Pourquoi une victoire de Wout Van Aert sur Paris-Roubaix serait-elle exceptionnelle ?
Wout van Aert a déjà livré des performances exceptionnelles à plusieurs reprises. Une victoire dimanche à Paris-Roubaix, après sa récente infection au coronavirus et après trois semaines sans compétition, ferait certainement partie des sommets de sa carrière. Ce serait même un événement unique si l’on regarde dans le rétroviseur.
Guess who’s back
Back again
Shady’s back
Tell a friend
Guess who’s back, guess who’s back
Guess who’s back, guess who’s back
Guess who’s back, guess who’s back
Guess who’s back
C’est sur les paroles de Without Me du rappeur Eminem que Wout van Aert a annoncé son retour sur Instagram. Trois semaines après sa dernière course, Gand-Wevelgem et une infection à la Covid, il sera bien au départ de Paris-Roubaix ce dimanche.
Seul lui et son entourage proche savent dans quel état de forme il se présentera à Compiègne après avoir dû faire l’impasse sur le Tour des Flandres et l’Amstel Gold Race. Le coureur lui-même ressentira sans doute plus d’incertitude que d’habitude.
Si Wout van Aert devait remporter cette 119e édition de Paris-Roubaix, ce serait tout simplement une performance jamais réalisée depuis plus de soixante ans. Depuis le début des années 60, aucun coureur n’a remporté l’Enfer du Nord après avoir manqué la compétition pendant une période aussi longue et sans avoir participé au Tour des Flandres.
Des surprises assez récentes
Les vainqueurs de l’Enfer du Nord qui étaient absents au départ de la Vlaanderens Mooistesont assez rares. Au XXIe sicèle, on en recense cependant deux : Johan Vansummeren en 2011 et Mathew Hayman en 2016, au grand dam de Tom Boonen et de toute la Belgique du cyclisme.
Le Limbourgeois avait dû renoncer au Ronde en raison d’une légère blessure au genou, selon ses propres dires. Il s’est offert le pavé du vainqueur deux semaines après sa dernière course, Gand-Wevelgem.
L’Australien avait même manqué tout le printemps flamand en raison d’une fracture du coude subie lors du Circuit Het Nieuwblad. Il avait préparé Paris-Roubaix d’une manière particulière, avec des séances de home trainer dans son garage et en participant le week-end précédant la course au GP Indurain et à la Vuelta La Rioja.
Il faut ensuite remonter beaucoup plus loin dans le temps pour trouver trace d’un lauréat de la Reine des Classiques, qui n’a pas pris part au Tour des Flandres. En 1988, Dirk Demol s’est imposé sur le Vélodrome après une échappée de marathonien. Une semaine plus tôt, il avait été écarté de la sélection de l’équipe ADR pour le Ronde par le directeur sportif José De Cauwer. On retrouvait dans cette formation des coureurs de la trempe de Fons De Wolf, René Martens, Pol Verschuere ou Frank Hoste…
Demol avait dû assister au succès de son leader Eddy Planckaert sur la Vlaanderens Mooiste derrière son poste de télévision. Il a ensuite participé au GP Denain, où il a pris la quatrième place. Trois jours plus tard, c’est lui qui brandissait le pavé du vainqueur au milieu du Vélodrome André Pétrieux.
Deux Français dans les eighties
Dans les années 1980 et ce n’est pas une coïncidence, deux Français ont également remporté Paris-Roubaix sans avoir disputé le Tour des Flandres la semaine auparavant. Il s’agit de Marc Madiot en 1985, qui restait sur une sixième place à Paris-Camenbert cinq jours avant le départ de l’Enfer du Nord et de Bernard Hinault en 1981. Le Blaireau avait terminé Gand-Wevelgem le mercredi et le GP Pino Cerami le jeudi. Il s’était aussi adjugé l’Amstel Gold Race trois jours avant le Tour des Flandres qui se déroulait le dimanche précédant Paris-Roubaix.
Après Hinault, il faut remonter neuf ans en arrière et l’édition de 1972 disputée voici 50 ans. C’est l’année de la première victoire d’une légende de la course, Roger De Vlaeminck. Celui qu’on surnomme le Gitan roule alors pour équipe italienne Dreher. Il digère mal son échec cuisant sur Milan-San Remo quelques semaines plus tôt où il avait dû se contenter de la 12e place alors que la presse italienne l’avait érigé en grand favori. Il décide donc de faire l’impasse sur le Tour des Flandres qui se déroule le 9 avril.
De Vlaeminck s’aligne alors le mecredi avant la Reine des Classiques sur Gand-Wevelgem où il prend la seizième place. Le lendemain, il monte sur le podium du GP Pino Cerami (3e). Il remportera l’Enfer du Nord le dimanche au terme d’une démonstration en solitaire qui le voit franchir la ligne d’arrivée avec près de deux minutes d’avance sur André Dierickx.
Aucune garantie
Au cours des deux décennies précédentes, plusieurs coureurs se sont imposés dans l’Enfer du Nord, sans être passés par le Tour des Flandres. Aucun d’entre eux cependant ne restait sur trois semaines sans course, comme c’est le cas de Wout van Aert cette année. Les événements du passé ne sont toutefois pas une garantie pour l’avenir, même en cyclisme.
Après tout, l’homme d’Herentals avait bien remporté le Circuit Het Nieuwsblad plus tôt cette année avec zéro jour de course dans les jambes (mais sans être malade). Il était ainsi devenu le premier coureur à réaliser cette prouesse depuis Joseph Bruyère en 1980.
Mathieu van der Poel a aussi terminé troisième de sa première course de la saison, Milan-San Remo, avant de s’offrir le Tour des Flandres avec seulement sept jours de course dans les jambes. Wout Van Aert peut-il réussir un tel exploit à Roubaix ou est-ce que cette préparation perturbée aura finalement un impact négatif sur sa prestation ? Réponse ce dimanche.
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