête d’un remplaçant pour Gaël Kakuta, le Rayo Vallecano frappe à la porte. Le coach Paco Jémez est sous le charme de ses facultés en un-contre-un, mais c’est finalement le plus médiatisé Betis sévillan qui décroche la timbale.
FRISSONS DE SÉVILLE ET RÊVES D’EURO
«J’ai été le voir jouer à Séville, un jour», rejoue Roel Clement, des étoiles plein la bouche. «Quand il avait la balle, les gens se redressaient. Ça, c’est la preuve que tu as quelque chose.» Dans les tribunes du stade Benito Villamarín, Mus’ distribue les frissons en même temps que les crochets. En quelques apparitions, son nom s’invite jusqu’aux conférences de presse de Marc Wilmots, alors en train de peaufiner la liste de 23 noms qu’il emmènera à l’EURO français. Au début du mois de mars, le sélectionneur est même aperçu dans les tribunes de l’enceinte de l’Espanyol, d’où il voit le diamant noir-jaune-rouge offrir une merveille de passe décisive à Rubén Castro, mais ne le sélectionne pas pour affronter le Portugal dans la foulée. «Il n’a encore joué que huit matches avec le Betis», tempère alors Willie. «Nous l’avons scouté, il est bon, mais il faut y aller step by step.» Finalement laissé à la maison pour suivre l’été français, Musonda relativise quelques semaines plus tard: «J’ai regardé les matches tranquille, je me suis bien préparé physiquement et dans la tête pendant les vacances et je me suis dit que la prochaine grande compétition avec les Diables, j’y serais.»
C’est là, sans doute, que le train déraille.
Dans le vestiaire sévillan, celui que le noyau surnomme Pogbita («le petit Pogba») pour sa ressemblance physique avec le milieu français séduit autant qu’il irrite, notamment quand il déclare dans une interview à Marca que «mon joueur préféré, c’est moi». Proche du talentueux Dani Ceballos, moins apprécié par certains vétérans du groupe bético, Musonda manque la saison de la confirmation, souffre d’une blessure au genou et est rapatrié à Londres dès le mois de janvier 2017 pour accumuler quelques apparitions avec les U23 des Blues et soigner ses ennuis physiques, pas toujours au sein du club. «L’un de ses problèmes, c’est qu’il ne faisait pas facilement confiance, notamment vis-à-vis de notre staff médical», pointe Lollichon. «C’est arrivé qu’il disparaisse dans la nature plusieurs jours sans qu’on sache où il était. Il faisait appel à d’autres personnes, il avait un cercle personnel qui interférait sans cesse, et c’était compliqué de gérer ses périodes de blessures.»
On dit qu’il est cramé, mais qu’est-ce que ça veut dire au juste? S’il joue en D2 espagnole, c’est que son genou tient le coup. Et le cardio, il l’a.» Christophe Lollichon, responsable des gardiens prêtés par Chelsea
Le problème, c’est que ces moments se multiplient. Si Antonio Conte lui offre quelques apparitions «chez les grands», c’est un nouveau prêt qui l’attend en janvier 2018. Direction Glasgow, le bouillant Celtic et son tacticien Brendan Rodgers à la barre. Les apparitions sont sporadiques, les statistiques décevantes. Prévu pour dix-huit mois, le prêt prend déjà fin en juin. Les versions divergent: certains pointent un coach trop conservateur par rapport à ses hommes de toujours, d’autres évoquent un Musonda impatient et trop ambitieux pour passer ses week-ends sur les bancs sans gloire des confins de l’Écosse. Chelsea l’envoie donc à Arnhem, dans son habituel garage à talents, sur les pelouses d’une Eredivisie censée convenir sur mesure à ses qualités techniques. Les ligaments de son genou limitent son expérience néerlandaise à 80 minutes, éparpillées sur deux saisons. La malchance s’ajoute au diagnostic d’une carrière qui prend doucement l’eau. «Je trouve dommage qu’il ait eu une telle malchance avec les blessures, mais s’il n’a pas percé jusqu’à aujourd’hui, ce n’est pas seulement à cause de ça», signale Piet de Visser. «Je crois qu’à un moment, tout le monde l’a vu trop haut. Les gens autour de lui l’ont trop vite mis sur un piédestal.»
UNE LÉGENDE À PRÉSERVER
Comme si l’absence ne faisait qu’entretenir la légende, ils sont alors très rares à encore voir Charly. Pendant le confinement, le Diablotin distille sur Instagram les traces d’un entraînement censé sculpter un physique plus apte aux exigences musculaires du haut niveau, en même temps qu’une récupération des facultés d’un genou trop longtemps endormi. Il réapparaît quelques fois en Premier League 2 avec les jeunes Blues, malgré une carte d’identité ayant dépassé le 23e anniversaire, mais finit surtout par mettre un terme à sa longue aventure londonienne. Les adieux, une lettre longue de sept images sur Instagram, se concluent comme un défi lancé à un destin qui n’a pas lésiné sur les obstacles: «Revenir sur le terrain après quatre années sans jouer au football serait un accomplissement incroyable, étant donné qu’on m’avait donné 20% de chances de rejouer un jour au plus haut niveau.»
Reste alors à trouver un nouveau point de chute.
Après une si longue période de pluie, quoi de mieux qu’un arc-en-ciel pour ensoleiller à nouveau sa carrière? Au milieu du mois de juin, la présence de Charly Musonda Junior aux entraînements de Zulte Waregem fuite dans la presse. «Il n’est pas là en test, mais parce qu’il cherchait du rythme et de l’entraînement», confie alors Mbaye Leye au Nieuwsblad, tout en admettant que «le scénario idéal, c’est qu’il reste avec nous. Même un Musonda à 80% de ses capacités peut nous aider. Il doit désormais travailler dur.»
Si Mus’ se retrouve alors dans un club englué dans la deuxième partie de tableau de la Pro League, c’est notamment grâce au réseau belge de plus en plus étendu de son homme de confiance, Jean-Willy Ngoma. Un personnage sulfureux, aux pratiques parfois douteuses racontées dans nos colonnes à la fin de l’année 2017, mais désormais proche de Pini Zahavi pour lequel il gère entre autres la carrière de Jackson Muleka ou intervient dans des discussions qui rapprochent occasionnellement Roberto Martínez de l’un ou l’autre club anglais. Musonda le charge de lui trouver un club, et Jean fait jouer ses relations pour le présenter à Leye. Le courant passe bien, et donne le coup d’envoi de cette période que personne n’ose qualifier de test, la réputation du joueur restant bien trop importante pour imaginer un qualificatif si dépréciant.
Dans le vestiaire du Betis, Charly séduit autant qu’il irrite, notamment quand il déclare dans une interview: «Mon joueur préféré, c’est moi».
L’expérience sera néanmoins de courte durée. «Il a dû faire quatre ou cinq entraînements avec nous au total, pas plus que ça», raconte Jelle Vossen, taulier du Essevee. «On voyait évidemment ses qualités, parce qu’il a un talent extraordinaire mais physiquement, il n’était pas prêt. Comme les entraînements de Mbaye sont assez durs sur ce point, je crois que ça a été compliqué pour lui. Quand ton corps ne veut pas, c’est difficile. Un jour, au matin, sans vraiment d’explication, il n’était plus là.»
Une fois de plus, on raconte que le cercle de Charly Junior est redevenu vicieux. Blessé au pied, le joueur décide de se soigner chez lui, quittant à la hâte le centre d’entraînement de Waregem et la chambre d’hôtel dans laquelle le club l’avait installé. Sans donner de nouvelles, lançant une nouvelle fois le monde du football belge dans cette éternelle partie de «Où est Charly?».
RELANCE À VALENCE
C’est justement en jouant sur le clin d’œil patronymique que le club de Levante annonce l’arrivée du Diablotin au stade Ciutat de València. Une enceinte de 26.000 places, et malgré tout un repaire discret, à l’abri des regards belges qui l’auraient scruté de trop près pour que le voile de légende puisse survivre. Ceux qui l’ont côtoyé lors de son bref séjour sur les terres de ses débuts dépeignent ainsi un garçon en panne de confiance autant qu’en quête de repères, tellement soucieux de son image qu’il préfère le secret d’une D2 à la confrontation avec la réalité du sol belge.
Le 9 août dernier, les Granotes annoncent l’arrivée sur leurs pelouses d’entraînement de Charly Musonda Junior, soumis à un test sous les yeux du coach tunisien Mehdi Nafti. L’initiative est prise par le directeur sportif Felipe Miñambres, ancien du Celta de Vigo désormais à la manœuvre un échelon plus bas. Un homme dont la presse locale souligne le goût du risque, lui qui a déjà enregistré la venue de l’ancien Brugeois Wesley Moraes dont on dit le genou irrécupérable. Au bout d’une dizaine de jours passés à s’entraîner le sourire aux lèvres sous le soleil espagnol, Mus’ place sa signature au bas d’un contrat de deux ans, assorti de deux années supplémentaires en option.
Les questions restent au moins aussi nombreuses que les matches disputés. Celle du physique, soulevant des craintes en Flandre Occidentale au début de l’été, est en tout cas balayée par Christophe Lollichon: «On dit qu’il est cramé, mais qu’est-ce que ça veut dire au juste? S’il joue en D2 espagnole, c’est que son genou tient le coup. Et le cardio, il l’a. Moi, je l’ai vu s’entraîner il y a de ça encore un an, je peux vous dire qu’il donnait. Il avait un planning aménagé, mais quand il était sur le terrain, il performait.»
D’Espagne, de premières bribes d’une nouvelle histoire parviennent. Le 16 septembre dernier, le Basque Luca Sangalli est la première victime de ce crochet de l’extérieur du pied droit qui était très vite devenu sa signature à Neerpede, son geste auquel aucun adversaire ne trouvait la parade. Cette fois, l’astuce n’amène qu’à une passe latérale. Son deuxième duel ne provoque qu’un centre raté. Le retour au sommet sera pour plus tard. Arrivera-t-il un jour? Personne n’y croit sans doute plus fort que lui-même. « It will take time, but step by step into the decade», lance le joueur. Sur Instagram, toujours. Presque un écho à cette phrase, dégainée fin 2016 au détour d’une interview donnée depuis un fauteuil aux étranges airs de trône: «Chaque phénomène est différent. C’est peut-être aussi pour ça que je vais créer ma légende à moi.»
S’il réalise un jour son biopic, le méticuleux conteur Charly Musonda Junior ne laissera sans doute à personne le soin de s’occuper à sa place des moindres détails du scénario. Avec l’espoir que le décor ne se limite pas à une voie sans issue.
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