Jonas Creteur
Tour de Belgique: « Non, Yves Lampaert, ce n’était pas qu’un « fait de course »… »
Il y a eu beaucoup d’agitation dans le monde du cyclisme après la disqualification d’Yves Lampaert lors de la dernière étape du Tour de Belgique. Les actions du champion de Belgique du contre-la-montre ont été punies à juste titre, bien que sa réaction condescendante « c’est la course » ait été au moins aussi mauvaise que son geste. Analyse.
Le dimanche 17 avril 2022, juste après l’arrivée de Paris-Roubaix, le toujours spontané Yves Lampaert qualifie de « veau » le spectateur qui l’a percuté dans l’un des derniers secteurs pavés, ce qui signifie un idiot en flamand occidental.
Une réaction émotionnelle et à chaud qui semble compréhensible de la part d’un coureur qui, après un printemps difficile et perturbé par la maladie, a vu une possible place sur le podium d’un Monument s’envoler à cause du comportement inconséquent d’un spectateur. Qui plus est dans une course qu’il rêve d’accrocher à son palmarès depuis des années.
Dans le nord du pays, Lampaert véhicule l’image du sympathique fils de fermier. Il est apprécié, notamment en raison de ses prononciations colorées typiques du flamand occidental. Dans un sport où la communication est parfois devenue aseptisé, un peu de franchise fait forcément du bien.
Mais sur les réseaux sociaux où l’on ne pardonne aucun écart, l’emploi du mot « veau » a également valu des critiques à l’égard du coureur de Quick-Step. À tel point que l’intéressé a réagi le soir même sur Twitter en affirmant qu’il « n’aurait peut-être pas dû appeler le spectateur comme ça » , tout en rappelant que ce dernier aurait dû se tenir plus loin de la route.
Ce dimanche 19 juin 2022, juste après l’arrivée de la dernière étape du Tour de Belgique, le toujours spontané Yves Lampaert a cette fois affirmé que le « Kilomètre en Or » précédent la ligne finale « s’est très bien passé ». Sur les images, cela » semblait un peu spectaculaire « , mais il s’agit « d’un fait de course » et » des choses bien pires se sont déjà produites dans les pelotons ».
Le Flandrien occidental fait référence à son emploi des coudes pour enfermer Tim Wellens à deux reprises avant le sprint final. Ce dernier n’a donc pas pu se battre à armes égales contre le coureur de Quick-Step, Mauro Schmid, alors que les secondes de bonifications attribuées étaient décisives pour déterminer le vainqueur de ce Tour de Belgique. Le Suisse et le coureur de Lotto-Soudal étaient en effet classés dans la même seconde au départ de la dernière étape.
Malgré qu’il ne se soit rien passé selon lui, le jury de la course a décidé de disqualifier Lampaert pour avoir gêné et mis en danger un autre coureur lors du sprint. Une décision plus que justifié, car ses manoeuvres ont dépassé les limites de l’admissible et étaient plus de l’ordre de l’intimidation qu’autre chose.
En effet, des choses plus graves sont souvent arrivées dans les préparations de sprint, mais cela ne justifie pas les manoeuvres de Lampaert. Malgré son envie de faire ses preuves en vue d’une sélection sur le Tour, Lampaert n’a pas dit par hasard qu’il peut « bien se battre pour les places ». Car en plus de devoir forcer une sélection pour la Grande Boucle, le Flandrien n’a pas encore réussi à ce que son contrat soit prolongé chez Quick-Step Alpha Vinyl.
Les éventuelles circonstances atténuantes ne doivent pas empêcher de critiquer les déclarations d’après-course de Lampaert, plus encore que ses coups de coude. Le fait d’essayer de normaliser des actions (délibérées) immédiatement après l’arrivée avec des phrases telles, « c’est la course », est en soi assez mauvais. Tout comme l’absence d’excuses dans les heures qui ont suivi. Surtout quand il s’était excusé pour l’emploi du terme « veau » après sa chute sur Paris-Roubaix.
Une communication contradictoire
Il était d’ailleurs étonnant et révélateur que le directeur de l’équipe belge, le bouillant Patrick Lefevere, n’ait pas mâché ses mots : « L’exclusion d’Yves est justifiée ». Très souvent, il défend les loups de sa meute envers et contre tout, mais pas cette fois.
Il faut par contre se demander pourquoi il n’a (comme personne dans l’équipe) pas incité Lampaert à s’excuser dans la soirée. Le compte Twitter de Quick-Step Alpha Vinyl fait également l’éloge du « super travail du Wolfpack » qui a guidé Mauro Schmid vers la victoire finale. Des déclarations contradictoires avec la sortie de Lefevere. L’absence d’excuses n’est certainement bonne ni pour l’image de l’équipe ni surtout pour Lampaert.
Conclusion : non, il n’y a pas eu de grand drame. Il est même possible que Schmid aurait gagné ce Tour de Belgique même sans les coups de coude à son coéquipier, bien que Tim Wellens ait affirmé le contraire dans sa réaction plutôt modérée et posée après la course.
Peu importe l’impact de cette action, il faut pointer du doigt l’attitude de Lampaert ainsi que l’étrange communication de son équipe. Il faut cesser avec cet état d’esprit digne du Far West que l’on accepte trop souvent dans les sprints. La sécurité doit primer avant tout.
Il suffit d’ailleurs de demander au… coureur de Quick-Step qui a remporté la dernière étape du Tour de Belgique ce qu’il en pense. En août 2020, le Néerlandais Fabio Jakobsen avait été victime d’une manoeuvre encore plus dangereuse de la part de Dylan Groenewegen. Avec des conséquences auraient pu être dramatiques pour sa carrière et même sa vie.
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