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5 transferts, l’idée Vanzeir et un scout viré: le premier mercato animé d’Olivier Renard à Anderlecht
Cinq nouveaux joueurs, un Diable soufflé par le président, un scout licencié et des dossiers épineux: le premier mercato anderlechtois d’Olivier Renard a été agité.
La chemise est sombre et le sourire brillant. Trois mois après son retour en Belgique, Olivier Renard a son premier mercato dans le rétroviseur et le raconte avec satisfaction et aisance. Dans le milieu, si on présente souvent le directeur sportif d’Anderlecht comme un loup solitaire à l’heure de se retrousser les manches, tous vantent également son sens de la politique. L’homme sait se positionner dans un milieu parfois hostile et vendre ses réussites à la presse, avec un storytelling teinté de bons mots qui s’impriment dans les mémoires et en haut des pages des journaux. On appelle ça «le sens de la formule». Morceau choisi: «J’aime être critiqué quand j’achète un joueur. Et quand ce même joueur quitte le club et qu’on se demande ce que le club fera sans lui, alors c’est que j’ai fait du bon boulot.»
Les mots concernent l’arrivée tardive, inattendue et passée sous les radars d’Elyess Dao, jeune attaquant d’Amiens (deuxième division française) acheté 200.000 euros par le club français en début de saison et revendu quelques mois plus tard «pour dix fois son prix d’arrivée», glisse-t-on autour du puissant et rapide attaquant marocain. Un joueur sorti du chapeau d’Olivier Renard, mais scouté dans les moindres détails par la cellule de recrutement des Mauves avant de valider sa venue dans la capitale.
Elyess Dao est le dernier venu d’un mercato plutôt agité au sein de la maison mauve, avec cinq transferts entrants dont Cédric Hatenboer, toutefois laissé en prêt dans son club néerlandais jusqu’à la fin de la saison. De quoi caler Anderlecht dans le peloton de tête des entités belges les plus actives du mois de janvier, puisque seul un Courtrai boulimique dans sa quête de maintien (neuf nouvelles têtes) a été plus actif que le Sporting bruxellois cet hiver. Il faut remonter au début de l’année 2017 pour voir un noyau aussi chamboulé en janvier à Neerpede. La preuve que la méthode Olivier Renard ne se vit pas avec les bras croisés. «Les gens pensent que maintenant, je vais partir trois semaines aux Baléares, mais je travaille déjà sur le mercato d’été», glisse encore le directeur sportif aux médias réunis pour l’écouter.
L’omniprésident
On dit souvent de Wouter Vandenhaute qu’il fonctionne au coup de cœur. Celui qu’il a pour Olivier Renard est authentique. Le président d’Anderlecht, jamais avare d’un chamboulement au sein de la hiérarchie décisionnaire du club, a mis un terme à l’ère danoise en écartant le coach Brian Riemer puis son CEO Sports Jesper Fredberg, et marche désormais main dans la main avec son directeur sportif. Renard, lui, doit composer avec un président très présent, peut-être celui qui pèse le plus sur les transferts de son club dans les organigrammes de l’élite belge.
Il se dit d’ailleurs qu’au début du mois de janvier, alors que les Mauves se lassent des performances trop brouillonnes de Lucas Vázquez (pourtant acheté par Fredberg pour près de cinq millions d’euros) et que la cellule de recrutement cherche depuis de longs mois une doublure à Kasper Dolberg, Vandenhaute a glissé à l’oreille de Renard et de ses recruteurs le nom de Dante Vanzeir, ancien attaquant de l’Union Saint-Gilloise de Felice Mazzù. L’idée n’aboutira jamais, mais confirme l’ombre omniprésente du président sur la destinée sportive de ses couleurs. «J’avais le président plusieurs fois par jour au téléphone ou même dans mon bureau», confirme d’ailleurs Olivier Renard aux journalistes, précisant évidemment qu’il «aime ça»: «Je trouve tout à fait normal qu’il soit au courant de tout.»
Très influent lors de certains transferts du passé, de Benito Raman à Leander Dendoncker en passant par Jan Vertonghen et Thorgan Hazard, Wouter Vandenhaute est sans doute l’élément le plus émotionnel de l’organisation bruxelloise, contrepoids d’une cellule de recrutement où les méthodes modernes autrefois imposées par Peter Verbeke ont survécu aux changements incessants de l’organigramme.
Renard apprivoisé
Rapidement, et alors que l’encadrement qu’il avait connu au Standard ou à l’Antwerp ne l’avait jamais amené à travailler de cette manière en Belgique, Olivier Renard s’est fondu dans le moule plus structuré du recrutement à l’anderlechtoise. On le dit bien plus souvent présent que son prédécesseur dans ses bureaux de Neerpede, se pliant au rituel des réunions régulières alors que ceux qui le connaissent racontent plutôt un homme qui passe de longues heures en solo sur un canapé accompagné de sa tablette où il dévore le plus de matchs possible pour augmenter sa base de données de recrues potentielles. Ainsi, s’il connaissait l’ailier mexicain César Huerta grâce à son passage à la direction sportive de Montréal, il s’est également appuyé sur les nombreux rapports déjà rédigés à son sujet par la cellule de recrutement bruxelloise pour confirmer son intuition et mener à bien le transfert.
Il se dit à Neerpede que tous les dossiers aboutis lors de ce mercato sont le fruit d’une collaboration entre les recruteurs et Olivier Renard, qui intervient également en bout de processus pour valider les joueurs amenés au sein du noyau du RSCA Futures, à la lutte pour son maintien en deuxième division. S’il n’a pas personnellement scouté Enzo Sternal ou Ibrahim Kanaté (attiré pour un montant à sept chiffres dans la capitale) et qu’il aurait sans doute apprécié pouvoir utiliser ces quelques millions supplémentaires pour pouvoir renforcer son noyau A, Olivier Renard est également conscient que maintenir son équipe U23 en D2 est capital pour Anderlecht dans le processus de post-formation des talents éduqués au sein de la maison mauve. Il est probablement tout aussi éveillé au fait que Peter Verbeke, responsable en compagnie de Tim Borguet du recrutement pour les Futures, a également les faveurs de Wouter Vandenhaute et un sens politique indispensable pour exister dans une structure comme celle du RSCA.
L’art de trancher
Les murs ont tout de même tremblé, dans les bureaux anderlechtois, quand les désaccords autour d’un transfert potentiel se sont retrouvés dans la presse. Le nom de Haruna Rasid Njie n’était certes pas totalement inconnu à Anderlecht, puisque le Gambien avait affronté les Bruxellois en Europa League avec le club letton de RFS, mais aucun rapport de recrutement ne justifiait la rumeur d’une offre faite par Olivier Renard pour l’attirer à l’ouest de Bruxelles.
🟣 Infos #RSCA :
— Sacha Tavolieri (@sachatavolieri) January 8, 2025
🇬🇲❌ Haruna Rasid Njie will not be joining Sporting Anderlecht! While all agreements were in place to finalize the deal, a deal that had already sparked much debate internally, the Gambian defensive midfielder dit not meet the usual requirements to complete his… pic.twitter.com/Sseg5ojBV1
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La fuite de désaccords entre les parties «A» et «U23» de la cellule de scouting dans les médias, un peu trop précisément relayés sur X par le journaliste mercato Sacha Tavolieri, a ainsi provoqué la colère des dirigeants mauves et le licenciement d’un membre du recrutement, dont les révélations ont été considérées comme contraires au bon fonctionnement et à la bonne image du club. A Neerpede, on est désormais capable de trancher quand il le faut.
Trancher, justement, Olivier Renard a dû le faire dans plusieurs dossiers. Cela tombe bien: c’est l’un des atouts majeurs vantés par ceux qui l’ont côtoyé dans ses clubs précédents. Quand les recruteurs sont partagés autour d’une nouvelle tête potentielle, il est capable d’appuyer sur le bouton pour activer le deal ou en refermer décisivement les portes. A l’heure de gérer les départs, il a également été ferme sur les cas d’Amando Lapage ou de Francis Amuzu, enfants de la maison invités à aller poser les crampons ailleurs. Ce n’est que le début de la longue gestion de contrats des produits du centre de formation qui s’annonce, puisque les aventures de Théo Léoni et de Yari Verschaeren arrivent à leur terme au mois de juin 2026, échéance de leur bail actuel. «Théo Léoni a reçu une proposition mais prend son temps. C’est son choix, mais ça aurait dû être réglé avant», souffle Renard, soulignant indirectement le manque de réactivité de son prédécesseur qui l’oblige à «courir après le temps sur certains dossiers».
Le jeu de Renard
Anderlecht a donc changé. Encore. Les profils mis sur la table des recruteurs mauves témoignent inévitablement de ce changement de cap, parce qu’ils sont bien différents des joueurs que Fredberg avait encore dans le viseur quelques mois plus tôt.
Désormais flanqué de Thibault Dochy, ancien responsable de la partie légale des transferts devenu directeur technique et historiquement très influent à Neerpede, mais aussi d’un Christophe Lonnoy qu’il avait connu à Sclessin et dont les méthodes plus traditionnelles offrent un précieux contrepoids à une cellule très modernisée ces dernières années, c’est Olivier Renard qui a pris les cartes en main pour dessiner l’Anderlecht de demain.
Avec, derrière lui, un président qui n’est jamais à l’abri de sortir un atout inattendu de sa manche pour le glisser dans son jeu.
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