» JE SUIS FIER DE MA CARRIÈRE « 

Ce soir, Thomas Buffel affronte le Club Bruges de sa région natale. Il dispute sa septième saison à Genk mais ne pense pas encore à effectuer ses adieux.

Thomas Buffel (35 ans) reste accessible. Il ne doit même pas demander l’autorisation de Genk :  » Je sais ce que je dis.  »

En 2009, tu n’aurais sans doute pas imaginé achever ta carrière à Genk ?

THOMAS BUFFEL : Non, mais quand je me sens bien quelque part, j’ai envie d’y rester. J’ai quitté Feyenoord parce que je ne m’entendais pas avec Ruud Gullit, mais j’aimais le club. Idem aux Rangers. Je me suis fait opérer des genoux pour y rester plus longtemps mais ça n’a pas marché. Comme je voulais conserver mon statut d’international, j’ai dû partir. Mon année au Cercle a été bizarre mais un an plus tard, je signais à Genk, où je me sens bien. J’ai parfois eu des contacts, ne serait-ce qu’histoire de renforcer ma position ici, mais ça ne s’est jamais concrétisé. J’étais libre après deux ans mais le Racing allait jouer la Ligue des Champions… Ensuite, Stéphanie a accouché des jumeaux. J’avais déjà 32 ans. Si j’étais parti, c’eût été pour l’argent, dans une petite équipe anglaise. Or, Genk est un grand club. Je détiens le record du nombre de matches joués pour le club. J’ai donc réussi quelque chose.

Yoni Buyens, Igor De Camargo et toi deviez être les piliers de la nouvelle équipe mais il ne reste plus que toi.

BUFFEL : Igor et Yoni ont de la valeur mais l’arrivée de deux avants et d’un médian en hiver a accru la concurrence. Samatta et Karelis nous permetttent de nous créer des occasions plus bas alors qu’Igor est un avant de surface. Au début, nous n’étions pas assez dominants pour y arriver. D’autres joueurs se sont bien développés. Pozuelo, enrôlé pour jouer plus haut, est précieux dans l’entrejeu parce qu’il conserve bien le ballon. Ndidi, un défenseur central, récupère bien le cuir aussi. Nous n’alignons donc qu’un seul médian défensif, au détriment de Yoni.

 » L’ESSENTIEL EST DE JOUER  »

Tu es incontournable. Quel est ton secret ?

BUFFEL : C’est un mix : ma passion pour mon métier, mon engagement, ma récupération physique et mentale. Je sais me préparer au match. Ensuite, j’ai besoin de détente mais je ne sors plus de chez moi à quatre jours du match suivant. Je me soigne, même si je bois mon verre de vin. Mes tests ont été moins bons l’été dernier. Le cancer de Stéphanie s’était réveillé et j’ai marqué le coup. Je me suis rattrapé au fil des semaines. Mes réflexes sont toujours aussi rapides. Placer une accélération au bon moment est aussi important que la vitesse pure.

Un joueur âgé doit écouter son corps et se reposer quand il en a besoin. Comment est-ce possible avec Peter Maes ?

BUFFEL : Il a fallu s’y faire. Peter nous oblige à courir le lendemain d’un match. Pas de vélo, de la course. Le deuxième jour, la séance est corsée alors que c’est mon pire jour. Mais je m’y suis habitué. Ce qui nous aide, c’est que le lendemain est libre. C’est bien pensé car la semaine est longue si on a congé le deuxième jour.

Tu es le plus régulier depuis des années mais Maes a placé un gars de 18 ans sur ton flanc droit. Ce n’était pas marrant ?

BUFFEL : Je peux réaliser mes actions de la gauche. L’essentiel est de jouer. Leon Bailey converge bien vers l’axe et a un bon tir. Je pense que l’entraîneur voulait exploiter cet atout.

Tu as émargé à la première levée de talents belges formés à l’étranger mais tu es devenu superflu. Es-tu né trop tôt ?

BUFFEL : Peut-être. Je n’ai plus joué depuis le match amical contre la Slovaquie, en 2013. D’autres joueurs ont ensuite émergé. Mais j’ai d’autres références dont je puis être fier. L’équipe nationale aurait pu être la cerise sur le gâteau, c’est tout. J’ai marqué 7 buts en 35 matches, ce n’est pas mal. Peu de joueurs actuels marquent un but tous les quatre ou cinq matches. Je suis fier de ma carrière.

Tu as gagné une Coupe d’Europe avec Feyenoord. Ce n’est pas commun.

BUFFEL : Durant ma meilleure saison à Feyenoord, j’ai inscrit 18 buts. Celui qui le fait maintenant joue demain en Premier League. Feyenoord était un grand club à ce moment et des choses ont peut-être été bloquées dans mon dos. Mon père m’a dit que Rummenigge s’était manifesté au nom du Bayern. Mais bon, je suis fier d’être important pour un grand club belge.

 » MON CONTRAT PRÉVOIT UN MATCH D’ADIEU  »

Ton contrat court encore un an. Genk est-il ton dernier club ?

BUFFEL : Achever ma carrière dans un club pareil serait superbe mais je ne veux rien précipiter. Mon contrat prévoit un match d’adieu. Imaginez que nous conservions ce noyau et réussissions quelque chose la saison prochaine : ce serait le bon moment. Partir puis revenir pour ce match d’adieu me paraît difficile.

Songes-tu à ton après-carrière ?

BUFFEL : Beaucoup. J’ai mon diplôme d’entraîneur et le suivi des joueurs m’intéresse mais on n’est pas libre, en football. J’ai déjà dû renoncer à beaucoup de choses dans ma vie. J’ai envisagé d’écrire un livre. Pas une simple biographie mais un ouvrage éducatif, où des experts et d’anciens collègues répondraient à cette question : que peut faire un jeune joueur pour devenir footballeur professionnel. Le livre sortira en septembre, à l’occasion d’un événement caritatif.

Ta compagne est malade. Tu as toujours été très ouvert à ce propos.

BUFFEL : Ça vaut mieux, pour éviter que les rumeurs n’enflent. Nous avons accordé une interview et maintenant, on nous laisse en paix.

Quel impact a la maladie de Stéphanie sur ta carrière ?

BUFFEL : Parfois, j’étais loin du terrain, en pensées, à l’entraînement. Je ne peux pas demander un congé pour garder mes enfants ! Mais ce n’est rien, comparé à ce que mon amie endure. Cette pensée m’aide à me rebooster. Pendant les semaines qu’elle a passées aux soins intensifs, les matches étaient la seule chose qui me faisait plaisir. J’essaie de positiver, je vis au jour le jour. Nous profitons de nos moments ensemble, avec les enfants.

Prester dans ces conditions, chapeau !

BUFFEL : Le football nous a réunis et nous a fait vivre de bons moments à l’étranger. Mais sa maladie peut avoir un impact sur ce que je ferai à l’avenir.

Comment va-t-elle ? Elle avait rechuté.

BUFFEL : Nous vivons contrôle par contrôle, sans penser à l’avenir mais Stéphanie est forte. Après chaque cure de chimio, elle tourne la page et s’occupe des enfants. Je l’admire beaucoup.

PAR JAN HAUSPIE – PHOTO BELGAIMAGE – CHRISTOPHE KETELS

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