Azzedine Ounahi, comment un gamin de Casablanca a choqué l’Espagne
Azzedine Ounahi fait partie de ceux qui auront l’étiquette de révélation du Mondial durant toute leur carrière. Etincelant dans le Maroc de Regragui, plongée dans l’histoire de ce jeune médian marocain qui est passé de la cinquième division française au carré d’or de Coupe du Monde en moins de 3 ans.
Avant d’atterrir à Marignane cet hiver, Azzedine Ounahi a eu une trajectoire pour le moins atypique. Né en 2000, le joyau marocain débute, comme dans toutes les belles histoires, par faire ses premiers passements de jambes dans les rues de Casablanca, un grand classique des techniciens du ballon rond. Plus fort que ses potes, il se fait vite repérer et rejoins l’un des 2 fameux clubs de la ville, les verts et blancs du Raja. Il est alors suivi dès ses 12 ans par l’Académie Mohammed VI située à Rabat, qu’il ne rejoindra que 3 ans plus tard, lorsque le père Ounahi accepte de laisser son fils quitter le foyer pour partir tenter sa chance dans la capitale marocaine. Cette académie, créée sur mesure par le Roi du Maroc de l’époque, sert à redonner de l’élan à la formation des talents locaux, en perte de vitesse depuis de (trop) longues années. Aujourd’hui, l’Académie, qui utilise des méthodes de formation européennes, est l’un des poumons du 11 des Lions de l’Atlas où, en plus de Ounahi, Nayef Aguerd et Youssef En-Nesyri en sont issus. Le jeune marocain, très technique depuis son enfance, impressionne par sa justesse et sa facilité d’élimination qui comble son physique très frêle.
En 2018, tout juste majeur, Azzedine traverse la Méditerranée et rejoint Strasbourg. Malheureusement, les 2 années passées en Alsace se soldent par un échec où il passe le plus clair de son temps avec l’équipe réserve, en National 3. Ounahi charge alors son agent de lui trouver un nouveau club, avec l’objectif de rebondir vite dans un encadrement professionnel. Celui-ci va traverser l’Hexagone et lui trouver un nouveau point de chute, au sud de la Normandie, à l’US Avranches, en championnat National, faute d’avoir pu convaincre les clubs d’au-dessus. En arrivant là-bas, le jeune Azzedine est déçu, convaincu d’avoir les qualités pour jouer plus haut mais il y trouve un coach, Frédéric Reculeau, qui lui donne beaucoup de confiance et qui parle le même football que lui. Un football composé de jeu de possession et de combinaisons au sol qui lui permet d’exploiter toutes ses qualités. Son entraineur est bluffé par ses qualités techniques ainsi que par son volume de jeu et en fait rapidement un pion essentiel de son échiquier. Conscient d’avoir mis la main sur une pépite, Reculeau tente de modifier certains aspects du jeu de Ounahi afin de tirer le maximum de ses qualités au vu de la faiblesse musculaire du Marocain. Il lui conseille ainsi d’éviter certains duels et de miser sur son intelligence de jeu, faisant passer un cap à l’élégant médian durant la saison 20-21 covidée. Participant à 27 rencontres dans un championnat jugé rugueux, Ounahi tape dans l’œil de quelques clubs de l’élite, intéressés par son volume de jeu et ses stats de marathonien. Le SCO d’Angers rafle finalement la mise un an seulement après son arrivée à Avranches.
Enfin professionnel
En Ligue 1, Azzedine peut enfin éclabousser de son talent. Revanchard, il débute son aventure en Maine-et-Loire avec une idée dans le coin de sa tête : rejoindre la sélection marocaine. Avec les Angevins, son toucher de balle et ses feintes de corps vont rapidement marquer les esprits et ce, dès sa première apparition, lorsque Ounahi inscrit le dernier but d’une clinquante victoire 3-0 face à Lyon d’une gracieuse conduite de balle conclue par un doux plat du pied. Placé comme numéro 8 box-to-box dans le 3-5-2 de Gérald Baticle, le Marocain s’éclate. Le coach français, fan de Jürgen Klopp et Pep Guardiola, aime le beau jeu et cherche toujours à jouer vers l’avant, accordant une grande liberté aux joueurs offensifs. Un système de jeu qui peut correspondre à Ounahi, lui qui mange les kilomètres durant les matches. Il finit régulièrement les matches avec 13 kilomètres dans les jambes et même 14, lors d’un match face à l’OM, qui le place parmis les meilleures performances du championnat. Le milieu marocain progresse à vue d’œil et ses crochets courts, ses petites touches de balle et ses dribbles rapides vont lui permettre de réaliser son rêve en étant appelé par Vahid Halilhodzic pour la Coupe d’Afrique qui se déroule au Cameroun, au début de l’année 2022. Azzedine s’installe petit à petit dans le milieu des Lions de l’Atlas et change de statut lorsqu’il plante un doublé, en mars lors du barrage retour face au Congo, propulsant le Maroc vers la Coupe du Monde au Qatar. Le départ de Vahid et l’arrivée de Walid Regragui ne changent en rien le statut du jeune technicien. Aligné plus bas avec Regragui, Ounahi démontre ses qualités et devient un milieu de plus en plus moderne.
Révélation du Mondial
Ce fan d’Iniesta débarque au Qatar en illustre inconnu aux yeux du football mondial, où il est titulaire lors des 3 matches de groupe des Lions de l’Atlas, surprenant 1er devant la Croatie et la Belgique. Ounahi monte de plus en plus en puissance et sort un match 5 étoiles en 1/8e de finale face à l’Espagne qui subjuguera Luis Enrique : “J’ai été agréablement surpris par le numéro 8. Je ne me rappelle plus de son nom, j’en suis désolé… Mon Dieu, d’où sort ce gars ? Il joue vraiment bien ! Il m’a surpris ». Des propos qui résument parfaitement la prestation du Marocain, grand artisan de l’élimination de la Roja. Quelques jours plus tard, le joyau de Casablanca remet son costume de Roi du Maroc et parait plus fort que jamais. Omniprésent, il effectue les retours défensifs, récupère les ballons, se projette, provoque, dribble et est même à la base du pré-assist sur le seul but du match, inscrit par El-Nesyri, qui qualifie pour la première fois une nation africaine dans le dernier carré de Coupe du Monde. La presse internationale s’extasie sur le phénomène Ounahi et le cite dans les plus grands clubs du continent. La défaite en demi-finale face à la France ne changera pas le nouveau statut du jeune milieu marocain de 22 ans en véritable révélation du Mondial.
Logiquement, plus personne ne le voit continuer l’aventure sous le maillot angevin tant il a impressionné durant le séjour au Qatar. Son coffre impressionnant, combiné avec sa technique élégante, lui permet d’être à mi-saison, le deuxième meilleur dribbleur du championnat. Seul … Lionel Messi réussit plus de dribbles que lui. Ounahi se sent prêt à franchir un palier et veut évoluer dans une équipe du haut de tableau, plus offensive, lui qui a pour l’instant surtout joué dans des blocs-bas. Alors que le Barça, Leicester ou Naples paraissaient intéressés, c’est finalement l’OM qui parvient à faire signer le Marocain. Après l’abandon de la piste Ivan Ilic, Pablo Longoria se tourne vers Ounahi et Ruslan Malinovskyi pour devenir les nouveaux leaders techniques de Igor Tudor et palier numériquement les départs de Gerson, retourné au Brésil et Pape Gueye, parti rejoindre Jorge Sampaoli à Séville. Une somme de 8 millions d’euro est évoquée, une somme bien dérisoire pour un joueur de son talent pour qui l’OM a réalisé une excellente opération. Lui pour qui tout s’est déroulé très vite, ne veut pas brûler les étapes et en choisissant Marseille, il veut clairement se donner le temps de passer au step suivant. Comme lors de ses débuts angevins, l’histoire se répète pour Azzedine. Première entrée au jeu et premier but sous le maillot phocéen, quelques jours après son arrivée, à Nantes, histoire de rapidement se faire adopter par le bouillant public marseillais.
Tout comme son idole, Ounahi a opté pour le numéro 8 à Marseille. Sous la protection de la Bonne Mère, Azzedine sera un joueur à suivre les prochaines saisons et qui aidera sans doute l’OM à se mettre droit au but.
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