GRAND MUET
Comment le Hongrois fait-il pour être devenu, sans parler, le joueur le plus régulier en défense chez les Coalisés ?
Le FC Brussels aime manifestement les séries. Après une entrée en matière sur les chapeaux de roue, ponctuée par un magnifique 10 sur 12, les Coalisés n’ont plus engrangé la moindre unité en quatre rencontres. La seule constante, chez eux, au cours du premier quart du championnat, ce sont les prestations autoritaires de leur défenseur hongrois, Zoltan Petö (32 ans). Le Hongrois respire indéniablement la grande forme depuis qu’il a troqué sa place de back gauche contre un rôle axial.
En position flatteuse en début de saison, le FC Brussels a singulièrement dégringolé dans la hiérarchie depuis lors. Comment l’expliquez-vous ?
Zoltan Petö : Notre entrée en matière a sans doute été légèrement trompeuse. Nous avons commencé par un 6 sur 6 contre Mons et Zulte Waregem et beaucoup se sont dit : si cette équipe du FC Brussels parvient à battre au stade Arc-en-ciel une formation qui joue l’Europe, elle doit avoir immanquablement pas mal de possibilités. A l’occasion du match suivant, face à Saint-Trond, chez nous, une déception certaine, était perceptible à bon nombre de niveaux sous prétexte que nous n’avions réalisé qu’un nul. Comme quoi les résultats réalisés jusque-là avaient engendré de grandes espérances, peut-être trop grandes même. Par la suite, grâce à un succès au Lierse, beaucoup ont cru que la machine était relancée et que le prétendu faux-pas devant les Jaune et Bleu constituait l’exception. Depuis lors, le 0 sur 12, résultat de 4 revers successifs contre le Germinal Beerschot, le Standard, Westerlo et le Cercle Bruges nous a ramenés les pieds sur terre. Honnêtement, nous ne méritions pas d’être crédités de 10 unités après 4 journées. Tout comme nous aurions pu espérer davantage que 0 point à la faveur des 4 matches suivants. Logiquement, après 8 rencontres, nous aurions dû totaliser une douzaine de points. Soit la moitié du total mis en jeu.
Le FC Brussels a pris 7 points en déplacement, pour 3 à peine en 4 matches à domicile. N’est-ce pas inquiétant à l’aube de la prochaine confrontation face au Club Bruges ?
Je pense, au contraire, que ce match n’aurait pas pu mieux tomber. Le passé a prouvé que, sur son terrain, le FC Brussels était toujours en mesure de poser des problèmes épineux aux meilleurs. La saison dernière, nous avions réalisé le partage contre ces mêmes Bleu et Noir et face à Anderlecht, tout en prenant le meilleur sur le Standard. C’est la raison pour laquelle je me dis que nous aurons peut-être plus facilement l’opportunité d’accrocher le grand Bruges plutôt que de ramener un point du Cercle. Je suis d’avis aussi que la perspective d’affronter l’un des ténors de la compétition va nous permettre de nous remettre les idées bien en place. Car après ce 0 sur 12, obtenu avec nos qualités classiques articulées autour de l’organisation, la rigueur, la disponibilité, il faut bien avouer que toutes ces bonnes dispositions s’étaient quelque peu perdues. A force d’entendre dire que nous prenions des points à défaut de livrer des prestations chatoyantes, quelques-uns ont oublié par moments leurs consignes les plus élémentaires. En vertu de la qualité de l’opposition, je ne crois pas que ceux-là retomberont dans les mêmes travers contre le Club Bruges.
L’axe plutôt que le flanc
Vous témoignez d’une constance à toute épreuve depuis le début de la compétition, au point de faire figure de joueur le plus régulier du FC Brussels. A quoi attribuez-vous cette bonne passe ?
Même si j’avais joué durant quelques mois au Verbroedering Geel en 1999-2000, il m’a quand même fallu un temps d’adaptation à mon retour en Belgique en janvier 2005. De plus, j’ai été aligné au back gauche alors que ma préférence va à un rôle plus axial. Je suis capable de me tirer d’affaire sur le flanc. J’y ai d’ailleurs joué à mes débuts, à Debrecen, en Hongrie. Mais après deux années, j’y ai occupé une fonction plus centrale qui me convient nettement mieux. Je n’ai pas l’âme d’un navetteur, qui fait la ligne 20 fois par match. Je préfère de très loin un rôle en marquage. Depuis que j’ai coulissé au centre, j’ai le sentiment de donner enfin le meilleur de moi-même. Il faut croire que l’entraîneur est de cet avis aussi car je n’ai plus jamais dû faire banquette dès l’instant où j’ai pu officier comme stoppeur. Au fil des mois, j’ai pu grandir dans cette fonction au point de m’y enhardir. Au départ, il ne fallait jamais trop compter sur moi lorsqu’il fallait tirer un coup franc bien placé par exemple. Je laissais cette initiative aux autres. A présent, dans la mesure où je possède une bonne frappe, je n’hésite pas à prendre mes responsabilités. Ce fut le cas au Standard, notamment, où j’ai marqué sur une phase de ce type.
C’était là un but tout aussi somptueux que celui que vous avez inscrit contre le Cercle la saison passée. Vous ne marquez pas beaucoup, mais ce sont chaque fois des buts d’anthologie ?
C’est vrai. Ils se situent toujours aux alentours de mon anniversaire, que je fête le 19 septembre ( il rit). C’est un petit cadeau sympa que je me fais. En Hongrie déjà, j’étais coutumier de buts sur phases arrêtées. Chaque semaine, le jeudi, je travaille cette petite spécialité. Je ne suis d’ailleurs pas le seul à être habile dans cet exercice. Christ Bruno ne se débrouille pas mal non plus. En fonction de l’endroit où se trouve le ballon, c’est à lui ou à moi que revient le coup franc. Comme il est droitier et moi gaucher, on se complète bien. C’est marrant mais, à un moment donné, on était tous deux en concurrence pour le poste de back gauche. Finalement, nous avons trouvé notre voie, lui comme demi défensif et moi comme arrière central. Dans le contexte actuel du FC Brussels, c’est important. Il faut des joueurs chevronnés pour entourer les jeunes. Je fais figure d’expérimenté à l’arrière tandis que Christ, ainsi que Richard Culek, remplissent cette attribution au milieu du jeu. C’est important, pour un jeune, d’avoir un guide. Et c’est sans doute ce qui manque actuellement à mon grand copain Roland Juhasz à Anderlecht. Il a toutes les qualités requises pour s’imposer là-bas, et ce constat est tout autant d’application pour Nicolas Pareja, Mark De Man ou Olivier Deschacht qui sont tous des bons joueurs. Malheureusement, il n’y a plus de Hannu Tihinen pour les coacher. Avec l’équipe nationale hongroise, Roland a toujours disputé de bons matches. Mais il était chaque fois associé dans l’axe à un joueur expérimenté, comme Vilmes Sebok ou moi-même. Replacez-le dans un même cas de figure au Sporting et il fera l’unanimité.
Langage universel
Vos performances vous ont valu, l’année dernière, de réintégrer la sélection coachée par Lothar Matthäus. A présent que Peter Boszik a pris le relais, vous avez été privé des deux rencontres contre la Turquie et Malte. Pourquoi ?
C’est une question qu’il faudrait poser au coach. En Belgique aussi, les choix de René Vandereycken déconcertent parfois. Chez nous, il n’en va pas autrement mais loin de moi l’idée de vouloir jeter la pierre à qui que ce soit. Si je n’ai pas été repris, c’est que le coach national avait ses raisons. Quant à savoir lesquelles, je pense que la défaite 1-3 encaissée contre l’Angleterre avant la Coupe du Monde a laissé des traces. Je n’avais pas à rougir de mon match, pas plus que mes coéquipiers, mais John Terry et Peter Crouch nous avaient fait mal en jetant à la fois tout leur poids et leur taille dans la bataille en deuxième mi-temps. Et on sait ce que ça veut dire. Anderlecht l’a lui aussi vérifié à ses dépens en Ligue des Champions la saison passée. A 32 ans, j’ose espérer que la porte n’est pas fermée. Il serait dommage d’arrêter sur ce souvenir alors que je n’ai qu’à me féliciter des beaux moments vécus avec la Hongrie. J’étais capitaine de la sélection olympique à Atlanta, puis capitaine des A tout court. Cela, on ne me l’enlèvera pas.
Vous comprenez le français mais pour les besoins de cette interview, vous avez préféré que votre manager, Georges Bala, fasse office d’interprète. Comment se passe la communication au sein de la défense du FC Brussels avec Sydney Kargbo qui parle anglais, Mohama Atte-Oudeyi Zanzan le français et Steve Colpaert, d’origine néerlandophone ?
Le football est un langage universel. Dès lors, à partir du moment où les tâches sont bien définies, il n’y a pas le moindre problème. Par son approche méthodique, le coach nous fournit tout simplement les clés pour nous tirer d’affaire à tout moment. En réalité, je devrais plutôt parler de passe-partout car tout est tellement structuré que pas mal d’éléments sont interchangeables chez nous. J’ai déjà évoqué mon cas et celui de Christ Bruno mais Steve Colpaert peut lui aussi tirer son épingle du jeu dans la ligne médiane et Alan Haydock, demi de formation, s’est déjà montré en verve à l’arrière aussi. Dans toutes ces situations, il n’est pas nécessaire de parler. Tout ce qui importe, c’est qu’à chaque instant, chacun cerne à la perfection les contours de sa mission.
Votre contrat arrive à échéance. Des démarches ont-elles déjà eu lieu pour sa reconduction ?
Les grandes man£uvres ont probablement débuté, puisque Colpaert a été le premier à s’asseoir autour de la table des négociations. Je nourris l’espoir d’imiter son exemple. Je ne cache pas que je suis très heureux au FC Brussels, de même que dans la capitale belge tout court. J’apprécie le public bon enfant du club et il me le rend bien. Que demander de plus, dans ces conditions, qu’une reconduction de mon contrat ?
Quelle différence relevez-vous entre le football belge de la fin du 20e siècle et celui que vous avez retrouvé en 2005 ?
A l’époque, il y avait quand même plus de qualité. Anderlecht, avec Jan Koller et Tomasz Radzinski en pointe était plus fort qu’actuellement, même si je n’ai pas eu la vie facile, à mon retour, avec un certain Christian Wilhelmsson. Dans l’ensemble, le football était plus prévisible en ce temps-là. Avec les coaches Trond Sollied et Aimé Anthuenis aux commandes, les deux grands dictaient leur loi partout. A présent, le moindre déplacement leur donne des sueurs froides. Voyez les exemples de Saint-Trond et Westerlo où ils ont obtenu tous deux une victoire à l’arraché. Et au FC Brussels, le Club est loin d’avoir gagné d’avance. La preuve sous peu ( il rit).
BRUNO GOVERS
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