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Comment jouait l’Hoffenheim d’Alfred Schreuder ?

Guillaume Gautier
Guillaume Gautier Journaliste

Parce qu’on sait peu de choses sur le jeu prôné par le nouveau coach de Bruges, plongée dans les arcanes tactiques du dernier club qu’il a dirigé en tant qu’entraîneur principal.

Quatre saisons ont passé. Dans la foulée de sa première expérience dans le costume de T1, vécue depuis le banc de Twente, Alfred Schreuder a pris son temps sans pour autant le perdre. Deux ans passés aux côtés du wonderboy du coaching Julian Nagelsmann, puis une saison et demi à faire trembler les Pays-Bas et l’Europe dans l’ombre d’Erik ten Hag avec un Ajax spectaculaire. C’est donc avec le bagage rempli d’idées novatrices et de séances d’entraînement planifiées pour les mettre en oeuvre que le Néerlandais succède à son ancien mentor allemand sur le banc d’Hoffenheim au coeur de l’été 2019. Une expérience avortée, stoppée prématurément à quatre matches de la fin de saison alors que le club cher à Dietmar Hopp occupe la septième place de Bundesliga. Tout ça au bout d’une saison entamée par un mercato sortant rémunérateur : les ventes de Joelinton, Kerem Demirbay, Nico Schulz et quelques autres rapportent environ 120 millions d’euros au club du Bade-Wurtemberg.

S’il conserve majoritairement la défense à trois de Nagelsmann dans les premiers mois, Alfred Schreuder se dirige ensuite presque exclusivement vers une ligne arrière à quatre.

Schreuder débarque sur un chantier qui a les moyens de sa reconstruction. Les renforts s’accumulent contre des montants généreux : 14 millions pour Samassekou, 10 pour Skov ou encore 8,5 pour Bebou, alors que les artificiers Andrej Kramaric et Ishak Belfodil restent à bord. Les ambitions sont à la hauteur des investissements, et les premiers pas du Hoffenheim de Schreuder se font avec une défense à trois sous la semelle, marque de fabrique de Nagelsmann. La saison précédente, le polyvalent technicien allemand avait utilisé un socle défensif à trois piliers lors de 23 des 34 rencontres de Bundesliga. Schreuder le fera à neuf reprises lors des treize premières journées, avant de progressivement virer vers une défense à quatre: 12 des 17 matches suivants se joueront avec une ligne défensive à quatre éléments.

Sur la pelouse de la PreZero Arena, la vingtaine de milliers de spectateurs s’habitue alors à voir des relances soignées pour échapper proprement au pressing adverse, souvent agressif sur les prés allemands. Les centraux se rendent disponibles pour Baumann, aidés par le milieu défensif gauche qui s’écarte entre les lignes, profitant de l’appel très haut du latéral gauche pour occuper sa zone. À droite, le latéral est plus à l’intérieur, alors que c’est l’ailier qui occupe la profondeur et la largeur. Tout ça permet à Hoffenheim de s’assurer des sorties de balle propres en attirant la pression adverse, avant de généralement partir à la recherche de la profondeur par un long ballon dans le dos de la défense adverse. Le pourcentage de passes longues évolue ainsi de 10,1% sous Nagelsmann à 11,4 pour les quinze derniers matches sous les ordres de Schreuder, quand le Néerlandais a eu le temps de griffer son équipe.

Hoffenheim est l’une des équipes les moins performantes de Bundesliga sur les transitions défensives.

La vitesse a parfois des airs de précipitation. Dirigée par un milieu de terrain qui s’égare parfois dans des marquages individuels trop stricts sans ballon, l’équipe d’Hoffenheim est particulièrement vulnérable dans les secondes qui suivent la perte de balle. Au pays du gegenpressing, la carence coûte cher, et fait de l’équipe de Schreuder l’une des équipes les moins performantes de Bundesliga sur les transitions défensives. La surface est particulièrement mal protégée, comme en témoignent les 49 buts encaissés dans le rectangle défensif qui placent le club dans la colonne de droite de l’élite allemande en la matière. Le secteur arrière de l’équipe n’est pas non plus aidé par un pressing homme contre homme moyennement assumé, entre un bloc qui va rarement chercher haut et des attaquants en infériorité numérique quand ils chassent le ballon, permettant aux adversaires bien rôdés de faire progresser leur possession sans difficulté pour forcer Hoffenheim à courir après la balle jusqu’à sa propre surface.

Hoffenheim s'aligne généralement avec une ligne de quatre très compacte et essentiellement en zone, précédée par un milieu de terrain à trois qui défend majoritairement en marquage individuel sur les milieux adverses
Hoffenheim s’aligne généralement avec une ligne de quatre très compacte et essentiellement en zone, précédée par un milieu de terrain à trois qui défend majoritairement en marquage individuel sur les milieux adverses© Footballia

Au fil des semaines, les mécanismes offensifs et défensifs hérités de Julian Nagelsmann s’étiolent, et les chiffres des Bleu et Blanc deviennent préoccupants. De 6,59 tirs cadrés par match sous le coach précédent, l’équipe ne s’en crée plus que 4,2 dans les quinze dernières rencontres dirigées par Schreuder. À l’autre bout du terrain, les 5,03 tentatives cadrées concédées ont augmenté, pour atteindre 5,27 en fin de saison 2019-2020. La possession de balle, le nombre de centres et les passes par possession diminuent de concert, comme autant de symboles d’une équipe qui perd progressivement sa maîtrise. La différence d’expected goals par rencontre, positive lors de la dernière saison de Nagelsmann (+0,58), diminue lors des quinze premières sorties du Hoffenheim de Schreuder (+0,19) avant de passer sous la ligne de flottaison (-0,27) en deuxième partie de saison.

En divisant la saison d'Hoffenheim sous Alfred Schreuder en deux, on constate l'étiolement progressif des points forts de l'équipe de Nagelsmann
En divisant la saison d’Hoffenheim sous Alfred Schreuder en deux, on constate l’étiolement progressif des points forts de l’équipe de Nagelsmann© SportFootMagazine et Wyscout

L’aventure allemande d’Alfred Schreuder s’arrête anticipativement, suite à des divergences de vue entre le coach et les dirigeants. Au sein du vestiaire, on s’étonnait parfois des choix posés par un entraîneur qui pouvait froisser ses cadres par une façon de s’exprimer très directe. Certains joueurs importants d’Hoffenheim étaient loin d’être en accord avec ses décisions, et le 9/12 final de la saison (obtenu sans lui) a finalement permis au club de gagner une place au classement. Avec Schreuder, Hoffenheim occupait malgré tout le septième rang de la hiérarchie allemande, avec la neuvième attaque et la neuvième défense de l’élite (50 buts encaissés en trente matches).

Il faut dire que succéder à Julian Nagelsmann n’est pas une mince affaire. Ce n’est pas Jesse Marsch, licencié à Leipzig après vingt rencontres sur le banc de Leipzig, qui prétendra le contraire…

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