Le dos de Mathieu van der Poel peut-il encore lui jouer des tours : « Un hamburger aplati »
Largement battu à Coxyde par Wout van Aert, Mathieu van der Poel a révélé avoir à nouveau souffert du dos à un moment donné. Un problème devenu récurrent pour le Néerlandais qui avait déjà dû écourter sa saison l’an dernier. Lors de cette occasion, nous avions demandé à l’ostéopathe Yves Jochems de donner son avis sur la question.
L’an dernier, après seulement deux cross, Mathieu van der Poel avait été contraint d’écourter dans sa saison dans les labourés, après avoir abandonné à Heusden-Zolder. La raison de ce forfait inattendu ? Un mal de dos récurrent. Quel pourrait être le problème exact de ce maux qui gêne le champion néerlandais depuis quelques années maintenant ? A l’époque, nous avions demandé à l’ostéopathe Yves Jochems de donner son avis sur le sujet.
Lorsque Mathieu van der Poel a pris le départ de l’Antwerp Port Epic le 12 septembre 2021, il a expliqué pourquoi, après sa chute dans la course olympique de VTT à Tokyo, il n’avait plus couru en compétition depuis plus d’un mois et avait notamment déclaré forfait pour le Tour du Benelux. « J’ai été assez malmené par mon dos », avait déclaré MvdP. « Je pense que c’est une surcharge de travail qui a provoqué une accumulation de liquide entre les vertèbres. C’est désagréable sur le vélo, mais j’ai pu m’entraîner régulièrement depuis une semaine. Avant cela, c’était plutôt du vélo d’appartement, mais après un gros entraînement, la douleur revient. »
Van der Poel a néanmoins connu une campagne sur route assez courte, avec les Championnats du monde et Paris-Roubaix, mais il n’y était pas encore à son meilleur niveau, malgré sa troisième place dans l’Enfer du Nord. Il n’était pas non plus au sommet de son art lorsqu’il a commencé sa saison de cross dimanche dernier à Termonde. Il est toujours à la recherche de sa meilleure forme, après avoir déclaré qu’il n’avait pas été capable de s’entraîner pendant cinq jours à deux reprises, suite à une chute à l’entraînement. Le petit-fils de Raymond Poulidor souffre d’une blessure ouverte et d’une inflammation au genou gauche. Pour sa reprise dans les labourés, le Néerlandais a terminé deuxième derrière Wout van Aert, mais lundi, à Heusden-Zolder, les choses se sont compliquées pour le champion du monde. Découragé, MvdP a été contraint de baisser pavillon. Apparemment, son dos s’est rappelé à son mauvais souvenir, pas encore remis des efforts de la veille (où l’on avait déjà pu voir qu’il devait s’étirer en raison de douleurs au dis) et encore fragilisé par une chute lors du cross d’Heusden-Zolder alors qu’il tentait de revenir sur un Van Aert parti pour son cinquième succès en autant de courses disputées.
Pas d’hernie
Mardi, l’équipe Alpecin-Fénix a annoncé que Van der Poel ne prendrait pas le départ des courses de Loenhout (ce jeudi) et d’Hulst (dimanche). Le Néerlandais doit se reposer car les examens médicaux ont révélé « un gonflement d’un disque intervertébral ». Van der Poel et son équipe se montrent évasifs sur les causes exactes sauf qu’il ne s’agit pas d’une hernie discale mais d’un bombement du disque intervertébral qui appuie sur le nerf, provoquant des douleurs et une perte de force dans les jambes. « Cela n’est pas confirmé par les scans », affirmait Alpecin-Fénix fin août. Quel est donc le problème ? Nous avons consulté l’ostéopathe Yves Jochems, qui a traité dans son cabinet de nombreux athlètes souffrant de problèmes de dos. Nous avons présenté à Jochems toutes les déclarations de Mathieu Van der Poel concernant les symptômes de son problème de dos et lui avons demandé d’établir un diagnostic probable. Nous avons mis l’accent sur le terme « probable » car il n’est forcément pas basé sur tous les détails du dossier médical de MvdP.
« Van der Poel ne souffre probablement pas d’une hernie discale », confirme Jochems. Étant donné qu’il est question de « liquide entre les vertèbres » et de « gonflement du disque intervertébral », son mal de dos est plus que probablement dû à un bombement discal. Dans ce cas, le disque intervertébral se bombe sur toute la circonférence, ou du moins sur une grande partie de celle-ci. Vous pouvez comparer cela à un hamburger qui s’insère parfaitement dans un petit pain sans déborder. Mais lorsque vous aplatissez ce hamburger et que vous le remettez dans le petit pain, la viande déborde tout autour. C’est donc différent d’une hernie, car il s’agit, pour faire à nouveau une comparaison avec la nourriture, d’une pizza dont une pointe dépasse et dont les autres morceaux restent en place.
Un problème qu’il traînera toute sa carrière ?
« Ce type de bombement discal se produit lorsque la partie inférieure du dos est surchargée ou lorsque le disque intervertébral ne contient pas assez de liquide », explique Yves Jochems. « Elle peut alors se bomber et exercer une pression sur les structures entourant la vertèbre, provoquant une inflammation de celle-ci. Cela peut alors entraîner un gonflement et donc une pression encore plus forte sur la vertèbre. Dans certains cas, elle peut également toucher un nerf et provoquer une douleur ou une perte de force. Le problème avec cela est qu’il est très difficile de voir une pression directe sur le nerf sur un scanner. Ce qui, dans le cas d’une hernie, est vrai à un endroit précis. Cependant, les symptômes sont assez similaires. C’est pourquoi il faut souvent beaucoup de temps avant de trouver la cause exacte. »
« Le bombement du disque est un problème difficile à résoudre, mais vous pouvez faire disparaître le gonflement avec des médicaments ou une injection de cortisone. Il faut ensuite une combinaison mêlant de la physiothérapie ou de l’ostéopathie, une position sur le vélo adaptée et des exercices préventifs pour le dos. De cette façon, les symptômes peuvent disparaître lentement, mais la chance est réelle que la douleur revienne par la suite. Ce qui est probablement le cas avec Van der Poel maintenant, alors qu’il se plaignait déjà du dos l’été dernier. La durée de son indisponibilité dépendra principalement de la gravité de sa blessure et de la capacité de son corps à se rétablir pendant sa prochaine période de repos et sa période d’entraînement. Et dans quelle mesure il peut ou ne peut pas employer son dos dans les efforts intenses. En tout cas, cela risque d’être un problème permanent ou un centre d’attention tout au long de sa carrière ».
Rappelons qu’Eddy Merckx, victime d’une lourde chute sur la piste de Blois quelques semaines après son premier Tour de France victorieux de 1969, a conservé des séquelles au dos toute sa carrière de cet accident et estimait n’avoir jamais pu retrouver toute sa puissance. Vu le palmarès que s’est offert le « Cannibale » malgré cela, on ne peut espérer que la même chose pour le plus beau rival de Wout Van Aert.
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