Wout van Aert et Remco Evenepoel: si semblables et pourtant si différents
Wout van Aert et Remco Evenepoel nous ont offert cette année une multitude d’émotions fortes. On continue souvent d’insister sur leurs différences et leurs différends! Pourtant, ils ont beaucoup de choses en commun.
C’est passé dans l’oubli collectif chez les amateurs de cyclisme. Quand il était un jeune cyclo-crossman, Wout van Aert tombait parfois dans le piège des réactions émotionnelles, des gestes cassants, aussi bien vis-à-vis du public que dans certaines interviews. Jusqu’au jour où son coach de l’époque, Niels Albert, ex-rentre-dedans lui aussi, lui a fait remarquer qu’il n’était pas dans le bon. Van Aert a retenu les leçons de son mentor, il a gagné en sérénité, il est devenu plus adulte. Sans pour autant abandonner sa spontanéité et son art de dire les choses.
Dans un premier temps, il passait pour un outsider dans les labourés, derrière l’imbattable Mathieu van der Poel. Puis il est devenu un cador de la discipline, surtout quand il a commencé à éclater sur route. Avec son nouveau statut de star, il a appris à composer avec la pression, les attentes. Le jeune cyclo-crossman qui flanchait de temps en temps à cause du stress, c’était hier. Cette métamorphose, il la doit notamment à son coach mental, RudiHeylen, qui lui a appris à se concentrer sur les choses qu’il pouvait contrôler. Sa communication améliorée et ses victoires ont boosté sa cote de popularité, en Belgique mais aussi ailleurs.
Le parcours de Remco Evenepoel est différent. On n’a pas, ici, un outsider devenu vedette. Parce qu’à 18 ans, il avait déjà une étiquette de star collée dans le dos. Les fans de cyclisme sont partagés dans leur analyse, encore plus à une époque où les médias sociaux ont pris une place qu’ils n’avaient pas encore quand Van Aert a commencé à éclore. Même après son titre de champion du monde, cette dualité demeure. Surtout à l’étranger, où le geste d’Evenepoel au moment de passer la ligne à Wollongong, avec le doigt sur la bouche, a été comparé à des manières de joueur de foot. «Gotta love him or hate him», on va l’adorer ou le détester, pour reprendre une expression lancée sur Twitter et dans différents podcasts.
En Belgique, par contre, la dualité s’est calmée. Son fameux geste, par lequel il voulait faire taire définitivement les critiques entendues après le championnat du monde de l’année dernière, s’est noyé dans un déferlement de superlatifs. Les victoires permettent de balayer les commentaires négatifs, surtout quand on connaît la soif des fans belges de cyclisme, étanchée après la domination de Remco Evenepoel sur le Tour d’Espagne et le Mondial. Et puis le nouveau détenteur du maillot arc-en-ciel a adapté sa communication et son comportement en général, à l’âge où Van Aert avait subi la même transformation. Durant la Vuelta, avant et après les Mondiaux, Evenepoel a commis peu d’erreurs, voire aucune. Tout comme il est devenu, dans l’équipe belge, un leader exemplaire, un gars qui motive les troupes.
Tels des caméléons, Wout van Aert et Remco Evenepoel se sont adaptés à ce qu’on attend des plus grands champions dans un monde du cyclisme sans cesse plus médiatisé. C’est notamment pour ça qu’on ose les comparer à Eddy Merckx. Ils ont cet autre point commun: la gestion de la pression, sur le vélo et dans la vie.
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Les deux gars ont une éthique de travail irréprochable qui leur a été enseignée par leurs parents. Ce sont des vainqueurs nés avec une soif de succès extraordinaire. À signaler aussi, et c’est important: ils ont tous les deux connu les contraintes physiques et mentales d’un retour après une grave chute qui aurait pu mettre fin à leur carrière. Van Aert a lourdement chuté au Tour de France 2019, Evenepoel est passé près du pire au Tour de Lombardie 2020. Evenepoel est devenu encore plus sage que Van Aert après être passé par cette phase.
S’il arrive à se canaliser, Remco va se voir pousser des ailes avec son maillot de champion du monde. Comme Van Aert volait sur le Tour de France avec la tunique verte. Presqu’au sens propre à Calais, après son extraordinaire solo. Les chances sont grandes qu’ils continuent à performer. L’un d’une manière plus expressive que l’autre, mais c’est aussi ce qui fait le charme de ces deux champions d’exception. Qui, finalement, se ressem- blent pas mal.
Numéro spécial cyclisme: en vente à partir du 27 octobre
Dans ce numéro nous reviendrons longuement sur la saison historique et les fantastiques performances de Wout van Aert et Remco Evenepoel. À découvrir également, un dossier sur le cyclo-cross et un zoom sur les cent ans des Six Jours de Gand. Bonne lecture!
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